Ce soir The Murder Capital concluent au Trianon à Paris la tournée européenne de leur nouvel album,
Blindness, et ils ont bien l'intention de nous en mettre plein la vue.

Hex Girlfriend ne sont pas moins motivés. Le duo arrive en blouses blanches de docteurs, une voix off tente de nous rassurer en expliquant doucement que nous sommes sur le point de vivre une expérience psychique qui me fait beaucoup penser à Total Recall. Ne vous inquiétez pas tout ira bien, mais il se peut que ça pique un peu derrière les yeux. Avec un bassiste, un batteur/chanteur et quelques machines dont une boîte à rythmes, le duo envoie du gros son. Malheureusement un peu trop gros pour la sono qui a du mal à faire passer la voix et les textures sonores au-delà de la distorsion. Ce n'est pas grave, le groupe se donne à fond et le public réagit plutôt bien.
Très vite Noah Yorke lâche ses fûts pour bondir sur les retours et haranguer la foule. Il a un sacré flow et tourne sur scène comme un fauve en cage. Oui, Yorke comme Andy Yorke, chanteur de Unbelievable Truth qui est son oncle... OK, c'est aussi le fils de Thom, chanteur de The Smile et Radiohead. Mais il n'a rien d'un fils à papa, et on sent qu'il donne plus que le minimum syndical pour se faire un prénom. Avec cette obsession des rythmes sophistiqués, et les fins de phrases dans les aigus qui se perdent dans les effets, on ne peut tout de même pas m'empêcher d'imaginer les trajets en voiture sur la route des vacances quand toute la famille se met à chanter. On retient l'énergie de ces Hex Girlfriend> et l'univers post-apocalyptique qu'ils ont créé, quelque part entre des Happy Mondays, beaucoup plus Mondays que Happy, et des Primal Scream qui remplaceraient leurs guitares par des percussions. Comme ce soir c'est la dernière, Diarmuid (batteur) et Cathal (guitariste) de The Murder Capital montrent également leur appréciation et les rejoignent sur scène.

Pour finir de chauffer le public, la playlist pendant l'intermède mélange rock électrique et ballades émouvantes, de Viagra Boys à Maria Somerville. The Murder Capital ouvrent ensuite leur concert par The Fall, un morceau ultra puissant qui met tout de suite le public en mouvement. Le sol de la fosse rebondit dès les premières phrases du couplet, le son des guitares arrache, elles sont encore plus électriques que sur l'album. Sans transition, le groupe passe de de son troisième à son premier album avec More Is Less, James McGovern excite le public alors que les musiciens restent concentrés sur leur jeu, alignés comme des mercenaires prêts à en découdre. Toutes les mains sont en l'air et le groupe a troqué les costumes post-punk pour des looks plus urbains : James McGovern, avec ses lunettes noires, sa veste de survêtement et son kilt long, est le maître du jeu.
Retour au dernier album avec Death Of A Giant que j'adore avec sa puissance contenue, mais que je n'attendais pas si tôt dans le set. Cette version est plus rapide, la tension plus forte, comme si dans le cycle du deuil on était passé de la tristesse à la colère. Cette chanson prend tout son sens en live, on sent la présence de Sinéad O'Connor et de ses engagements politiques. Le charisme du groupe est monté d'un cran depuis leur dernier passage, et s'ils terminent juste leur tournée européenne, ce n'est pas un groupe fatigué qui se donne sur scène, mais un groupe de performers qui canalisent leur énergie. Même sur Heart In The Hole, un titre moins connu sorti entre deux albums, la réponse du public est phénoménale. « Don't you wanna know how far you can take it? » énonce la chanson, très loin semble dire le public. Une Guinness (bien sûr) à la main, James McGovern peut déguster.
Les nouveaux titres passent très bien, le nouvel album qu'ils voulaient plus direct et taillé pour la scène mise juste. Comme pour le vérifier, Moonshot est bouillant. Le chanteur fait le signe pour lancer un mosh pit, mais le public ne parlant pas très bien anglais, même des gestes, il n'obtient qu'un énorme pogo, et c'est déjà très bien.

Après dix titres survoltés, nous entrons dans la phase calme du concert. La basse est magnifiquement profonde sur l'intro de Slow Dance I alors que les guitares se font plus stridentes. Swallow est également lente et belle, mais pas moins intense. A la fin du morceau, James Mc Govern se tient debout à l'avant de la scène, baigné de lumière on peut voir son visage ému. Il parle de Berlin et Cologne, où leurs concerts ont été annulé car on leur refusé un drapeau palestinien posé sur leurs amplis. « It's fucked up but nothing compared to what is happening to the people of Palestine. Until Palestine is free that flag stays on the stage ». Et de conclure le speech par « Free Free », que le public complète par « Palestine ». Belle entrée en matière pour Love Of Country, une chanson sur la face obscure du patriotisme et du nationalisme. Le chanteur ajoute « Give the kids in Gaza a fucking chance » dans la chanson qui prend une autre dimension et dont les paroles valent qu'on leur prête plus d'attention.
Le feu reprend sur Feeling Fades. James McGovern fait monter une jeune fille sur scène, elle se jette dans le public pour un slam au-dessus de la moitié de la fosse, pendant que l'autre moitié s'est transformée en un mosh pit tourbillonnant. Can't Pretend To Know et Don't Cling To Life concluent le set en apothéose. Les musiciens sont sur les genoux, le public aussi, mais c'est pour mieux réclamer un rappel.
Celui-ci commence par For Everything, le premier titre de leur premier album, très brut et fort. La construction toute en progression de Ethel est parfaite pour reprendre ses esprits avant d'enchaîner plein d'énergie Words Lost Meaning et de conclure ainsi le set. Personne n'a envie que ce concert ne se termine et pourtant il le faut bien. Un dernier « Free Free Palestine » et les lumières se rallument.
Cathal Roper nous avait dit en interview que ce concert serait particulier et il a tenu ses promesses. Comme leurs collègues de Fontaines D.C., The Murder Capital sont devenus des bêtes de scène, et je leur souhaite aussi de remplir des Zénith, même si j'aime beaucoup le Trianon.