Chronique Album
Date de sortie : 19.09.2025
Label : Atlantic Records
Rédigé par
Franck Narquin, le 15 septembre 2025
En 1994, Noel Gallagher déclarait au sujet d'Oasis : « Au foot, nous serions l'équipe d'Italie : une formation honorable, mais capable de vrais coup de génie. Avec juste ce qu'il faut de violence, si nécessaire ». On serait tenté d'appliquer cette maxime à NewDad, ces petits cracks irlandais qu'on marque à la culotte depuis leurs débuts en centre de formation (comprendre leur concert de 2021 au Supersonic). Sur leurs premiers EP encore mal dégrossis, ils arrivaient déjà à signer des pépites de niveau Champions League telles que I Don't Recognize You et avaient musclé leur jeu avec Madra, premier album alternant percés magnifiques (l'hymne Angel, le percutant Slicky Sweet) et tout venant (une bonne moitié des titres). En mai dernier, ils nous offraient une mise en bouche mi-figue mi-raisin avec l'EP Safe, avant de sérieusement attiser nos papilles en dégainant l'imparable single Roobosh. Leur deuxième album Altar, va-t-il s'imposer comme le disque de la consécration, celui sur lequel NewDad réalisent enfin leur énorme potentiel ?
Other Side ouvre l'écoute avec une première partie toute en douceur, ballade aérienne portée par la voix éthérée de Julie Dawson, avant que les guitares ne sonnent la charge et que la batterie ne se mette à marteler. Cette chanson donne la ligne directrice d'Altar, marier mélodies dream pop et rage grungy, sans jamais avoir à choisir. Un peu comme sur le nouvel album de Wet Leg, la production est plus léchée, les titres plus directs et le son plus franc. On craint alors que NewDad ne sacrifient leur charme sur l'autel de l'efficacité, préférant plaire plutôt que surprendre.
Mais au fil des écoutes, cette clarté nouvelle révèle aussi une ambition, Heavyweight, Entertainer ou Misery, singles nerveux et accrocheurs, atteignent largement leur cible, tandis que des titres plus introspectifs tels que Pretty, déclaration d'amour à Galway, ou le délicat Mr Cold Embrace, parviennent à toucher juste sans en faire trop. L'album reste traversé de quelques baisses de régime, la mièvrerie d'un Sinking Kind Of Feeling, la power pop calibrée de Vertigo ou les plus fades Everything I Wanted et Something's Broken, mais l'ensemble tient mieux la route qu'il n'y paraît à première écoute.
Au beau milieu de cette livraison plus qu'honorable, NewDad sortent leur coup de génie avec Roobosh, l'un des morceaux les plus excitants de l'année. Mot inventé par Julie Dawson pour traduire une explosion de colère et de bruit, brutal et absurde à la fois, Roobosh incarne NewDad à leur meilleur, montée en tension galvanisante et grâce juvénile... avec juste ce qu'il faut de violence. Plutôt que d'écraser le reste de l'album, ce titre agit comme un phare, éclaire et magnifie ce qui l'entoure.
En réussissant à faire le pont entre la noirceur mélodique de The Cure et la fraîcheur pop de beabadoobee, tout en évitant de succomber à la malédiction du second album, Altar confirme que NewDad ont franchi un palier. Ce n'est pas encore le disque définitif, mais c'est un album solide, cohérent, qui séduira un nouveau public sans décevoir leurs premiers fans. C'est déjà beaucoup, mais on ne peut s'empêcher de penser que NewDad sont encore appelés à gravir quelques marches avant de s'imposer, un jour, sur l'autel de la pop irlandaise.