En découvrant la scène, les synthés sont posés sur des tables couvertes de nappes en taffetas rose, et des petites peluches y sont accrochées en guirlande. Pour compléter ce tableau kawaii, un ordinateur portable orné d'une guirlande dorée diffuse des animations 3D qui feraient passer l'univers Nintendo pour celui d'une compagnie d'assurance austère. Je ne saurais dire si l'énorme plante verte en fond de scène est venue avec le groupe ou si elle fait partie du décor naturel du Hasard Ludique qui est bien calculé pour accueillir le public dans un décor récréatif et chaleureux.
Ayant fait mes devoirs j'avais écouté la pop gonflée à l'Auto-Tune du duo français
Toboggan et j'étais prêt à prendre un shoot de mignonnerie sirupeuse. Le set commence par des nappes de synthés anodines, puis démarre des boucles électroniques dansantes, la chanteuse et le chanteur empoignent chacun un microphone et... je me prends une vague d'Auto-Tune sucrée en pleine face. Tout comme Walt Disco, le groupe se réapproprie les années 80, côté variété française pour Toboggan en mode extrême et régressif.
Ils y mettent du cœur et de la bonne humeur, c'est plus généreux que Charli XCX et beaucoup trop bisounours pour qu'ils appellent leur album
Brat. Attention, si vous êtes venus habillé tout en noir et que vous êtes fan de DEADLETTER, ça peut faire saigner vos oreilles, mais le duo a l'air trop gentil pour que ce soit leur intention. Ce sont Walt Disco que le public est venu voir ce soir, alors leur hyper pop glisse comme sur un toboggan.
Justement, il y a neuf mois je découvrais Walt Disco en
première partie d'OMD, et depuis les écossais ont accouché d'un
second album. Après les avoir vus mettre le feu à la Cigale alors qu'ils n'étaient qu'en première partie, j'ai hâte de les voir en haut de l'affiche. Pas de décor ou de vidéo, seule la plante verte est restée sur scène, c'est peut-être sa place naturelle. Le groupe assure seul le show. James Potter, le chanteur, pas le père d'Harry, porte des santiags, un short de foot, une veste en jean sans manche et un maquillage parfait. Le reste du groupe est tout de noir vêtu, chacun avec un look propre qui doit bien rendre en shooting mode.
Dès les premiers titres, le groupe est à fond dans le set, porté par James Potter et sa voix en falsetto qui donne un air de cabaret burlesque à leur musique inspirée de la vague néo romantique des années 80 (Duran Duran, Spandau Ballet...). Les chansons sont flamboyantes et oscillent entre l'envie de faire la fête et de crier. Sur
How Cool Are You? le public est chaud bouillant. Il n'en fallait pas plus pour booster un peu plus le groupe. Sur
Cut Your Hair, James Potter est comme un meneur de revue ou un lion qui tourne dans sa cage, un peu à l'étroit sur la scène. Il est parfaitement soutenu par les quatre musiciens : basse, batterie, guitare et synthé. C'est sans doute à ça que devaient ressembler les premiers concerts de Duran Duran au club Barbarella de Birmingham.
Pearl est une chanson d'amour dédiée à Paris dont il garde un souvenir ému de leur précédent passage à la Cigale. A voir l'âge du public, nous sommes quelques-uns à les avoir découverts là-bas, et le bon souvenir est bien partagé. Sur
Come Undone (ndlr : rien à voir avec le titre de Duran Duran), le chanteur prend des airs de mauvais garçon sur l'intro, alors que David Morgan laisse ses claviers pour une seconde guitare pour une version très électrique de la chanson. Le rendu est impressionnant et fait penser à Talk Talk, ces jeunes ont décidément l'art de remettre une face moins exploitée des années 80s au goût du jour. L'ambiance atteint un nouveau sommet : c'est une musique taillée pour danser, comme un véritable exutoire.
C'est le moment du set que le groupe choisit pour présenter une toute nouvelle chanson,
Don't Do This Alone avec un rythme qui claque, de superbes parties de clavier, et qui prend des airs de tube. Après
The Captain dont le public clappe le tempo, il est temps de ralentir un peu avec
Jocelyn , mais je sens que James Potter meurt d'envie de se faire remarquer, il faut toute la concentration du groupe pour le canaliser et, à mesure que la chanson se déroule, l'intensité monte d'autant. Il peut à nouveau tout lâcher sur
Black Chocolate et danser comme un pantin désarticulé alors que le synthé fait des bruits étranges. Les versions live rendent très bien avec leur ambiance disco mais un son plus brut. C'est ainsi que
I Will Travel se termine sur une mélodie torturée et sublime.
Alors que le frontman se bat contre une guitare acoustique qui s'obstine à rester muette pour
Before The Walls, Jack Martin, le batteur, en profite pour saluer Toboggan et Finlay McCarthy part dans une impro de guitare. Quand le morceau peut enfin démarrer, il ne faut pas se fier à la guitare acoustique, c'est le morceau le plus obscur et bruitiste du set, tout en étant beau. Après un
Macilent bondissant, toute la salle sautille en rythme sur
Weightless. Le groupe promet de revenir très vite, c'est ce qu'ils font après un rappel typique des parisiens pour
My Pop Sensibilities qui n'était pas sur la setlist.
Quand je sors de la salle, le groupe, visiblement pressé de discuter avec son public, est déjà au stand de merchandising, ça c'est du dévouement !