SOHN

En ce samedi 19 avril, aux quatre coins du globe, les amoureux des galettes noires (ou transparentes ou colorées) prenaient d'assaut leur(s) disquaire(s) préféré(s) à la recherche de raretés ou de rééditions. L'évènement voyait également l'installation de boutiques à durée de vie limitée comme Rough Trade qui prenait ses quartiers cette année à Point Ephémère. Le lieu a ainsi été le centre de toutes les attentions avec des showcases de Natas Loves You, WhoMadeWho, Liz Green, Chris Garneau ou encore SOHN qui sera le "special guest" de cet après-midi. En avance sur l'horaire prévu, ce dernier prend place, seul, derrière ses claviers et livre, en guise d'apéritif avant sa prestation du soir, des versions dépouillées et revisitées de quelques uns de ses titres. Un petit quart d'heure plus tard, c'est déjà la fin, SOHN nous donne rendez-vous dans quelques heures afin de le voir en formation complète.



Le temps de déposer les emplettes du jour chez soi, de reprendre son souffle et il est presque déjà temps de rallier le Nouveau Casino pour assister au concert de l'anglais SOHN version in extenso. Déjà aperçu en juillet dernier à la Cité de la Musique en première partie de James Blake puis à la Boule Noire pour le Festival Les inRocKs en compagnie de Deptford Goth et Arthur Beatrice, c'est donc en tête d'affiche qu'on le retrouve ce soir suite à la récente sortie de son album Tremors.

La nouvelle tendance des salles parisiennes touche également le Nouveau Casino aujourd'hui et c'est ainsi en compagnie d'un DJ que l'on patientera jusqu'à ce que 21h00 ne s'affiche sur les montres et que les fumigènes ne commencent à envahir la scène. SOHN, caché dans son ample capuche, et ses deux musiciens prennent place derrière les instruments, tous trois en position assise. Les basses puissantes et oppressantes entrent en action renforcées par un jeu de lumières aveuglantes, rendant difficile la vision en direct. Puisqu'il est quasiment obligatoire de détourner son regard, des spots montés sur des colonnes, tels des phares, tournent comme pour mieux permettre aux personnes les plus désorientées de retrouver leur direction.
Avant d'entamer le titre éponyme de son disque, SOHN explique que ce dernier est extrait de son nouvel album puis se reprend en disant qu'il s'agit du seul qu'il ait sorti. A l'inverse de nombreux jeunes artistes, l'anglais prend soin de revisiter son répertoire offrant ainsi au public une expérience nouvelle ne se résumant pas à l'interprétation d'une version photocopiée de ce qu'il a enregistré en studio. Le son est limpide et clair, l'auditoire captivé et attentif, comme hypnotisé par la tessiture de voix de l'anglais.



Le morceau Tempest sera précédé d'une erreur de manipulation qui fera bien rire son interprète. A part ce faux pas, aucun autre ne sera commis tout au long de la courte heure du concert. Les sous-couches électroniques inquiétantes plongent la salle dans une atmosphère de film de science-fiction des années 70 que les effets stroboscopiques ne feront qu'accentuer. Si l'éclairage fait signe de quelques petites facilités en privilégiant les lumières rouges sur des titres comme Red Lines ou encore Bloodflows, faisant ainsi un peu ton sur ton, il est bon de saluer l'effort de contrebalancer une présence scénique plutôt statique par un déferlement d'effets visuels donnant, par exemple, l'impression de voir un orgue de lumières lors du titre Fool qui s'enchaîne, comme sur le disque avec Lights et son rythme saccadé et accrocheur. SOHN remercie le beau public de s'être déplacé. Chaque personne entre en résonance avec ces rythmes syncopés, obsédants et ensorcelants. L'assistance comme un seul homme baisse le regard et ondule. L'électro faite pour penser et méditer semble avoir trouvé ses amateurs. Le trio quitte déjà la scène sous de nourris applaudissements non sans nous gratifier d'un peu de rab.



Le dernier single en date, Artifice, sacrément reboosté, fermera ainsi la marche suivi du tube de la reconnaissance, The Wheel. L'occasion de profiter de cette belle voix de falsetto une dernière fois et de se laisser happé par les forts éclairages pour mieux s'isoler dans ses pensées. Tous sourires, SOHN et ses deux musiciens prennent congés sous les acclamations d'une assemblée conquise. Avec leur électro réflexive et déboussolante, ils seront parvenus à mettre tous nos sens en éveil et à leur apporter un certain bien-être. L'expérience ne demande ainsi qu'à être renouvelée, vivement la prochaine fois.