logo SOV

Girls Names

Paris, Batofar - 23 septembre 2014

Live-report par Xavier Turlot

Bookmark and Share
Les cales du Batofar ont accueilli mardi dernier un groupe originaire de la partie la moins connue du Royaume-Uni : l’Irlande du Nord. C’est Girls Names, quatuor de post-punk élevé dans la stricte observance des rites de Joy Division, qui a réussi ce soir à remplir le fond du bateau grâce à un dernier album sombre, lancinant et criblé d’effets en tous genres : The New Life.

SOV

La première partie est assurée par un trio anglais basé à Paris, The Wonder, qui nous offre une demi-douzaine de chansons bien construites dans la tradition de la pop shoegaze. Si un solo se démarque clairement du lot et si les mélodies sont assez classes, elles ne se réalisent jamais complètement avec une voix souvent approximative et une absence de chœurs qui auraient été bienvenus pour dynamiser l’ensemble. Parions qu’un léger changement de configuration scénique pourrait les propulser plus loin.

La foule, plutôt chic et anglophone, s’amoncelle de plus en plus devant la haute scène du Batofar à l’affut des musiciens Belfastois. Le quatuor au look punk très dépouillé, quasiment straight edge, est très copieusement applaudi à son entrée en scène. Cathal Cully, le chanteur, arbore un faciès imperturbable et attrape sa guitare avec une concentration totale pour attaquer Projektion. La mélodie orientale couplée à une esthétique new wave métronomique est franchement bien vue. La voix de l'Irlandais, dont le regard se perd au loin, est sombre et grave, quelque part entre Ian Curtis, Morissey et Joe Strummer. Le riff génial de A Second Skin retentit sous les acclamations du public qui se retrouve plongé au plus profond des années 1980 avant de s’en rendre compte. Les dissonances métalliques laissent place à un habile ralentissement qui amène à un pont noyé sous les effets : flanger, delay, reverb... toute la panoplie y passe pour nous emmener dans les méandres de leur trip auditif obscur. Claire Miskimmin, la bassiste, joue ses lignes en martyrisant ses cordes et adopte inlassablement le même motif punk lourd à l'extrême, hochant sa tête avec démonstration de droite à gauche.

SOV

Le riff mélancolique de Notion remporte lui aussi un franc succès avec une ligne mélodique impeccable et une structure imparable, légèrement agrémentée de notes de synthé. Hypnotic Regression donne prétexte à une longue expérimentation d’effets en tous genres. Cully se penche sur son rack de pédales pour triturer et torturer les émanations électromagnétiques de son instrument, nous engouffrant dans des tunnels de manipulations psychédéliques. La section rythmique ultra rigoureuse empêche les dérapages et les pertes de compréhension du public, c’est là la recette de Girls Names, lesquels peuvent se permettre de dépasser allègrement les dix minutes sur certaines chansons, sans jamais nous lasser.
Si le son peut piquer les oreilles dans les passages les plus aigus et les plus distordus, il est globalement plutôt bien équilibré pour une salle si confinée. Lawrence, titre issu du premier album, fait penser à outrance à Joy Division avec son chant scandé et suivi par la guitare rugueuse du leader. Le quatuor irlandais ne se donne vraiment pas en spectacle, il interprète avec authenticité et passion une musique carrée et directe qui impose immédiatement un style. Ce qui permet de réunir une fanbase soudée, admiratrice de bases rythmiques dépouillées. Très avares en paroles, les quatre Britanniques se retirent au bout d’une heure de concert puis reviennent vite pour un rappel d’une seule chanson qui frise les dix minutes, The New Life.

Girls Names ont brillamment réussi à maintenir la flamme du post-punk allumée ce soir, sans s'empêcher de défendre un album personnel et typé.