Deuxième jour pour la quatrième édition de We Love Green et déjà une ambiance bien différente. Exit le temps ensoleillé, place aux nuages sombres et aux courtes averses qui font régulièrement sortir les parapluies sur le parc de Bagatelle. Mais il faudra bien plus aux festivaliers pour les décourager, venus tout aussi nombreux et enchantés pour découvrir le line-up de ce dimanche 31 mai.

Alors que, sur la scène electro,
Flavien Berger nous présente son univers aquatique, la pluie se met déjà à tomber en ce début d'après-midi, comme pour concorder avec sa musique. Entre
Bleu Sous-Marin, Océan Rouge et le grand
Léviathan, l'artiste parisien ravit de par la beauté de ses arrangements et de sa prestation elle-même, plus dynamique et généreuse qu'on aurait pu le penser.

La grande scène accueille ensuite les londoniens de
CITIZENS! qui partagent avec nous leur synth pop lumineuse.
Trouble et ses synthés venus tout droit des années 80 vient rapidement faire danser les premiers rangs, reprenant les chœurs psalmodiés par les musiciens. Tom Burke, au blouson portant le nom de leur second disque,
European Soul paru il y a un peu plus d'un mois, s'empare de la scène pendant plus d'une demi-heure, chantant la plupart des tubes du groupe depuis ses débuts.
Reptile, tiré de leur
debut album Here We Are, vient d'ailleurs illuminer We Love Green de son clavier dansant et son refrain irrésistible. Plus loin,
Caroline et ses airs de The Sunshine Underground, arbore fièrement sa dance délicieusement mélancolique, tandis que la douce electronica de
Only Mine et la funky
Xmas Japan viennent ensuite représenter
European Girl qui a visiblement su trouver son public.
La seconde partie du set est d'ailleurs largement dédiée à ce second opus, proposant
My Kind Of Girl et son refrain tubesque qui fait bouger le parc de Bagatelle, avant d'enchaîner sur la synthpop tendue et atmosphérique de
Have I Met You. S'ensuivent le single
Lighten Up puis
Waiting For Your Lover, deux plages à forte consonance electro faites pour les dancefloors.
Le concert de CITIZENS! se termine sur
(I'm In Love With Your) Girlfriend et
True Romance, issues de
Here We Are, qui rendent compte de leur statut culte. La première déballe sa dance menaçante et son jeu de batterie militaire tandis que la pop entêtante et le refrain imparable de la seconde mettent le feu sous une pluie légère bienvenue qui rafraichit après ces quarante minutes effrénées.

Une demi-heure plus tard, l'Angleterre est toujours à l'honneur sur la grande scène avec la venue de
Låpsley pour la première fois à Paris, jeune chanteuse-compositrice de 18 ans que certains considèrent déjà comme la nouvelle Adele. Dans un registre différent, Låpsley, toute vêtue de noir, joue face à un public qui se fait de plus en plus nombreux, d'abord turbulent avant de se faire rapidement silencieux face à la voix soul cristalline de l'artiste qui envahit le parc de Bagatelle.
Accompagnée de ses deux musiciens, elle interprète les chansons tirées de son EP
Understudy, dont des
Falling Short et
8896 tout bonnement sublimes. Les premiers rayons de soleil vont même faire leur apparition durant sa performance, sur un
Painter (Valentine) aux lyrics qui justement appellent à la luminosité, preuve de la puissance de la musique de Låpsley. Elle nous gratifie également sur cette trop courte demi-heure d'une reprise sobre et habitée du
Rhiannon de Fleetwood Mac, ainsi que d'une nouvelle composition plus pop écrite quelques semaines avant,
Take A Minute.

Tout aussi reposant, c'est ensuite au tour du suédois
José González de s'emparer de la grande scène. D'abord seul, muni de sa guitare acoustique, il interprète le tendre
Crosses issu de son premier album
Veneer. Il est rapidement rejoint par ses musiciens, dont deux aux percussions, pour une première moitié de concert qui se concentre sur le dernier album en date,
Vestiges And Claws, paru en février dernier. Sont ainsi notamment joués les deux somptueux singles
Leaf Off/The Cave et
Every Age, de même que le doux
With The Ink Of A Ghost.
La folk du suédois s'intensifie sur la seconde moitié, avec la présence de titres plus anciens tels que
Killing For Love et
Down The Line, issus de
In Our Nature. Entre-temps l'artiste interprète
Teardrop, entraînante
cover de Massive Attack, avant de terminer sur sa fameuse reprise folk du
Heartbeats de The Knife.
Bien que la météo ne se soit pas faite aussi clémente que pour la journée précédente, les nuages se sont progressivement dispersés tout au long du set de José González, venant à nous demander si le festival n'est pas à l'origine de ce temps fluctuant tant il sera allé de pair avec les artistes et groupes présents ce dimanche !

Une demi-heure plus tard,
Joey Bada$$ a joué du hip-hop et c'était cool. C'est après que les choses se gâtent... Alors que le soleil revenait occasionnellement durant les prestations de Låpsley et José Gonzalez, la pluie se déverse fortement sur We Love Green durant l'installation des instruments de
Julian Casablancas + The Voidz. Ces conditions météorologiques repoussent ainsi le concert d'une bonne dizaine de minutes, les techniciens ne s'étant visiblement pas préparés à cela et devant donc déplacer les instruments à l'arrière de la scène afin d'éviter le plus possible la pluie.

Certains auront détesté ou n'auront pas compris ce à quoi ils assistaient, les autres plus familiers avec l'univers de Julian Casablancas auront adoré le show. Souvent brouillon, parfois inaudible (le micro ne fonctionnant pas à quelques reprises, seuls les premiers rangs auront pu profiter de la voix de Casablancas qui hurle pour se faire entendre du plus de monde possible), le temps aura clairement nuit à la performance de la formation américaine.
Dès les premières secondes du concert, Julian Casablancas et son nouveau crew ne perdent pas de temps, débutant tout simplement avec l'affolant single
Where No Eagles Fly, morceau de rock'n'roll incandescent et effréné qui hélas pâtit de la météo, aussi bien du côté du micro que de la guitare d'Amir Yaghmai et des claviers de Jeff Kite qu'il essuie régulièrement.
Peu de temps après, c'est au tour de
Human Sadness de se dévoiler, longue composition expérimentale qui, malgré la pluie maintenant torrentielle, rend compte du savoir-faire musical et vocal de Julian Casablancas et son groupe. Déjà complexe et déstructurée dans sa version studio, elle devient absolument confuse pour qui ne la connait pas, terminant avec un Julian Casablancas trempé allongé sur le devant de la scène, la pluie s'abattant sur lui.
Semés de-ci de-là, les titres sauvages de
Tyranny (
M.utually A.ssured D.estruction, Business Dog, Crunch Punch) savent mettre le feu parmi les premiers rangs, tout comme les chansons plus noise rock et psychédéliques (
Father Electricity, Johan Von Bronx, la finale
Dare I Care). Alors que beaucoup auront déserté la grande scène après une poignée de titres, les plus tenaces auront résisté au temps pour assister à un pur moment rock'n'roll !
Second grand événement rock'n'roll du festival :
Ratatat. Alors que la pluie a quasiment cessé pendant l'installation du matériel, le show s'ouvre sur un « RATATAT » inscrit en grandes lettres et une intro grandiloquente. Les deux comparses Mike Stroud et Evan Mast font ainsi leur entrée sur scène sur les clameurs de l'audience pendant que des dizaines de festivaliers s'amassent progressivement sur le devant de la scène. Le duo New-Yorkais débute alors sur
Pricks Of Brightness, composition qui apparaîtra sur leur cinquième album à venir prochainement,
Magnifique.
Alors que l'on ne retrouve pas véritablement sur
Pricks Of Brightness le son si caractéristique de Ratatat (en tout cas, pour le moment et dans des conditions live), s'ensuit
Loud Pipes issu de
Classics qui définitivement met le feu, et ce jusqu'à la fin d'un set qui aura vu passer bon nombre de tubes de du groupe. Morceau culte à la fois dansant et crève-cœur,
Loud Pipes dévoile sa mélodie invincible, notamment sur une seconde moitié prouvant cette maitrise que possède le duo à faire fusionner danse et spleen.
Le début du concert voit ensuite défiler plusieurs chansons tirées de
LP3 et
LP4 : l'electro sobre et la basse ronde de
Neckbrace, la mirifique
Falcon Jab à laquelle est ici injectée une forte dose d'électricité, les percussions entraînantes en décalage avec les nappes de synthés mélancoliques de
Grape Juice City, ainsi que
Mirando qui, avec ses arrangements parkinsoniens et ses riffs de guitare enflammés, fonctionnent plus que n'importe quel titre dance sur la scène electro, faisant danser le parc de Bagatelle sur un final effréné.
Entre-temps,
Cream On Chrome, révélée il y a quelques semaines, a dévoilé son rock composé d'accords répétitifs simples mais efficaces, de riffs électriques sans pareil et d'un clavier de fin hypnotisant. A l'origine captivante, elle se fait gargantuesque en live. Plus loin, Ratatat interprètent l'inédite
Abrasive qui arbore des airs quelque peu Daft Punk-esque tout en y injectant sa propre musicalité à travers un electro rock irrésistible, à la fois conquérant et mélodieux.
Dès l'apparition de la pochette de
Classics sur le grand écran et des premiers accords de guitare de
Wildcat, les cris et clameurs retentissent dans l'assistance. L'electro rock et les rugissements du titre provoquent l'euphorie, surtout sur sa seconde moitié absolument imparable, mix de dance et funk durant laquelle personne ne tient plus en place.
Gettysburg en rajoute enfin une couche dans cette volonté de faire danser sur des mélodies déchirantes, certainement un des meilleurs morceaux du duo américain qui prend en live toute son ampleur.
Mike Stroud et Evan Mast poursuivent avec
Seventeen Years, seule composition de leur
debut album jouée ce soir-là, mais pas des moindres. Entre ses percussions lourdes, son synthé répétitif et ses riffs obsédants, elle met sur les genoux. Sa seconde moitié ambient marque une courte pause dans le set avant de repartir de plus belle avec
Shempi, à l'atmosphère inquiétante et au synthé rétro débridé. Les deux musiciens finissent tous deux aux percussions sur le devant de la scène avant de conclure sur un rappel fortement demandé par le public avec l'indomptable
Lex, pour un show qui aura été bien plus consacré à
Classics qu'au nouvel album
Magnifique. Ce qui n'est pas forcément pour nous déplaire !
Malgré une météo quelque peu capricieuse, cette journée du dimanche aura été encore meilleure que celle du samedi. Au final, We Love Green aura su varier les plaisirs, allant de l'electro à la pop, en passant par le rock et la folk. Grâce à son line-up surpassant les années précédentes et son ambiance hippie bon enfant, cette quatrième édition aura été une belle surprise et devient définitivement un des festivals français à suivre de très près.