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BirdPen

Paris, Petit Bain - 13 juin 2022

Live-report par Adonis Didier

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Petit point météo pour commencer, il fait 30°C en bord de Seine, les guinguettes battent leur plein, et c'est donc tout naturellement que nous allons nous enfermer dans la cale d'une péniche garée entre Bercy et la BNF, plutôt que prendre un gin tonic en rooftop comme un bon parisien. Provincial de l'Est un jour, provincial de l'Est toujours.

On descend donc les escaliers métalliques menant à la salle de Petit Bain, pour découvrir dans un premier temps Kador (introuvables sur Spotify et Deezer, mais dont les démos sont disponibles sur Soundcloud), collectif français mélangeant post-rock, un peu de trip-hop, et doté d'un chanteur/rappeur qui en live fait penser à Kery James rappant en anglais. La musique est lourde tout en se voulant atmosphérique et très descriptive, cinématique. Si vous avez déjà vu un Airbus Beluga, vous comprendrez. Un groupe de post-rock auquel on mêle du rap et du trip-hop pour raconter des histoires, on comprend mieux ce qu'ils font en première partie d'un side-project du collectif Archive.


Et ce membre du collectif Archive, parlons-en. Dave Pen, chanteur chez Archive depuis 2004, a formé BirdPen avec son ami Mike Bird en 2003 (ça fait Bird et Pen, c'est leur nom de famille, vous avez compris ?), pour ce qui était au départ du Radiohead-like des années 2000 et s'est progressivement atmosphérisé, ou vaporisé, vers un post-rock plus nébuleux. On ne sera donc pas surpris du fond noir avec tableau disposé derrière le groupe, représentant la pochette du dernier album All Function One, ni des néons verticaux disposés un peu partout autour de la scène, ni de la présence d'une violoniste et d'un batteur option MAO (ndlr : Musique Assistée par Ordinateur) aux côtés de BirdPen. On ne sera d'ailleurs pas plus surpris par la longue montée de vagues électroniques, d'environ quatre minutes, qui précède l'arrivée du groupe sur scène, introduisant Blackhole, première chanson jouée du dernier album. Et on espère que vous avez aimé le dernier album, parce que cette tournée est là pour en faire la promotion. Ne seront « oubliées » de All Function One que Universe et Invisible (sic), alors que Dave Pen entame déjà la magnifique Function.

Celle-ci nous permet de découvrir les talents de violoniste de Raphaële Germser (française, cocorico), qui, en plus d'avoir réalisé tous les arrangements de cordes de l'album, participe à la tournée du groupe en tant que violoniste et bassiste, Mike Bird récupérant la basse lorsqu'il faut jouer du violon. La montée finale de Function nous permet d'entendre pour la première fois la batterie, et on commence à comprendre une chose, en plus du fait que la climatisation est à fond et qu'il fait -12°C car la salle est à moitié vide, c'est que le son va être monstrueux. La grosse caisse fait vibrer la cage thoracique, la basse se pose façon éléphant, les vagues de guitares et de synthés se détachent et se recouvrent à la perfection, le chant et le violon naviguent dans cet amalgame et en ressortent magnifiés. Pour une salle à cette échelle, et un prix en général plus que correct, le Petit Bain est une référence tout terrain en matière de qualité sonore. Et c'est bien ce qu'il fallait à BirdPen pour pouvoir exprimer au mieux leur talent.


Le groupe va enchaîner comme ça, avec Dave Pen qui pose, ténébreux, et Mike Bird qui fait l'homme-orchestre synthés / basse / guitare sans rien dire (seul l'un des deux présente sa photo sur Google, je vous laisse deviner lequel), jusqu'à Changes. A priori, si vous vous étiez trompé d'endroit et que le post-rock électro-atmosphérique n'est pas à votre goût, vous êtes déjà partis. Heureusement, Off permet à Dave Pen de récupérer un tambourin et commencer à interagir avec le public pour le réveiller. La lourdeur électro de l'instrumentation ainsi qu'un petit jeu de clapping « a cappella » entre Dave et le public permet à tout le monde de s'éclater, et l'alchimie commence à opérer. On repart ensuite, de Otherside à Seat 35, sur un numéro de vagues sonores portant le chant habité et quelque peu poseur de Dave Pen, habilement soutenu par les chœurs entonnés par le reste du groupe. L'atmosphérique composant 95% des chansons du groupe, de toute façon si vous êtes là c'est que vous aimez, ou alors vous êtes vraiment perdu et un peu sourd. On remerciera tout de même Modern Junk, incroyablement dansante en live, et Oh So Happy d'accélérer un peu le tempo et de nous faire remuer pour que la température remonte, chassant au passage les pingouins qui s'étaient perdus dans le Petit Bain, attirés par le froid et une incompréhension liée au patronyme de Mike Bird.

Le rappel se compose de Undone, ultime chanson de All Function One, et surtout de Only The Names Change, étirée, magnifiée sur plus de dix minutes par un travail de lumière et de son remarquable. Toutes lumières éteintes, seuls les néons avant s'allument en suivant la grosse caisse, et les néons arrière en suivant la caisse claire, générant une ambiance fantasmagorique dans la salle. Le final devient un bouillonnement de néons stroboscopiques et d'instruments poussés à fond, gravant le concert dans nos mémoires, et dans notre chair de poule.

Soutenus par une technique sons et lumières sans faille à Petit Bain, BirdPen ont livré un concert à leur image, atmosphérique, planant et inquiétant, pour peu que vous soyez les bons clients.
setlist
    Blackhole
    Function
    Life In Design
    Into The Blacklight
    Flames
    Changes
    Off
    Otherside
    Traitors
    Shakes
    Seat 35
    Modern Junk
    Oh So Happy
    Blackhole (Reprise)
    Natural Rewards
    ---
    Undone
    Only The Names Change
photos du concert
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