Chronique Album
Date de sortie : 08.11.2024
Label : BMG
Rédigé par
Emmanuel Stranadica, le 7 novembre 2024
Si ce mois de novembre 2024 consacre en grandes pompes le retour de The Cure après seize années de silence discographique, il marque également le come-back non moins attendu de Bobby Gillespie et de Primal Scream. La bande de Glasgow n'a en effet, à l'exception de rééditions et de quelques raretés (sessions BBC, démos ou live), plus sorti de nouveau disque depuis 2016. Ces huit années de « silence » sont probablement une conséquence de la disparition tragique d'Andrew Weatherall en 2020. Toutefois, quatre années plus tard, l'ex-The Jesus And Mary Chain revient enfin dans les bacs des disquaires avec Come Ahead, douzième effort de son groupe.
Love Insurrection, premier single dévoilé cet été, est une petite ode, aux guitares funky à la Chic et à la flûte acid jazz, ultra réussie. De plus, Bobby Gillespie, qui nous entraîne avec elle sur les dancefloors, n'a probablement pas aussi bien chanté depuis des lustres. Le second extrait de Come Ahead, Deep Dark Waters va littéralement prendre la tangente de son prédécesseur et s'avérer inquiétant musicalement. D'autant que les thèmes qu'il y aborde (guerre, misère, émergence de l'extrême droite) sont tout sauf de la rigolade. Néanmoins, on constate d'emblée avec ces deux chansons que ce nouvel album s'apparente bien à un grand cru. Ready To Go Home, morceau d'ouverture du disque et dernier simple en date, est un morceau furieusement dansant. Avec ses chœurs gospels lors de son entame, la chanson qui parle de la mort s'apparente à un antidote à la tristesse, malgré son côté sombre. Ses paroles ont d'ailleurs été chantée au père de Bobby, Robert Gillespie Senior (qui figure également sur la pochette du disque) la veille de sa mort.
David Holmes est une fois encore aux manettes de la production du disque. Celui-ci apporte un vrai plus sur des morceaux tels que Heal Yourself ou Melancholy Man, et ce d'autant plus que face à la posture de plus en plus politique que le leader de Primal Scream a adopté au fil des années, on pouvait craindre que le disque ne soit pas aussi enragé que ce que le groupe avait sorti dans les années 2000 avec XTRMNTR. Il n'en est donc rien même si le groupe n'a pas non plus totalement abandonné le son rock qui l'a caractérisé sur nombre de ses précédentes parutions. L'impeccable Love Ain't Enough vient trancher avec la délicatesse de Melancholy Man grâce à une excellente maîtrise des guitares énergiques qu'elle contient.
Cet album étant très varié musicalement, il serait regrettable de ne pas citer le côté remuant et disco de Innocent Money alors que les huit minutes de False Flags et de ses clochettes tibétaines d'ouverture nous font chavirer dans une profonde mélancolie et que le final de l'album, Settlers Blues, long lui aussi de neuf minutes, nous entraîne dans une spirale musicale dans laquelle on ne peut ressortir indemne.
Primal Scream sortent ainsi leur meilleur album depuis très longtemps. Variées et très tranchantes lyriquement parlant, les soixante-cinq minutes passées en compagnie du groupe de Glasgow sur Come Ahead ont l'ambition de remobiliser un monde qui semble au bord de l'implosion. Si rien n'est moins sûr quant à la réussite de l'écossais face à cette noble cause, on pourra toujours se consoler avec cet album de haut standing qui tournera pendant longtemps sur nos platines.