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Saint-Malo, La Route du Rock - 16 août 2023

Live-report par Fabrice Droual

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Il est des rendez-vous d’été incontournables. Le festival La Route du Rock en fait indéniablement partie. Généralement programmé autour du 15 août, celui-ci est pour les âmes pop et rock un véritable pèlerinage. En cette année 2023, le festival malouin déroule une nouvelle fois la bande-son idéale pour les amateurs de musique pop rock, post punk. Il s’étale sur quatre jours, du 16 au 19 août, et commence avec cette première soirée à la salle la nouvelle Vague à Saint-Malo. Une fois n’est pas coûtume, c’est donc un mercredi, enfermé entre quatre murs, que je choisis de débuter mon marathon préféré. Probablement marqué par un été pluvieux, cet écrin bétonné au sol généralement collant en fin de soirée (pogos et bières ne faisant pas bon ménage) m’a fait de l’œil et me susurre à l’oreille : « Viens ! C’est ici que ça se passe ! ». C’est la rentrée !


Généralement il n’y a pas école le mercredi, mais aujourd’hui, même en pleines vacances estivales, j’ai envie d’enfiler mon cartable flambant neuf (en vente dès le 1er août dans les bons commerces), pour effectuer la rentrée scolaire avec le groupe de garage punk anglais Hotwax. Ces trois-là sortent à peine de l’adolescence et assurent leur première date française, comme on ferait nos premiers pas en classe de 6ème avec notre nouveau jean Lewis et notre nouveau cahier de texte. Mais avec simplement un EP cinq titres, Treasure, sorti en mai dernier, Tallulah Sim-Savage (chant et guitare), Lola Sam (basse) et Alfie Sayers (batterie et tête de bébé) ont-ils déjà les épaules pour être délégués de classe ?

Oui, assurément, la jeunesse se rebiffe et nous joue un son, certes familier, mais qui possède déjà une belle singularité. Explosif ! Comme ce premier concert qui met déjà le feu au festival et révèle ce groupe en route pour une tournée mondiale en première partie des Strokes, Yeah Yeah Yeahs ou Royal Blood. Alors, les Hotwax, premiers de la classe ou ados HPI (Haut Potentiel Insolent) ? Un mélange des deux qui nous parle d’amour, de contraception, du réchauffement climatique, de l’adolescence, de féminité, en hurlant l’urgence ressentie. Digne héritière de l’association Rock Tympan (1991), la Route du rock a décidé, dès cette première soirée, de malmener nos oreilles sur un rythme post-punk nerveux généralement identifié US ou british.


C’est pourtant avec un label « Produit en France » que la soirée prend son envol en accueillant le groupe parisien The Psychotic Monks. Ceux qui auraient pu s’appeler par obligation de quota « Les Moines Psychotiques » vont sérieusement faire monter la température de la Nouvelle Vague et contribuer Allègre(ment) au réchauffement des océans. « Climato sceptiques », s’abstenir ! À l’écoute de leur troisième album, Pink Colour Surgery, produit par Daniel Fox de Gilla Band (eux-mêmes programmés ce vendredi au festival), on se doutait qu’on n’allait pas assister au concert des choristes en mode chanson. Confirmation est faite dès l’entame du concert. Il suffit de regarder comment les quatre membres du groupe, Paul, Artie, Martin et Clément, sont installés sur scène, sur une même ligne de front prêts à délivrer une épique bataille, pour s’en rendre compte. Ce n’est pas un groupe avec un leader, c’est un ensemble vivant où chacun chante à tour de rôle, apportant sa touche personnelle derrière son instrument. Crête et chemise col fermé pour Paul, le benjamin du groupe multi-instrumentiste, cheveux peroxydés pour Martin au déhanché façon « Iguane » le tee-shirt en plus, bas résilles pour Artie, campée dans sa robe noire vinyle, pantalon kaki et chemise manches longues pour Clément aux cheveux tirés en arrière. Qu’importe la soutane, ils finiront tous trempés de sueur, perlant de bonheur.
C’est effectivement un chaos sonore qui nous submerge (un comble pour une salle qui s’appelle la Nouvelle Vague), indomptable et expérimentale pour nous plus que pour eux. Rodéo à Saint-Malo ! Nous sommes secoués comme sur un cheval qui cabre, entre des rythmes machines-batterie et des échappées galopantes de guitares. Un son électro nous repose, puis les guitares nous malmènent à nouveau. Un rouleau permanent, en vérité une vague de plaisir entretenue par le charisme des membres du groupe, leurs regards bienveillants et leurs plaisirs d’être sur scène. Mon attention sera captée du début à la fin et je reste impressionné par leur maturité et leur présence scénique pour un groupe constitué il y a moins de dix ans d'existence. Pour celles (majoritaires au premier rang) et ceux qui les ont attentivement écoutés ce soir, la progression du groupe est réelle. Le set, composé presque exclusivement des morceaux du dernier album, est la structure du concert sur laquelle les improvisations sont savamment dosées, étirées, enchaînées sans jamais tomber dans la démonstration. Les quatre Parisiens ont donné la leçon à nos trois britanniques. On peut même dire qu’ils les ont mouchés, façon 3èmes avec les 6èmes.


Il nous reste à apprécier la prestation des redoublants Warmduscher. Une classe « spéciale », constituée de membres virés des groupes de Fat White Family, Paranoid London, Insecure Men et Childhood, avec comme meneur le cowboy casquetté et masqué derrière ses lunettes noires, Clams Baker Jr. La formation prend le parti, sur son dernier album At The Hotspot (2022), d'un retour aux sources plus funky et rend hommage au meilleur de la disco funk des années 70, saupoudré de beats électro empruntés au Hot Chip aux commandes de la production.
L’accueil du public est à la hauteur du look vestimentaire des membres du groupe, sapés d’une combinaison façon garagiste bossant sur la côte W (ouest) : uniforme ! Oui, le public qui va les suivre jusque minuit apprécie déjà ces gaillards. Il sait que la setlist sera riche en titres souvent courts, lâchés comme des mini bombes à danser et à pogoter. Pas de répit pour ces puristes en quête de ce cocktail « punky, groovy, électro-disco ». Les titres du dernier album, Tainted Lunch et Midnight Dipper, sont joués dès les premières minutes du set et donnent le tempo rapide aux mouvement des têtes, façon poupée qui dit « non » alors qu’elle sourit « oui ». Une courte pause pour le cou, qui passera le relais aux pieds sur le titre plus funky Wild Flowers. Pause vite oubliée sur le nouveau morceau Love Strong, produit par l’inévitable Dan Carey (Kae Tempest, Fontaines D.C., black midi). Clams Baker Jr fait tournoyer son microphone, joue avec la fermeture de sa combinaison et ne cesse de prendre à partie ce public qu'il excite de plus en plus. Le stoïcisme du claviériste et du bassiste contrastant avec cette exubérance. La fin de set pousse un public parsemé à la débauche sur Disco Peanuts ou aux slams sur Double vision. Finalement c’est le groove qui l’emporte avec Standing On The Corner. Et voilà nos « redoublants » qui mettent le feu à la salle, sirène hurlante sur le fantastique morceau I Got Friends et puis s’en vont.

La cloche de fin de cours a sonné. Il est minuit en ce jour de prérentrée. Les élèves de 6ème et de 3ème se sont bien entendus, les « redoublants » devraient pour une fois obtenir les félicitations de leur professeur et chacun rentre sereinement à pied ou en bus at home, content d’avoir goûté à ce parfum de la Route du Rock.
setlist
    HOTWAX
    Barbie (Not Yours)
    Phone Machine
    When We're Dead
    All I Want
    She Don't Like It
    Drop
    Stay Cool
    A Thousand Times
    High Tea
    Rip It Out

    WARMDUSCHER
    Tainted Lunch
    The Salamander
    Midnight Dipper
    Hot Shot
    Wild Flowers
    Love Strong
    Fatso
    Fashion Week
    Twitchin'
    1000 Whispers
    Eight Minute Machines
    Disco Peanuts
    Double Vision
    Burner
    Standing On The Corner
    I Got Friends
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