Chronique Album
Date de sortie : 15.05.2006
Label : Dance To The Radio
Rédigé par
Jimprofit, le 20 septembre 2006
Pour un groupe un tantinet tendance qui fait la Une de l'actualité musicale britannique depuis quelques mois et qui enchaîne les singles, le premier album constitue toujours l'épreuve de vérité. Et ¡Forward, Russia! n'échappe pas à la règle même si les trois premiers singles sont brillants et si le talent de la formation ne peut nullement être mis en doute. Véritable fer de lance de la déferlante de Leeds, avec notamment son compère This Et Al, le quatuor ouvre la voie pour ses congénères et apporte la première pierre à l'édifice avec Give Me A Wall.
Ce qui saute aux yeux, de prime abord, c'est l'univers musical du groupe où le maître-mot est l'originalité à tous les points de vue. En effet, outre le concept inédit des titres des compositions (simplement numérotées selon leur ordre de création), les mélodies, très complexes, sont le fruit d'une grande recherche au niveau de la construction, foisonnant d'instruments sans que cela ne nuise le moins du monde à la lisibilité des chansons ni à leur extrême fluidité. Ainsi, depuis l'exceptionnel Thirteen, brûlot compact et étouffant rehaussé par un refrain de toute beauté, à Sixteen, titre plus progressif et intimiste, à deux voix, ¡Forward, Russia! propose une mosaïque musicale, un véritable kaléidoscope haut en couleurs, où, à chaque écoute, les chansons s’offrent sous un jour nouveau.
Il n'est de meilleur exemple que les deux parties de Fifteen pour illustrer le caractère évolutif, inventif et subtil de cet album qui réussit le pari d'être à la fois très varié, de par les très nombreuses influences du groupe, et très homogène, puisqu'il en ressort un style bien personnel et reconnaissable. Dans chaque titre, où l'introduction est toujours élaborée, la voix poignante et profonde, très mélancolique, alliant à la fois originalité (grande variété dans les intonations, tessiture très large) et beauté (envolées sublimes), se pose sur une musique, à la production sans faille, qui se réclame d'Ikara Colt pour le côté punk et électro-rock débridé, de Pulp pour l'énergie et la limpidité des compositions, et enfin des groupes de musique industrielle d'outre-Atlantique, comme Stabbing Westward, pour la base métal et le son dense.
Outre le fait qu'il n'y a finalement pas onze chansons extraordinaires mais bien plus dans la mesure où celles-ci sont toujours différentes, comme Eleven, par exemple, il n'apparaît aucun temps mort dans la musique de ¡Forward, Russia!, même si de nombreux breaks sont ménagés au milieu des compositions. On ne relève donc aucune fausse note pour ce premier album qui s'avère être celui de la confirmation. Et si la musique sublime, presque symphonique et onirique par moments, de ¡Forward, Russia! n'a pas le pouvoir ni la prétention de tirer la Russie de son marasme économique, elle a sans conteste ceux d'aller résolument de l'avant et de faire avancer le rock indépendant britannique.