Etrange manière d'aborder un concert que de parler d'un autre, mais la prestation de Cucamaras à la péniche Antipode la veille méritait qu'on en dise un mot. Un groupe de post-punk jeune et fougueux, simple et efficace, avec peu de chansons mais une énergie et une communication plus aboutie et maîtrisée à chacun de ses passages à Paris. Un Supersonic en janvier 2023, Césure en juillet 2023, et maintenant l'Antipode, après un report de l'International puis de l'Olympic Café. Cucamaras aiment Paris, et nous aussi on les aime bien, en attendant qu'ils reviennent encore une fois, de préférence avec un album ou un nouvel EP à défendre !
Mais est-ce une vraie coïncidence que l'on parle de Cucamaras avant de parler de The Clockworks ? Une question qui ne sera pas si vite répondue, car avant la conclusion vient l'occasion de vous parler d'un concert au Supersonic aux airs de présentation d'album, le premier des horloges pas suisses mais irlandaises,
Exit Strategy, paru en fin d'année dernière. Un album qui, se voulant plus raffiné et profond que la pop-rock bas du front des premiers singles du groupe, s'était un peu anesthésié en chemin, aseptisant la production, tuant dans l'œuf l'aspect fun et libérateur que l'on espère d'une telle musique. Un album qui sera ce soir déroulé dans son intégralité et dans le bon ordre avec, fait rarissime au Supersonic, l'aide d'un ingénieur du son et d'un technicien dédiés au groupe. Une professionnalisation criante dont on ne sait dire si elle ne saute pas les étapes trop vite : un rack de pédales compliqué et onéreux juste pour de la pop-rock, le setup de The Clockworks impressionne, mais l'on a vu suffisamment de concerts pour savoir que ce n'est pas la taille du setup qui compte.
Deaths And Entrances démarre doucement au piano pendant que les personnes parlent dans le fond de la salle,
Bills And Pills tente de bouger la foule en tant que premier single de l'histoire du groupe, une foule qui donnera de la voix pour soutenir un chant en retrait qu'on peine souvent à entendre. C'est bien la peine d'avoir amené un ingénieur du son personnel... Un chanteur, James McGregor, encore secondé par son public sur les refrains tout en efficacité de
Mayday Mayday, meilleure surprise du dernier album, avant que le rythme ne retombe avec le trio
Hall Of Fame, Car Song et
Danny's Working Like A Dog, enchaînant les chansons au début mollasson sauvées par une fin mettant enfin de l'énergie dans son vin. Comme deux ans auparavant au POPUP!, le groupe est encore trop timide, trop réservé et absorbé par son propre show pour se livrer complètement : James n'ose se lâcher que sur les ultimes refrains pour finir sur un « ça va ? » pas très loquace, et le constat durera jusqu'à la fin de l'album et
Westway, petite ballade aux airs de Strokes qui nous laisse là sans trop savoir quoi conclure.
Heureusement pour nous et pour eux, le groupe continue de jouer alors que James commence à observer le premier rang, s'offre un petit bain de foule et de touché de poings jusqu'au fond du Supersonic, et revient nous envoyer l'un des, si ce n'est le meilleur single du groupe :
Blood On The Mind. Une merveille de construction enchaînée dans
Endgame et la folle intensité de
The Future Is Not What It Was, et qui l'eut crû, lâcher les chevaux donnera raison au groupe. La foule se tait enfin et danse, se rentre dedans, les têtes s'agitent pour autre chose que de la politesse et perlent de sueur, et ma photographe préférée se réfugie derrière une barrière dans l'espoir que les trublions transpirants lui foutent un peu la paix. Oui, mais... Oui mais c'est déjà fini, et malgré l'apothéose
Enough Is Never Enough, on reste sur notre faim d'avoir assisté à une prestation qui se regardait les pompes pendant sa première heure.
Jouer un album dans l'ordre et dans son intégralité est toujours un exercice risqué, car un album n'est pas un live et ne se pilote pas de la même manière, quelque chose que The Clockworks n'ont sans doute pas encore compris, et qu'ils se devront d'appréhender pour devenir un véritable groupe de live. On aurait ainsi préféré un show plus court, centré sur l'énergie et le partage... comme celui de Cucamaras la veille qui, même s'ils n'ont ni le rayonnement ni la structure dont disposent déjà The Clockworks, ont eux déjà bien intégré ce qu'implique le fait de monter sur une scène pour y jouer du rock n'roll.