And So I Watch You From Afar

Un an après la sortie de leur premier album éponyme plutôt bien salué par la critique et que l'on qualifiera, faute de mieux, de rock instrumental, And So I Watch You From Afar reviennent nous donner notre dose de vitamines avec un nouvel EP intitulé The Letters. Des lettres réparties sur quatre morceaux à l'énergie toujours aussi débridée.

Autant dire que sur leur quatre nouveaux titres, les irlandais sont loin d'avoir mis de l'eau dans leur vin et encore moins d'avoir mis leur électricité au tiroir. Au contraire, The Letters révèle peut-être encore plus le côté barré et fougueux du groupe, tant son songwritting est corrosif.
Ce constat est évident dés le premier morceau proposé : S Is For Salamander s'ouvre sur une guitare aiguë assez crunchy avant de prendre de l'épaisseur dés l'arrivée de la basse et de la batterie. Parties rythmiques cadencées par des roulements de batterie frontaux s'ensuivent, puis la basse et la guitare viennent s'accorder pour fournir une mélodie rock rapide, à l'accroche redoutable. Un titre en zigzag donc, naviguant entre moments intenses typés post-métal ou math rock, et breaks efficaces qui laissent quelques respirations bienvenues. Mais quand le calme semble pointer le bout de son nez, la tempête reprend ses droits sur la fin du titre et vient former véritable un cafarnaüm sonore où se mêlent riffs électriques, solos de guitares, basses épaisses et batteries tapageuses.

D Is For Django The Bastard, le deuxième morceau, est court mais totalement abrasif. Il alterne avec une fluidité déconcertante entre parties punk marquées par des coups de caisse claires décapants, passages post-métal ou variations afro-jazz. Pas de doute, la dextérité de And So I Watch You From Afar est sidérante, tout comme son travail de structuration.
B Is For B-Side, le titre suivant, s'ouvre sur une guitare au son clair avant que l'attirail basse-batterie ne vienne, là aussi, lui insuffler une puissance démoniaque. La première guitare lead répond aux notes aigües d'une autre, puis toutes deux viennent s'entremêler et courber leur son respectif pour donner un effet répétitif presque électronique.
Quant à K Is For Killing Spree (Ode To), la dernière composition, elle est sans doute clle qui sonne le plus prog-rock sur cet EP. Des notes de guitares piquées ouvrent les hostilités et laissent entrer progressivement le volume de la batterie. Les notes sont jouées à vitesse grand V et semblent parfois glisser toutes seules sur le manche de la guitare. Tout est ensuite rejoint par la basse, prépondérante au milieu de la chanson, qui fait repartir le morceau vers un post-hardcore épique venant finir son début de course sur une guitare noisy, avant de repartir de plus belle vers des sommets de puissance électrique.

Plus lourd et métal que ses copains irlandais d'Adebisi Shank, moins robotique que Battles, And So I Watch You From Afar met son savoir-faire et sa technique instrumentale au service d'une énergie implacable et d'une composition cisaillée, terriblement efficace et rentre-dedans. Même si, il faut le reconnaître, passées quelques écoutes, on n'hésite pas (plus?) à mettre « stop » sur sa platine...