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Morrissey

I Am Not A Dog On A Chain

Morrissey - I Am Not A Dog On A Chain
Chronique Album
Date de sortie : 20.03.2020
Label : BMG Rights Management
3
Rédigé par Emmanuel Stranadica, le 15 mars 2020
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A une semaine près, ce treizième album de Morrissey aurait pu figurer dans les bacs des disquaires et sur les plateformes digitales, le vendredi 13 mars. Peut-être est-ce par superstition ou simple hasard du calendrier, mais finalement I Am Not A Dog On A Chain ne sera disponible officiellement qu'une semaine plus tard. Mais là n'est, bien entendu, pas l'essentiel. Après deux essais en demi-teinte, le Mancunien revient déjà avec un nouveau disque, moins d'un an après California Son. Joe Chiccarelli est toujours aux manettes, on peut maintenant parler de tétralogie entre le producteur et le chanteur.

Il faut bien avouer qu'au moment où j'ai commencé à écouter ce disque, j'ai bien cru à un fake. Certes, le lien d'écoute reçu était officiel, mais l'introduction électro/punk de Jim Jim Falls a vraiment de quoi surprendre, voire de dérouter. Cependant lorsque la voix retentit, il n'y a plus aucun doute possible, il s'agit bien de I Am Not A Dog On A Chain.
Si on pouvait se douter, par le son des premiers extraits dévoilés, que ce ne serait pas un disque où les guitares auraient une place prédominante, on ne s'attendait toutefois pas à un tel basculement, qui de surcroit nous explose un peu à la figure sans crier gare. Alors bien entendu la voix du vieux crooner est une fois encore majestueuse, mais cela suffit-il pour nous faire oublier la musique qui l'accompagne ?

Parfois oui. C'est notamment le cas sur ce morceau d'ouverture qui évoque la dramatique thématique du suicide (« If you want to kill yourself, then for God's sake, just kill yourself ») conclut Morrissey). Parfois non, comme sur Love Is On Its Way Out, second simple dévoilé, dont le démarrage flirte dangereusement avec le R'n'b et dont le clavier kitsch dessert la chanson en la monopolisant. Des chœurs africains probablement liés à la dénonciation du massacre de lions et d'éléphants par de tristes riches lui donnent même un petit côté grotesque, et ce n'est pas le final davantage réussi qui permet à l'ensemble d'être suffisamment séduisant...

Joe Chiccarelli a probablement cherché à moderniser la musique du sweet and tender hooligan. Il l'a actualisée mais en conservant un je ne sais quoi de nostalgie, car sinon ce ne serait plus un album de Morrissey. Il a cependant eu un peu trop tendance à négliger les guitares. Bien évidemment, on n'attend plus depuis belle lurette celles d'Alain White (et encore moins celle de Johnny Marr), mais le fait que Boz Boorer, fidèle guitariste depuis 1991, ne soit à l'origine d'aucune composition de I Am Not A Dog On A Chain est peut-être aussi le signe d'une fin en soi.
Certes les guitares n'ont pas encore disparu du monde de Morrissey, mais à l'exception du plaisant, quoique assez FM, What Kind Of People Live In These Houses, de quelques riffs stridents de Jesse Tobias, sans parler de l'énigmatique The Secret Of Music, les apparitions de l'instrument se font rares et figurent bien souvent en retrait ou n'apparaissent en définitive qu'en seconde partie des chansons.

Sans être une catastrophe en soi, l'album trouve son salut grâce à quelques moments intelligents. Qui aurait cru qu'un jour Morrissey puiserait son inspiration chez Depeche Mode ? Once I Saw The River Clean lorgne terriblement vers le Soothe My Soul du groupe de Basildon. Même interrogation à propos de la Motown, lorsqu'il invite Thelma Houston sur le premier extrait du disque, Bobby, Don't You Think They Know. Le soixantenaire n'est d'ailleurs plus à une contradiction près. Comme par exemple lorsqu'il affirme sur le titre qui donne son nom à l'album : « I do not read newspapers, they are troublemakers ». Lui qui, vingt-cinq ans plus tôt, se définissait avec sa bande de mauvais garçons comme des « practicing troublemakers » dans Nobody Loves Us.

I Am Not A Dog On A Chain constitue peut-être une transition, tout au moins musicale, car les thèmes chers au cœur de l'anglais y figurent toujours bien. Assommant par moments (il faudrait peut-être que Matt Walker réalise qu'il ne joue plus avec les Smashing Pumpkins), l'album affiche à d'autres un meilleur visage à d'autres, même s'ils se font un peu trop rares, malheureusement. Bien sûr, on ne peut pas lui reprocher d'essayer de se renouveler, même si on préférerait qu'il nous propose enfin le disque qu'on attend depuis longtemps mais qu'il se refuse à sortir. Pourtant comme il chantait si bien en 1986 : « He'll never never never never never never do it again. Not until the next time... ».
tracklisting
    01. Jim Jim Falls
  • 02. Love Is On Its Way Out
  • 03. Bobby, Don't You Think They Know
  • 04. I Am Not A Dog On A Chain
  • 05. What Kind Of People Live In These Houses
  • 06. Knockabout World
  • 07. Darling, I Hug A Pillow
  • 08. Once I Saw The River Clean
  • 09. The Truth About Rough
  • 10. The Secret Of Music
  • 11. My Hurling Days Are Done
titres conseillés
    What Kind Of People Live In These Houses - Once I Saw A River - Jim Jim Falls
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