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Everything Everything

Mountainhead

Everything Everything - Mountainhead
Chronique Album
Date de sortie : 01.03.2024
Label : BMG Rights Management
45
Rédigé par Bertrand Corbaton, le 28 février 2024
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Il y a peu nous évoquions ici-même les chemins qui mènent à l'évolution de la musique d'un groupe. Celle-ci est la résultante d'expériences, de rencontres, et d'aspirations diverses. Parfois, elle se révèle décevante, et vous laisse dans l'idée que le groupe que vous aimiez ne sera plus jamais le même, sa trajectoire l'amenant sur des terrains où vous ne vous retrouvez pas, transfigure une musique à un point que vous ne la reconnaissez plus. Voici le genre de sentiment qui pourrait s'emparer des fans de la première heure de la musique arty des mancuniens de Everything Everything. Pourtant, avec la sortie de Mountainhead, c'est peut-être l'inverse qui pourrait se réaliser. Ainsi, les personnes totalement réfractaires aux compositions alambiquées des débuts seraient bien inspirées de s'intéresser à ce septième album.

Everything Everything est ce genre de groupe qui a largement suscité la méfiance tant sa musique détonne et peut choquer. Si le talent des musiciens est une évidence pour chacun, il n'est pas peu dire que suivre le propos de la bande de Jonathan Higgs n'est pas une mince affaire. Depuis Man Alive en 2010, Everything Everything ont largement malmené son auditoire, proposant des albums souvent inégaux, et difficile d'accès.
Le talent n'excuse pas tout, et ce que certains pouvaient interpréter comme du génie s'apparentait bien trop souvent à la condescendance d'une musique prétentieuse et parfois ennuyeuse à mourir. Le risque de passer pour un vil réactionnaire, incapable d'apprécier toutes les nuances du génie de ces garçons était bien possible mais au final, il était mieux pour tout le monde de laisser nos musiciens dans le bain de leur masturbation cérébrale.


Everything Everything se sont-ils lassés de leur nombrilisme, ont-ils découvert que leur talent pouvait être mis au service d'une autre approche ? Difficile à dire de prime abord, toujours est-il que Mountainhead dévoile un groupe que l'on avait vu qu'à de trop rares occasions jusqu'alors. Car ici, tout est amplement simplifié, et même si l'on entend toujours cette appétence pour les sons de claviers rétros et les sonorités originales, c'est surtout dans la structure de ses compositions que tout semble s'éclairer.
Moutainhead se caractérise par des titres souvent portés par la mélancolie, presque une colonne vertébrale de l'album. Ainsi dès l'entrée dans le vif du sujet avec l'agréable et énergique Wild Guess, en fin de parcours avec The Witness, ou le plus sage Canary, on saisit rapidement là où veulent nous emporter les musiciens. Les morceaux nous surprennent par leur simplicité, et donnent l'impression que Everything Everything cherchent désormais à toucher le cœur, et plus le cerveau, de l'auditoire. Il en ressort quelques pièces réellement magistrales, comme les touchantes Your Money, My Summer, ou The End Of The Contender voire le spatial Buddy, Come Over et sa mélancolie déchirante. Les hauteurs sont peut-être atteintes avec les passionnantes City Song, et R U Happy?, où le chant de Jonathan Higgs prouve qu'il peut servir à autre chose qu'à nous embarquer dans des endroits où l'on aurait préféré ne jamais mettre une oreille.
Le problème dans notre histoire est que Mountainhead souffre d'inégalités, qui nous amènent à regretter le choix de ne pas avoir opté pour un album plus court. Voilà qui aurait certainement évité de voir retomber notre enthousiasme avec des titres moins marquants comme Don't Ask Me To Beg, Enter The Mirror ou ce TV Dog assez agaçant qui écartent malheureusement l'ensemble d'un sans-faute. Certains titres comme The Mad Stone ou Dagger's Edge auront besoin de plusieurs écoutes pour se dévoiler totalement.

Voici qui n'est pas de nature à gâcher notre entrain et l'excellente impression qui se dégage de Mountainhead. Bien sûr, ceux d'entre vous qui louent la singularité de Everything Everything dans ce qu'ils peuvent apporter de fantasque pourraient être déçus de la tournure des événements. Cependant, penser que ce nouveau disque est moins intéressant car plus accessible serait une grave erreur, car Everything Everything nous livrent un album exigeant, où l'intelligence est mise au service des chansons et non plus d'une posture malaisante. Certes, le groupe n'a jamais autant ressemblé à un autre groupe qu'aujourd'hui, conséquence inéluctable lorsqu'on se défait de l'originalité arty qui faisait votre identité. C'est pourtant le chemin que l'on souhaiterait voir les Mancuniens emprunter pour de bon tant leur talent d'écriture se révèle dans des structures épurées. Savoir si nous avons ici un véritable tournant, ou une simple parenthèse dans la discographie du groupe reste l'inconnu de cette équation.

En attendant, Moutainhead est clairement un des grands albums rock indé de cette année.
tracklisting
    01. WILD GUESS
  • 02. THE END OF CONTENDER
  • 03. COLD REACTOR
  • 04. BUDDY, COME OVER
  • 05. R U HAPPY?
  • 06. THE MAD STONE
  • 07. TV DOG
  • 08. CANARY
  • 09. DON'T ASK TO BEG
  • 10. ENTER THE MIRROR
  • 11. YOU MONEY, MY SUMMER
  • 12. DAGGER'S EDGE
  • 13. CITY SONG
  • 14. THE WITNESS
titres conseillés
    R U HAPPY, CITY SONG, SAVE MONEY MY SUMMER, BUDDY COME OVER, THE END OF CONTENDER
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