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Franz Ferdinand

Right Thoughts, Right Words, Right Action

Franz Ferdinand - Right Thoughts, Right Words, Right Action
Chronique Album
Date de sortie : 26.08.2013
Label : Domino Records
3
Rédigé par Maxime Canneva, le 26 août 2013
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La musique a un pouvoir de régression. Car il y a quelques jours, en écoutant pour la première fois Right Thoughts, Right Words, Right Action, quatrième album de l’une des formations écossaises les plus pertinentes de la décennie passée, je me suis senti comme un gamin de sept ans qui découvre par hasard, deux semaines avant Noël, la planque des cadeaux familiaux. Mais attention, un gamin qui n’a pas eu de Noël depuis quatre ans et qui attend fébrilement de pouvoir déballer ses paquets. Et qui n’aura d’ailleurs pas le courage d’attendre encore quinze jours.

Car en ayant fait lanterner leur auditoire pendant si longtemps, c’est bien cet effet qu’auront su produire Franz Ferdinand. En 2009 sortait en effet le controversé (bien qu’excellent) Tonight : Franz Ferdinand et depuis, silence radio. Ils expliquaient lors d’une récente interview être passés proche de la rupture, usés par des tournées communes, par une recherche trop poussée de l’innovation, mais The Indissoluble Matrimony (comme ils aimaient à se présenter sur leur site web) n’a pas flanché, a préféré se ressourcer et continuer à tourner tranquillement avant la sortie en fanfare de leur quatrième opus.

Et il a également été difficile de ne pas se laisser influencer par tout ce qui a été dit à propos de ce nouvel album : présenté comme un retour aux sources par les uns, vendus comme le disque de l’année par d’autres, une seule chose était certaine : après quatre ans d’attente et trois albums aussi réussis que diversifiés, après une promo d’enfer ne laissant filtrer que deux titres aux accents tubesques, on attendait de pied ferme le plat de résistance constitué de l’album en lui-même.

Mais rentrons dans le vif du sujet. Et commençons par pousser une gueulante : trente-cinq minutes. Un temps honorable pour se rendre au boulot par les transports parisiens, assurément. Mais un temps clairement trop court pour un album qui a mis quatre ans à arriver à maturation. Avec dix titres au compteur (le calcul est vite fait : une moyenne de trois minutes trente secondes par titre, temps ultra réglementaire et radiophoniquement formaté), on part donc avec un mauvais a priori sur l’album et on soupçonne que les Franz aient fait une Strokes.
En effet le schéma s’avère rigoureusement identique à celui suivi par les américains il y a deux ans lors de la sortie de Angles : une longue attente avant un grand retour annoncé, assorti d’un single carrément bandant, mais au final un album ultra court et qui ne tient pas ses promesses sur la durée.

Car le double single Right Action/Love Ilumination s’était effectivement révélé être une réussite totale, subtile combinaison de riffs efficaces digne de leur premier album, assortis d’instruments inattendus comme sur Tonight : Franz Ferdinand (n’entendons-nous pas des sons de trompettes sur Love Illumination ?) le tout dans une ambiance électrique à la You Could Have It So Much Better. Tout un programme.
Et sur ce nouvel album c’est l‘imparable Evil Eye qui s’intercale entre ces deux titres. L’introduction y est bestiale, où le cri de Paul Thomson à la batterie vient installer une atmosphère mystérieuse, voire inquiétante, mais parfaitement maitrisée, évoquant un New Kind Of Thrill (B-Side d’Ulysses), en moins fourni, plus calme dira-t-on. Le résultat est digne d’un Franz Ferdinand des grands jours : le titre reste en tête plusieurs heures durant et on ne serait pas surpris qu’il soit annoncé comme prochain single de l’album. Un remix en a d’ailleurs déjà été fait par Todd Terje, l’électronique norvégien ayant participé à l’écriture de l’album, avec qui, paraît-il, Franz Ferdinand envisagent une plus ample collaboration à l’avenir, baptisée The North Sea. Mais on n’en sait pas plus pour l’instant.

S’ensuit le sympathique Stand On The Horizon aux rythmes beaucoup plus estivaux, voire tropicaux, qui n’est pas sans rappeler un Send Him Away, le côté punch en plus. Un pont au milieu du titre nous amène à un Alex Kapranos susurrant de doux : « on the north sea, won’t you come to me baby ? ». Le charme opère, mais le titre n’est pas transcendant. Mais toujours moins fade que l’insipide Fresh Strawberries qui se voulait peut-être un clin d’œil au Strawberry Fields Forever des Fab Fours, mais qui n’en atteindra pas le niveau.
On note néanmoins sur ce titre comme sur le suivant, Bullet, l’abandon des synthés et effets divers, nous ramenant à l’époque du premier album aux riffs épurés, mais où on ne retrouve pas le génie d’antan. Le titre a pourtant tout pour plaire, la recette originelle est bien appliquée, mais il manque le « on ne sait quoi » qui faisait l’excellence de leurs titres passés.

Treason! Animals vient s’inspirer de Michael mais n’en a pas la fougue et laisse l’auditeur sur sa faim. Pas d’album de Franz Ferdinand non plus sans titre plus calme, où la jovialité laisse place à une certaine noirceur dans l’écriture, à la manière d’un Walk Away. C’est ici The Universe Expanded qui joue ce rôle, et qui, là encore, bien que sympathique à l’oreille, ne convainc pas comme ses prédécesseurs. Dans sa droite lignée arrive Brief Encounters, où les sonorités expérimentales font leur retour et où le constat est identique au titre précédent.
Arrive enfin l’heure du dernier titre, qui comme sur chaque album sonne comme un au revoir de circonstances au rythme plus doux, et qui ici s’avère plutôt réussi. On imagine en effet déjà des milliers de festivaliers, briquets en l’air sur le refrain lancinant de Goodbye Lovers & Friends, relevé par une discrète guitare. Agrémentés de conseils saugrenus au chant (« Don’t play pop music, no, you know I hate pop music […] Don’t wear bright colours, no, you know I hate bright colours ») et annonçant un sobre « but this really is the end » en fin de titre, on peut considérer que le final est réussi.

Pour résumer la situation, on ressort forcément un peu déçu de cet album, et cela même après un grand nombre d’écoutes. Les trois premiers titres sont assurément de très grands crus, et l’on est heureux de voir que Franz Ferdinand, sur le point de souffler leurs dix bougies, sont toujours capables de produire des hymnes imparables.
Mais le reste de l’album, sans être raté, laisse un sentiment d’insatisfaction, un arrière-goût de « ils savent faire beaucoup mieux que ça ». Reste donc à espérer que le successeur de ce quatrième album ne mettra pas lui aussi quatre ans à voir le jour et saura sonner aussi efficacement que ce à quoi les Franz Ferdinand nous ont toujours habitué.
tracklisting
    01. Right Action
  • 02. Evil Eye
  • 03. Love Illumination
  • 04. Stand On The Horizon
  • 05. Fresh Strawberries
  • 06. Bullet
  • 07. Treason! Animals
  • 08. The Universe Expanded
  • 09. Brief Encounters
  • 10. Goodbye Lovers & Friends
titres conseillés
    Love Illumination, Evil Eye, Right Action
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