The Horrors

The Horrors font partie de ce genre de groupes qui n'en font qu'à leur tête. Le style de formation à sortir un album presque culte comme l'intense Primary Colors, puis tout remettre à plat, sortir des claviers à outrance au point d'en dégoûter les fans de la première heure.

Voilà un peu ce qui s'est passé lors de la sortie de Skying en 2011, et ça ne pose pas vraiment problème au quintet de Southend. Cet album mal-aimé servait même de socle pour mener le groupe vers de nouvelles perspectives artistiques, et il donnait sa couleur à Luminous (2014) et V (2017). Sans rassasier totalement les premiers fans, ces deux derniers albums démontraient l'imposante palette créative d'un groupe qu'on croyait assagi pour toujours.
Tout ça, c'était avant cette année et la sortie surprise de Lout, EP de trois titres débarqués dont ne sait trop où et comment, tant ils surprendront une nouvelle fois les admirateurs de la bande de Faris Badwan. Trois titres qui semblent effacer d'un revers de main tout ce qui a été fait depuis plus de dix ans, trois titres où les claviers éthérés et vaporeux ont été remisés au profit de sons abrupts et râpeux.

Dès l'entrée en matière du titre éponyme Lout, c'est une batterie lourde accompagnée d'un riff rageur qui renverse tout sur son passage avec ces sonorités tendance rock indus des années 90. Org est un instrumental totalement débridé et barré qui lorgne vers un electro rock noisy bruitiste. Plutôt intéressant, mais surtout plus amusant que sérieux, le morceau laisse bouche-bée, et nous rappelle aussi que n'est pas Aphex Twin qui veut.
Le petit tour de piste se conclue avec Whiplash. Ce titre est une sorte d'amalgame des deux morceaux précédents et sonne volontairement brouillon et bouillant. Les guitares sont saturées et passées par une multitude de filtres pour leur donner ce son très sale typé indus. Derrière, des claviers balancent des sons que n'auraient pas reniés My Life With The Thrill Kill Kult pour un morceau de la BO de The Crow.

Passé la surprise, on se demande bien à quoi joue le groupe. Est-ce une simple farce, ou un réel désir de prendre une nouvelle direction ? Dans l'absolu, si le choix nous était donné, on préférerait penser que ce Lout EP est une petite parenthèse d'amusement, et qu'on reviendra vite à quelque chose de plus consciencieux.
Car, au final, tout cela semble bien peu novateur, et on pourrait citer à foison les formations qui excellaient dans le genre il y a vingt ans. Mais après tout, qui a réellement cru que The Horrors allaient s'enfermer longtemps dans un style musical ? Dix ans, entre Skying et V, c'est déjà une éternité pour ces gars-là. L'avantage de ce Lout EP, c'est qu'on brûle d'impatience de savoir à quoi ressembleront les prochaines compositions. Que cela vous rassure ou pas, avec The Horrors, on ne peut jamais vraiment savoir.