Daughter

Ils avaient disparu depuis cette session live pour 4AD parue en avril 2014, qui nous avait un peu laissés sur notre faim. En effet, malgré le côté louable de vouloir afficher l'évolution sonore du trio en live, ces cinq titres n'apportaient pas d'impact majeur dans la discographie du groupe, tant celui-ci s'avérait conforme à ce à quoi le groupe nous avait habitués depuis déjà un moment. Le maxi sorti avec Warpaint début 2015 était quant à lui plutôt anecdotique. Aussi, lorsque la possibilité de découvrir enfin le second opus de Daughter s'est offerte à nous, c'est un mélange d'excitation mais aussi un peu de méfiance qui s'emparait de nous. Mais cette dernière s'avéra bien infondée et disparue aussi vite qu'elle est apparue.

En effet, dès l'entame de New Ways, plage d'ouverture de Not To Disappear, tous les doutes se sont levés. Le claquement de la batterie électronique résonne à merveille derrière la voix d'Elena Tonra, et se glisse dans la progression sonore de la chanson. Le son s'est sérieusement étoffé depuis If You Leave, la production de ce nouveau disque est beaucoup plus riche et le groupe nous régale de mouvements sonores particulièrement puissants.

Plus live que sur leurs précédents essais, comme sortie d'une maison hantée, la musique de Daughter prend donc une nouvelle dimension. Numbers confirme ce sentiment généré par un début d'album résolument addictif. La voix d'Elena se veut toujours aussi ensorcelante, cependant la place aux instruments a sérieusement était faite dans ce nouveau disque. Plus électronique, mais surtout davantage noisy qu'auparavant, Mothers en est un parfait exemple. Mélancolique à souhait, dans une thématique chère au groupe, le trio s'affirme ici vraiment musicalement en refusant que tout repose uniquement sur le timbre d'Elena. Le nappage électro-noisy dans la dernière partie de la chanson démontre d'ailleurs combien le groupe a pris la mesure de cette évolution.

Not To Disappear se montre cohérent du début à la fin. L'album gagne en luminosité par rapport à If You Leave, mais conserve un je ne sais quoi de flou qui empêche le trio de sortir de ce couloir dans lequel il s'est volontairement infiltré depuis 2010. Parfaitement adapté au label 4AD, le son de Daughter se rapproche de temps à autre des grandes heures du shoegazing, et cela sur bon nombre de compositions (New Ways, Numbers, How...). Il lorgne aussi un tant soit peu vers Bullet Proof... Il Wish I Was de Radiohead, le temps d'un somptueux To Belong. Mais c'est probablement avec Fossa, moderne et pop, que le trio basé à Londres donne une véritable leçon de musique longue de près de sept minutes. C'est l'apaisé Made Of Stone qui vient conclure ce disque riche et intense.

Si le son de Daughter s'est profondément enrichi, on ne peut pas toutefois parler de révolution dans la musique du trio pour ce second album. Les afficionados de If You Leave se retrouveront sans doute aucun dans ce Not To Disappear. Le groupe a cependant franchi un cap en transformant avec brio ce nouvel essai avec ce disque dense et habité. Elena chante toujours aussi merveilleusement bien et les compositions ont gagné en profondeur. La marge de progression de ce groupe reste évidente. Espérons que d'ici leur troisième album, Daughter atteignent déjà d'autres sommets qui leur semblent vraiment promis.