Esben And The Witch

Cela faisait un moment que nous n'avions plus entendu parler d'Esben And The Witch. Leur dernier album en date, Nowhere, date tout de même de 2018, et la cadence de sortie des disques du groupe n'est pas aussi longue habituellement. A l'occasion de l'annonce de ce Hold sacred, on a appris que Rachel Davies, chanteuse et bassiste de la formation, a connu un véritable épuisement moral et s'est provisoirement éloignée de la musique. Esben And The Witch ont donc probablement frôlé la fin de leur histoire, aussi peut-on se réjouir de ce come-back pour le moins réussi.

Pour recontextualiser, les Anglais ont glissé au fil des années d'un shoegaze gothique et sombre à des morceaux à tendance beaucoup plus metal. A titre d'exemple, Nowhere ne comportait que quatre morceaux durant tous au moins dix minutes. Hold Sacred en dure quarante-neuf mais contient neuf nouvelles compositions. On a envie remercier le groupe pour ce revirement, car les derniers disques sortis n'entraient plus vraiment dans le cadre que nous avions apprécié jusque-là. C'en était même devenu fatiguant. Aussi, en se plongeant dans ce sixième album studio des Britanniques, on retrouve le plaisir que l'on avait pu connaître avec leurs premières sorties. Bien sûr, il ne faut pas s'attendre à un disque joyeux et entraînant, mais, dès l'entame de The Well, on sent une atmosphère beaucoup moins malsaine que par le passé. Rachel Davies chante magnifiquement bien et pose sa voix sur une instrumentation simple, presque dépouillée. On n'ira pas jusqu'à parler d'unplugged, mais plutôt de délicatesse et de renaissance.

L'atmosphère de l'album reste sombre par moments. In Ecstasy sonne ambient avec son beat lourd sur lequel des guitares shoegaze se conjuguent à merveille. La voix de la chanteuse se fait ici plus rageuse tout en restant calibrée. Fear Not est un très bel exemple de ce que la musique d'Esben And The Witch est devenue aujourd'hui : posée, presque rassurante, mais avec tout de même cette pointe de tristesse dans la voix de Rachel Davies, notamment lorsqu'elle chante "Don't be afraid, ‘cause I'll be there". Touchant et précieux, ce passage est un des plus beaux du disque mais ce ne sera pas le seul. A Kaleidoscope est un autre petit moment de grâce avec ces chordes qui surviennent de manière si inattendue. Si d'autres passages tels que True Mirror et sa basse sur un beat minimal peuvent paraître toujours sombres, on y trouve toute de même beaucoup de tendresse. Il en va de même pour The Depths et son envolée musicale majestueuse. Petals Of Ash conclut le disque en beauté.

Esben And The Witch nous offrent peut-être avec Hold Sacred le meilleur album de leur discographie à ce jour. Aérienne, pénétrante et attachante du début à la fin, cette résurrection musicale relève d'un sacré tour de magie. Espérons que le groupe suivra cette tendance dans le futur. Les concerts à venir à Strasbourg et Paris s'annoncent inmanquables.