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Coldplay

Paris, Stade de France - 16 juillet 2022

Live-report par Laetitia Mavrel

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Les lecteurs fidèles de Sound Of Violence auront remarqué (mais pas forcément acquiescé, c'est ici le beau principe de la démocratie qui est respecté) que depuis une bonne dizaine d'années, les disques du groupe de Chris Martin peinent à faire l'unanimité. Cependant, comme chacun d'entre nous le sait, l'expérience du live permet souvent aux musiciens d'atteindre d'autres sphères.

N'est-ce pas ici le nom de la tournée gargantuesque de Coldplay en ce bel été 2022 ? A la suite de la sortie de Music Of The Spheres, album ayant réussi à pousser encore plus loin le principe du « concept album » et continuant de nous laisser confus, la grosse machine s'est mise en route pour atteindre des sommets. Ainsi, c'est un marathon de quatre dates au Stade de France que Coldplay entament ce samedi soir, et la chaleur qui s'abat sur nos têtes ne semble pas décourager les plus furieux qui bravent déjà le coup de chaud dès potron-minet avec leur couverture de survie et leur bataillon de bouteilles d'eau en face du stade, bien assis devant les portes attenant à la fosse.


Nous ne moquons en rien cette attitude, l'ayant tous plus ou moins déjà fait pour d'autres groupes, probablement à d'autres époques. Et nous saluons les vrais fans de Coldplay, ceux qui ont accepté que le petit groupe de pop-rock indie devienne ce rouleau-compresseur qui a embrassé depuis quelques années déjà le gigantisme et la superficialité de tels raouts musicaux.
Mais, ayant aimé ce groupe profondément à leurs débuts, tout en saluant le succès obtenu tant chez le public qu'auprès de leurs pairs, nous avons malgré nos désillusions face aux disques gardé cette affection et cette étincelle d'espoir de les voir renaître de façon plus modeste sur scène. Disons-le tout de suite : c'est encore une fois raté. Prenant place dans un premier stade quasi comble (pour ce qui est de la fosse et des gradins les moins coûteux, quelques rangs clairsemés aux carrés or), l'ambiance est bel et bien là. Le public est aux anges, la relative fraicheur de ce début de soirée aidant, jeunes comme beaucoup moins jeunes sont déjà armés des très nombreux tee-shirts colorés et autres bracelets électroniques dont on se doute qu'à un moment ils viendront prendre part au spectacle.

Coldplay ont vu les choses en grand. Passé le merchandising envahissant et ses prix élevés, la scénographie est à l'image du dernier album, toute en cosmologie et avec écrans géants circulaires venant projeter moult effets cosmiques et psychédéliques. La scène principale se voit reliée par une très longue avancée menant mi fosse à une deuxième scène ronde qui sera sans aucun doute propice aux solos de Chris Martin.
Face au coucher de soleil, le concert débute avec en fond sonore Light Through The Veins de Jon Hopkins et deux jeunes personnes venant nous présenter un mini film sur les associations de défense de l'environnement que soutient le groupe. Puis, c'est sur le thème de « E.T » et martelés de messages de type « Everyone Is An Alien Somewhere » (entrecoupés de liens vers le store du site internet...) que les membres du groupe prennent place sur cette immense scène tout en hauteur pour voir arriver, tel un Rocky remonté à bloc, Chris Martin tout aussi coloré que les tee-shirts de ses fans venant en courant entamer le set avec le titre phare du dernier opus, Music Of The Spheres.

Les deux heures et cinq minutes qui vont suivre vont être à la hauteur de ce que revendique le groupe aujourd'hui et de ce que les fans attendent. Du lourd et du flamboyant. Mené tambour battant par un Chris Martin qui déborde d'énergie, passant d'une scène à l'autre, de piano à piano, venant danser le long de la jetée ou s'agenouiller tel un pénitent devant son public, on ne reprochera jamais à ce dernier la passion qu'il injecte dans ses shows et une réelle honnêteté dans tout ce qu'il entreprend. La setlist quant à elle fait la part-belle au dernier album et aux disques de cette dernière décennie, ce qui sied parfaitement au décor.


Le Stade de France se transforme le long des morceaux en vasque lumineuse stroboscopique, entre le lightshow de la scène fait de néons vifs et autres lasers en mode éclairages de la tour Eiffel du 14 juillet et les fameux bracelets des spectateurs devenant sans le vouloir les acteurs de cette débauche visuelle assez impressionnante. Pour ces vagues de vert, de jaune (je vous laisse deviner sur quelle chanson), de rose ou autres cœurs se formant de part et d'autre, on félicitera les techniciens responsables de cet incroyable artifice, mais moins pour le dixième de vue que nous avons perdu à l'occasion. Mais est-on venu assister au carnaval ou à un concert ? Malheureusement, et malgré les effets lumineux, pyrotechniques et autres lâchers de ballons et bombardements de confettis, c'est bel et bien la musique de Coldplay qui se noie complétement dans cette profusion d'effets.

Malgré un chant toujours juste et un jeu de piano que Chris Martin rend à chaque titre très gracieux, les morceaux sont quasiment tous enveloppés d'une surcouche de reverb quand ils ne sont pas en mode mash-up avec d'autre bribes de titres, rendant le tout plus brouillon qu'harmonieux. Lorsque les chansons les plus dénudées apparaissent enfin, telles The Scientist, In My Place ou notre cher Yellow, c'est une autre version que nous découvrons, celle de 2022 où l'esprit qui est celui du groupe ne leur correspond absolument plus. Pour ce qui est des morceaux les plus récents, ils collent parfaitement à cet univers tout en facticité et les spectateurs semblent réellement faire corps avec ce que leur offre le groupe, même quand cela implique une belle dose de grotesque grâce à l'apparition angoissante d'une marionnette qui ferait peur à Elmo lui même et aux membres du groupe déambulant sur scène affublés de néons collés partout sur eux, coiffés de casques intégraux qui font penser à une mauvaise parodie de Daft Punk.

Il y a aujourd'hui deux mondes : celui où Coldplay est une référence absolue dans la musique populaire et festive et qui appartient au club privé des dieux du stade, avec ce que cela implique de gigantisme. Puis celui de ceux pour qui Coldplay resteront avec leurs trois premiers disques un groupe de rock juste ce qu'il faut de talentueux pour offrir un musique pop indie douce et racée à la fois, plutôt modeste et sacrément efficace. Ces derniers, dont votre chroniqueuse, se sont perdus dans l'évolution des quatre anglais et ont cédé la place aux très nombreux admirateurs de ces Coldplay 2.0 qui, eux, s'assument complètement. C'est tout à leur honneur.
setlist
    Music Of The Spheres
    Higher Power
    Adventure Of A Lifetime
    Paradise
    Charlie Brown
    The Scientist
    Viva La Vida
    Hymn For The Weekend
    Let Somebody Go (feat. H.E.R.)
    Politik
    In My Place
    Yellow
    Sunrise
    Human Heart
    People Of The Pride
    Clocks
    Infinity Sign
    Something Just Like This
    Midnight
    My Universe
    A Sky Full Of Stars
    Sparks
    Magic
    Humankind
    Fix You
    Biutyful
photos du concert
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