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Thom Yorke

Paris, Olympia - 12 juin 2018

Live-report par Louise Beliaeff

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Mardi 12 juin, Thom Yorke a embarqué l'Olympia de Paris dans son univers lunaire et enivrant. Alternant les morceaux méditatifs et les sons electronica aux basses surpuissantes, le chanteur a offert un show magistral, pensé jusqu'aux animations visuelles hypnotiques signées Tarik Barri.

Mais qui peut bien faire la première partie de Thom Yorke ? Une telle tête d'affiche pourrait évidemment se suffire à elle-même, tant sa personnalité est forte, son charisme, imposant. Oliver Coates se jette sur la scène de l'Olympia, seul, ou presque. Il tient entre ses jambes un violoncelle. Après avoir ressassé à l'infini les partitas de Bach, l'ancien soliste londonien s'est tourné vers la musique amplifiée, minimaliste. Sur une base rythmique préenregistrée, Oliver Coates alterne des notes tenues, des arpèges très rapides, des crissements stridents obtenus avec le crin de son archets contre ses cordes. Le résultat, intéressant, rappelle la musique de phases de Steve Reich, l'oeuvre de Philip Glass, le brio d'Arthur Russell. Chose insoupçonnée : le musicien caché sous sa casquette réussit à capter l'attention d'une fosse surexcitée. Il manque cependant peut-être un travail scénique plus poussé pour pouvoir apporter de la variation et de la vie à sa prestation, un peu répétitive sur la longueur.

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Sans s'étaler sur les remerciements, Oliver Coates repart avec son instrument dans les coulisses. Les trente minutes qui suivent durent une éternité. Le trio arrive enfin. Nigel Godrich, producteur, Tarik Barri, créateur de l'univers visuel du concert, et Thom Yorke. Il est vêtu de noir, comme à son habitude. Des baskets blanches aux pieds, ses cheveux noués en chignon. Plus classe d'années en années. L'Olympia pousse des cris de joie. Le concert commence. Il ne suffit que de quelques secondes pour pénétrer dans l'univers de Thom Yorke, un univers parallèle où les boucles rythmiques futuristes se fondent à merveille avec les trouvailles harmoniques à la bizarrerie assumée. Interference, A Brain In A Bottle, Pink Section, Nose Grows Some... Le dernier album de Thom Yorke, Tomorrow's Modern Boxes, est mis à l'honneur en première partie de concert. Le merveilleux morceau Black Swan s'intercale toutefois au début du set.

Les trois hommes sont debout devant trois tables sur un pied, disposées de part et d'autre de la scène. Nigel Godrich est derrière un ordinateur et un clavier, il prend de temps en temps une guitare ou une basse. Tarik Barri pianote mystérieusement sur un clavier, pousse des boutons et fait glisser des potards. Il réalise l'identité visuelle de chaque morceau, en live. Ses graphismes numériques sont projetés sur cinq grands panneaux placés en fond de scène. Carrés multicolores, taches rouges, coulées d'encre en noir et blanc : les formes abstraites épousent à la perfection les titres chantés par Thom Yorke.

Avec son sourire en coin et son regard espiègle, un peu moqueur, Thom Yorke fixe plusieurs fois le public. Son vieux copain. Plutôt petit et frêle au milieu de la grande salle du IXème arrondissement, il réussit à occuper l'espace comme un géant. On ne voit que lui. Il susurre ses paroles, les avale, les crie. Il se met à bouger, à hocher de la tête, à onduler son bras, à sauter comme un fou. Puis, d'un coup, il se calme et se retrouve derrière son ordinateur. Peu loquace, il ne parle que brièvement avec son public. Tout est dans le regard.

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Thom Yorke est-il sur le point de sortir un nouvel album ? Le set du concert est truffé de « nouveaux » morceaux : I Am A Very Rude Person, Two Feet Off The Ground, Not The News, Traffic... Cela fait plusieurs dates qu'il les glisse entre les morceaux issus de Tomorrow's Modern Boxes, The Eraser ou Amok. Cela sent peut-être le nouveau LP. Tous les espoirs sont permis.

Au terme de plus d'une heure et demie de musique électronique expérimentale planante, Thom, Nigel et Tarik saluent en français et font place à un tonnerre d'applaudissements. Retour sur scène pour trois morceaux dont Default, une perle qui réussit à faire tanguer le parquet de la fosse. Thom ne pouvait faire un concert sans un clin d'oeil à son groupe. En deuxième rappel, il revient seul, se met devant son piano. Tarik Barri a laissé un ciel étoilé flotter sur les panneaux. Le chanteur dédicace à Radiohead le titre Glass Eyes, une ballade subtile issue de leur dernier album, A Moon Shaped Pool (2016).

Alors qu'il joue les dernières notes au piano, Thom Yorke dérape et fait sonner la mauvaise touche. Il rit : « Oh shit ». Juste pour nous rappeler qu'il est bien humain. On en doutait presque.
setlist
    Interference
    A Brain In A Bottle
    Impossible Knots
    Black Swan
    I Am A Very Rude Person
    Pink Section
    Nose Grows Some
    Cymbal Rush
    The Clock
    Two Feet Off The Ground
    Amok (Atoms For Peace cover)
    Not The News
    Truth Ray
    Traffic
    Twist
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    The Axe
    Atoms For Peace
    Default (Atoms For Peace cover)
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    Glass Eyes (Radiohead cover)
photos du concert
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