Death In Vegas

Formé en 1994, Death In Vegas est un des premiers duo noise rock apprivoisant les techniques numériques à voir le jour en pleine apogée des raves et de la musique techno. Initialement présentés comme Dead Elvis, Richard Fearless et Steve Helier se trouvent dans l'obligation de renommer leur groupe, les héritiers du King goûtant moyennement le choix de patronyme morbide de ce duo Anglais, et choisissent alors d'adopter le nom de Death In Vegas. Après leur premier album, en forme de pied de nez aux héritiers Presley, Steve Helier quitte le groupe et est remplacé par Tim Holmes.

Il faudra attendre l'album The Contino Sessions pour entendre la parfaite fusion entre rock et électronique, dans un tempo et des mélodies sombres et souvent noisy. Dot Alison, Iggy Pop ou encore Paul Weller sont invités dans ce disque qui consacre soudainement Death In Vegas avec des titres comme Aisha ou Dirge qui les propulsent au rang de groupe mythique des années 2000 au même titre que leur respectés collègues de Primal Scream ou The Jesus And Mary Chain avant eux. Suivront deux autres albums encore plus ténébreux, en 2002 et 2004, aux artworks toujours très léchés et créés par Richard Fearless lui même, dont le très sulfureux titre, Hands Around My Throat est extrait. A l'époque, les étranglements volontaires, provoqués pour atteindre l'orgasme étaient des petits jeux courant qui finissaient parfois très mal. Le décor est planté.

Il aura donc fallu sept ans et l'éloignement de Richard Fearless à New-York pour que le projet Death In Vegas reprenne sa route, toujours à contre sens du circulum rockum. Jouant un electro-rock d'avant-garde au 20ème siècle, Richard Fearless se relance aujourd'hui en solo sur les chemins de Katmandou et des rave party en plein 21ème. Après de talentueux projets photographiques et la création d'un nouveau groupe, Black Acid, pendant son séjour dans la grosse pomme, Richard Fearless a senti le besoin d'un retour aux sources et en Arcadie.
Les fans de la première heure à la recherche des mélodies sombres et du tintamarre Krautrock des premiers albums peuvent passer leur chemin. Avec Trans-Love Energies, tout n'est que nappes vaporeuses, rythmes binaires et voix fantomatiques, échantillonnées de préférence. Toujours friand d'invités inattendus, Richard Fearless a eu la bonne idée de demander à la canado-lituanienne Katia Stelimanis, aka Austra, de participer à l'album sur un Your Loft, My Acid digne des meilleures soirées du Rex ou du Folie's Pigalle, avant que la nuit extatique Parisienne ne meure assassinée.
Surpris, on l'est du début à la fin par les tripatouillages numériques minimalistes de Richard. On est loin du rock, même krautrock, des premiers albums. Trans-Love Energies ose la ballade synthétique sans queue ni tête sur Scissors et le son prise-de-tête quasi ininterrompu sur Drone Reich. Savage Love et, surtout, Black Hole offrent, enfin, quelques minutes de nostalgie en plaquant à nouveau des guitares empruntés aux Jesus And Mary Chain et la voix sombre de Richard Fearless.

La pochette montre une cavalière, de dos, en tunique blanche à capuche, s'apprêtant à pénétrer une forêt mystique et inquiétante, tôt dans la brume matinale. En cela, cet artwork est bien senti car voilà exactement le sentiment laissé par ce disque; une direction mal assurée dans des contrées surfaites ou bien en avance sur leur époque – cela se vérifiera ou pas à la réécoute - et une atmosphère difficile à appréhender tant les zones d'ombre qui l'entourent sont encore nombreuses. Espérons que cet album, signé chez Portobello Records, n'est qu'une étape dans la reconstruction du Death In Vegas qui a marqué au fer toute une génération.