Philip Selway

Note à l'attention des adorateurs de la bande la plus célèbre d'Oxford : merci d'accorder à cette chronique toute l'indulgence et la bienveillance dont vous pouvez faire preuve s'agissant d'évoquer le travail d'une de vos idoles. C'est ainsi que je me présente devant vous, humble mais sur le qui-vive afin d'éviter tout projectile, ayant personnellement pris le large après OK Computer et, surtout, ne m'étant jusqu'à cette douce soirée de mai guère penchée sur le travail de Philip Selway en solo. C'est donc avec beaucoup de curiosité que votre chroniqueuse s'est rendu au Café de la Danse pour découvrir ce que le discret batteur avait à nous proposer en son propre nom.

Un peu à nu et enfin de retour sous les spotlights, Philip Selway a sorti en février dernier son quatrième disque, Strange Days, adoubé par la faction pro – Oxfordshire de la rédaction. Et en effet, on confirme le fait que Philip Selway est un auteur compositeur de grand talent, qui insuffle dans ses textes et sa musique une incroyable douceur, tantôt bucolique, tantôt douce-amère, en nous démontrant ses talents de multi-instrumentiste en complément de sa maîtrise des fûts, qu'il délaisse complètement sur scène pour se concentrer sur la guitare, le clavier et quelques notes de basse.


Avec l'ombre imposante de sa formation d'origine planant au-dessus de son joli crâne, on pouvait s'attendre à trouver quelques cohortes de fans tout aussi fidèles au groupe qu'à chacun de ses side-projects. Etonnamment, c'est un Café de la Danse très modestement rempli et en configuration assise qui nous accueille, en plus de la présence d'une mini brochette de fans déjà assise impatiemment au pied de la scène, à même le sol.
Et pourtant, le concert sera à l'image de ce qu'incarne Philip Selway : un personnage d'un calme olympien, amical, tout aussi réservé que chaleureux, qui dès son entrée sur scène fera preuve de la plus grande modestie face aux présents, ne cessant de les remercier de lui accorder cette belle attention.

Déclinant en partie les titres de son dernier album, Philip Selway est accompagné de trois musiciens. Vont défiler durant l'heure et quart de concert de nombreux instruments sur scène, entre batterie, guitares folk et électriques, violon, synthétiseurs, jusqu'à la scie musicale qui se fait bien rare si ce n'est dans une compétition menée en milieu forestier par un certain George Abitbol. Si vous me suivez jusque-là, vous méritez tout mon respect. Ces mêmes instruments qui passent entre les mains habiles de chacun des musiciens, pratiqués à l'aide d'archers, de mailloches et même de pinceaux (sur les cordes de guitare, du jamais vu nous concernant).


Parmi ce défilé sonore atypique trône Philip Selway qui nous charme littéralement grâce à un chant doux mais imposant. C'est une ambiance cosy, très éthérée, presque aérienne qui se dégage de son univers musical, et tout sera mis en œuvre pour que le public se sente à l'aise, bien assis dans son siège mais néanmoins des plus attentifs. En général dissimulé derrière ses célèbres collègues, Philip Selway attire ici toute la lumière et ne cessera entre les chansons de dialoguer avec son public, dont certains ont fait le chemin depuis le lointain Chili pour l'occasion. Ce dernier reconnaîtra ses admirateurs dévoués et entamera à plusieurs reprises quelques bribes de conversation comme s'il retrouvait ses amis autour d'un verre.
Ce dernier nous rappelle ainsi qu'il y a tout juste trente ans, lui et ses comparses étaient présents au Café de la Danse, et alors à l'aube d'une fabuleuse aventure qui leur ouvrira très grand les portes de la renommée et de la reconnaissance, une certaine Diana Ross se trouvait parmi le public parisien. La déception fut grande pour les cinq jeunes musiciens d'alors qui se sont fait littéralement pauser un lapin par la Supreme diva après le concert des suites d'une invitation à diner non honorée.

Le solo sied parfaitement à Philip Selway, qui s'amusera à énumérer les différents tee-shirts présents à l'effigie des formations d'origines et annexes menées seules ou à plusieurs. Est-il alors nécessaire de citer dans ces dernières lignes le groupe dont est issu le très talentueux anglais ? On ne le souhaite pas tant Philp Selway lui-seul nous a littéralement enchanté, déclenchant sur les derniers morceaux des tonnerres d'applaudissement et une petite standing ovation. Cette pop cosmique et très raffinée se suffit à elle-même et démontre encore une fois le talent incontestable de chacun des membres de... Enfin, on se comprend !