Ce live report pourrait se résumer en une phrase : « Ah bon sang ce que c'était bien ! ». Mais tentons d'élaborer un peu.
Le 30 avril dernier, les Strypes étaient de passage à Paris pour défendre leur unique album
Snapshot, paru en septembre dernier. Les quatre Irlandais, âgés de dix-sept ans en moyenne, ont déjà tout appris et nous le prouvent magistralement aujourd'hui. Dans le public, des très jeunes mais également un bon lot de cheveux gris sont venus assister au phénomène.
Dès leur entrée en scène, à la suite d'une première partie assurée par le groupe Dick Voodoo, le concert s'annonce excellent. On n'avait pas senti une telle énergie et une telle fureur rock'n'roll depuis bien longtemps.

Et cependant la performance est extrêmement calibrée. Le moindre mouvement de tête semble prévu à l'avance. Le jeu de guitare de Josh McClorey est tout bonnement excellent, et la voix de Ross Farrelly est d'une incroyable maturité. Dans les premiers rangs, filles et garçons se pressent pour toucher les musiciens et les instruments. Inspiré par le blues et le rock'n'roll des débuts, la musique des Strypes fait encore la part belle aux reprises. En fin de soirée, les quatre gars de Cavan nous feront d'ailleurs cadeau d'une reprise particulièrement réussie du tube des Kingsmen,
Louie Louie. Néanmoins leur propre matériel annonce déjà un énorme potentiel.
La performance des musiciens est aussi une performance d'acteur. Chacun a un jeu différent : Ross est le chanteur insolent et inaccessible derrière ses lunettes noires, Josh est l'idole des fans plus accessible et bavard, Pete est celui qui réclame toujours plus de cris et encouragements, et Evan est le batteur discret mais sacrément énergique. Il est difficile de croire que Ross ait commencé à porter des lunettes noires sur scène par timidité et par peur du public tant il affiche désormais devant nous une aisance et une assurance sans faille. br/>

Dans ce théâtre musical, le costume a également une importance fondamentale. Comme à leur habitude, les quatre musiciens sont tirés à quatre épingles. D'aucuns les qualifient de néo-mods tant leur style vestimentaire rappelle cette « subculture » et certains groupes des années 60. La prestation joue aussi beaucoup sur la complicité entre les membres du groupe, comme ces moments où Ross et Josh chantent tous les deux dans le même microphone, à la John Lennon et Paul McCartney. Et ces petits jeux de rôle ne manquent pas d'avoir l'effet escompté sur la foule. <
Sans compter que les Strypes sont en train de s'améliorer au fil du temps. Leur jeu de scène s'est affiné, leur confiance s'est accrue, leur musique s'est bonifiée. Ross Farrelly a gagné en confiance, Pete O'Hanlon aussi. Ce dernier est mis à l'honneur, promu au centre de la scène, sur quelques morceaux, et il faut croire qu'il aime ça. Pete affiche tout à coup une présence scénique et un potentiel de frontman qu'on ne lui soupçonnait pas. Il n'y a décidément pas de vrai leader dans ce groupe : on entend beaucoup Josh mais on voit aussi beaucoup Ross, et il semble bien qu'on soit amené à remarquer Pete de plus en plus.

Il faut dire que les quatre musiciens ont déjà fait un bout de chemin. Ce sont eux qui ont assuré la première partie des Arctic Monkeys lors de leur tournée européenne en hiver dernier et des Stones Roses lors de leur concert événement à Paris en juin 2013. Rien que ça. Ils jouent aujourd'hui toute l'intégralité de leur album
Snapshot ainsi que leur nouveau single
Hard To Say No et le très bon
Still Gonna Drive You Home. C'est
Blue Collar Jane cependant qui parviendra le plus à mettre en mouvement la foule.
On en oublie ce soir que les Strypes n'ont que dix-sept ans, et d'ailleurs il serait temps de laisser ce point de côté et les prendre au sérieux, ces quatre-là, car ils promettent d'aller loin.