logo SOV

Dream Nails
Nova Twins

Paris, Café de la Danse - 30 octobre 2022

Live-report par Adonis Didier

Bookmark and Share
Un dimanche soir. Bastille. 19h. Retour rue de Lappe, oh shit here we go again, les souvenirs de la soirée de la veille reviennent par intermittence, dans des flashs lumineux bien déplaisants. Une impression étrange toutefois. Ah oui, il n'y a personne qui vomit dans la rue, et la moitié des bars est encore fermée. On détourne par le passage Louis Philippe pour éviter de se faire (encore) traquenarder au Mad Monkey, et on atterrit devant le Café de la Danse, parce que ce soir c'est Nova Twins, et ce soir promis on sera sage.

Enfin, on sera sage, ça reste à voir, parce qu'à peine arrivé, le public donne déjà la sensation que la soirée sera bien agitée. Le style Nova Twins est présent de toutes parts, le public se compose en majorité de jeunes filles en jupes, motifs tartan rouge écossais, la teinte capillaire est verte, rouge, violette, les chaussures sont des DocMartens montant jusqu'aux genoux et lacés avec environ deux kilomètres de lacets noirs ou multicolores. Veille d'Halloween oblige, les Nova Twins ayant en plus demandé aux gens sur Instagram de se présenter avec leur plus beau costume, on verra passer, en plus du folklore « classique », de l'uniforme d'écolière japonaise, du costume de Spider Man, du vampire, de la survivante d'apocalypse zombie, etc...


Une soirée bien bariolée en perspective donc, et ce n'est pas l'arrivé de Dream Nails en première partie qui va déteindre l'ambiance. Maquillage fluo de rigueur pour tout le groupe, la batteuse Lucy Katz a des traits rouges sur les yeux comme le clown du It de Stephen King, la guitariste Anya Pearson, seule rescapée du duo originel, a du sang qui dégouline depuis ses lèvres, et Leah Kirby, leur nouvelle chanteuse depuis un an, a des tresses qui lui descendent à la mi-cuisse. La présentation est claire, « we're a queer punk band from London », et le baroufe déboule immédiatement. Passé They/Them Leah invite toutes les femmes, les trans, les personnes non-binaires à venir au premier plan. Pas vraiment de réaction, en même temps nul doute que toutes ces formidables personnes sont déjà devant à hurler. A mesure que le set se déroule, on découvre un groupe live bien plus varié que ce qu'on en connaît en studio. On sent des touches funk, des touches hip-hop, et une rage omniprésente qui, tout cela mélangé à leur punk originel, fait poindre une irrépressible envie de citer les Rage Against The Machine dans ce papier.
On monte de plus en plus en régime, Leah descend dans la fosse, sépare la mer en deux, avant de remonter prestement dès que le wall of death se lance. Les plus gros pogoteurs n'étant pas encore arrivés, on se retiendra gentiment d'envoyer valser des gamines de quinze ans dans les gradins, mais l'idée générale est déjà là. La bassiste Mimi Jasson fait l'effort incroyable de nous annoncer dans un français plutôt compréhensible que le groupe sera au stand de merchandising juste après, que leurs vinyles sont bloqués à la douane, mais qu'attention, vous pouvez tout de même commander et ce sera avec plaisir. Le set se conclut sur Jillian, Lucy se lève de la batterie pour venir nous dire merci pour tout, Leah tape sur le charley ouvert pour garder le rythme, les filles s'amusent entre elles, demandent au public de se baisser, Leah reprend le microphone, on saute, on profite, et on a hâte de retrouver toutes les chansons queer punk fusion que l'on vient d'entendre sur un disque très prochainement.


Donc voilà, le public on est chaud, bouillant, mais où sont donc les Nova Twins ? Ah oui, c'est vrai, on a encore trente minutes d'attente, il faut tout remettre en place, effectuer les tests de microphone, tout ça tout ça... Une attente qui, dans notre état, paraît infinie, mais qui sera récompensée par moults dorures brillantes, et du gros son dans les esgourdes. Les Nova Twins débarquent sur scène, Amy Love au chant et à la guitare, Georgia South à la basse, un batteur bien sympathique dans le fond, et les deux jeunes femmes sont là pour mettre des paillettes dans nos vies. Fire & Ice sert à se présenter, Amy Love demande à toutes les boss bitches présentes ce soir de crier et de lever les mains, et Cleopatra enfonce la porte avec une basse et un fuzz poussant la salle du Café de la Danse dans ses derniers retranchements. Les murs peinent à ne pas trembler, pour le sol c'est foutu tellement les gens sautent, les filles sont conscientes d'avoir accroché leur public, et vont descendre jouer le dernier refrain dans la fosse histoire de ne pas le lâcher. On revient au tout premier EP avec Wave, Amy pose la guitare, empoigne le microphone, harangue, fait la diva, pendant que Georgia gère toute seule comme s'il y avait douze basses qui jouaient en même temps sur scène. Finish en beauté, Amy ouvre la fosse, le véritable pogo peut enfin commencer, et force est de constater que le profil de la fosse s'est légèrement musclé, en plus d'avoir pris de l'âge.
Les Nova Twins annoncent ensuite Puzzles comme une volonté de mixer leurs influences rap et pop des années 2000 avec « the hardcore shit », et désignent la fosse comme un endroit libre où chacun peut, au choix, twerker, headbanguer, ou se jeter contre d'autres personnes dégoulinantes de sueur.

En parlant de sueur, le riff introductif de Taxi, peut-être la chanson la plus efficace de leur répertoire, suffit à déclencher un gigantesque pogo dans l'assistance. Le bordel est fortement désorganisé, encouragé, tout le monde est le doigt du milieu en l'air pour K.M.B., la musique oscille entre énergie punk et nu metal, le combat est réel, et la foule s'y reconnaît. Oui, tout le monde n'aime pas les Nova Twins, la musique a de quoi fortement cliver l'opinion, mais c'est bien l'idée ici. Vous n‘aimez pas ? Passez votre chemin, ici on fait la musique qu'on aime, et on emmerde le reste du monde, ceux qui nous disent comment on devrait faire, et ce qu'on devrait porter comme fringues. En conséquence, on passe sa rage dans un gros wall of death sur Losing Sleep, le batteur se permet un petit solo, avant qu'Amy ne nous file de véritables sueurs froides Halloweenesques sur un premier couplet de Sleep Paralysis qu'on ne pourra que qualifier de creepy, bien accompagnée d'un kick et d'une basse tout en grondements d'outre-tombe. Petite note tout de même, le chant sort un peu les rames sur le refrain, car le métal symphonique, à tenir en live, c'est une autre histoire, et n'est pas Tarja Turunen qui veut.


Fin apparente de set, les filles partent, se font bruyamment rappeler, le « encore » reprend directement à fond avec le tube Antagonist, même si, oups, quelqu'un a oublié de remettre un microphone à Amy, qui doit se coller à Georgia pour lui piquer le sien le temps d'un couplet. Pas d'oubli en revanche pour cette fan du premier rang et son drapeau français, décoré d'un gros Nova Twins écrit au marqueur noir dans la partie blanche. Amy lui empruntera et chantera tout Undertaker avec du bleu, du blanc, et du rouge sur les épaules, en plus de ses perles, de sa couronne, et de ses dorures, avant de délicatement déposer le drapeau sur son ampli de guitare. Tout cela valait bien une photo avec la foule, et oui, vous l'avez deviné, la dernière chanson se profile déjà à l'horizon. Il restait un single de Supernova à sortir, c'est donc bien Choose Your Fighter qui clôture la soirée, ultime effort pour tous les pogoteurs du soir, un effort récompensé par une nouvelle descente dans la fosse pour les reines de la soirée. Amy et Georgia s'accroupissent avec leur instrument, nous invitent à faire de même, la tension monte encore et encore pendant que l'on descend. « choose your fighter », et vous connaissez la suite.

On finira la soirée trempé de sueur, une sueur qui n'est qu'à moitié la nôtre, au bout d'un set d'une heure que l'on aurait aimé voir se poursuivre un peu plus longtemps, maintenant que Nova Twins cumulent tout de même deux albums et trois EPs. A voir si, dans le futur, les sets s'allongeront à mesure que le répertoire se garnira, ou si le tour d'horloge représente le maximum de ce que les Nova Twins peuvent tenir à ce niveau d'intensité. On ressort en tout cas de cette soirée épuisé et défoulé, avec le sentiment d'appartenir à un combat qui dépasse le cadre de la musique, un combat pour toutes les inclusions, pour toutes les différences, car autant Dream Nails que Nova Twins se battent pour exister telles qu'elles sont dans l'industrie musicale, et pour inspirer celles et ceux qui se cherchent, car on n'arrête jamais vraiment de se chercher. Et comme le chantait le Suprême NTM, ici-bas, plus qu'ailleurs, la survie est un combat.
setlist
    DREAM NAILS
    Geraniums
    They/Them
    Women And Non-Binary People To The Front (Skit)
    Case Dismissed
    Prevenge
    Monster
    Good Guy
    Ballpit
    Jillian

    NOVA TWINS
    Fire & Ice
    Cleopatra
    Toolbox
    Wave
    Puzzles
    Taxi
    K.M.B.
    Losing Sleep
    Play Fair
    Sleep Paralysis
    ---
    Antagonist
    Undertaker
    Choose Your Fighter
photos du concert
    Du même artiste