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LUMER

Paris, Petit Bain - 11 juin 2023

Live-report par Adonis Didier

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Vous nous connaissez chez Sound of Violence, lorsqu'arrivent les grandes chaleurs, que vient le temps d'enfiler chemisette et short à fleurs, c'est le moment précis choisi par les vampiriques chroniqueurs de l'underground anglais pour s'éloigner des terrasses emplies de jeunes cadres dynamiques et autres altermondialistes en sarouel payés des fortunes dans des start-ups écolos destinées à faire faillite, et aller se terrer dans les repaires les plus sombres et rafraîchissants que possède l'ouest parisien, a.k.a le centre culturel de la France, désolé les Toulousains.
Ainsi, quoi de mieux que la cale d'une péniche pour vivre l'expérience rock n'roll à fond, dans des conditions proches de celles d'un poivron dans un réfrigérateur, comprenez qu'il fait actuellement cinq degrés Celsius au Petit Bain, et qu'on y voit un peu que dalle. Aziz ! Lumière ! Une demande qu'il aurait fallu formuler d'un air moins snob et moins anglais, mais faute de lumière on aura tout de même LUMER, les quatre garçons « post-punk » de Hull dans le Yorkshire, ce qui est, vous en conviendrez, moins sale mais aussi nettement moins drôle que Hulk dans le Yorkshire.


Un concert qui, pour en revenir à la musique, démarre devant une salle aussi vide que si je venais d'y jouer mon tout nouveau stand-up, sobrement intitulé les Avengers prennent leur élan, mais en même temps on est dimanche soir, un 11 juin, et il fait encore bien beau et chaud sur le quai François Mauriac. Trop beau et trop chaud pour que les habituels fans de rock puissent esquiver le traquenard guinguette en bord de Seine, mais la faiblesse des uns faisant le bonheur des autres, ça ne fera que plus de guitaristes moustachus pour nous ce soir.
Un guitariste moustachu du nom de Benjamin Jackson fait son entrée autour de 21h15, accompagné du batteur Will Evans, du bassiste aux airs d'irlandais Benjamin Morrod (si vous vous demandez ce qu'est un air irlandais, c'est que vous n'avez pas vu assez d'irlandais), et du chanteur gominé en costume italien, l'immanquable Alex Evans. LUMER, un groupe encore aujourd'hui à cheval entre le post-punk et un rock sale, lourd, bluesy, ou devrait-t-on dire le cul entre deux chaises, tant les intentions du groupe semblent parfois diamétralement opposées, et ce n'est pas le concert qui dira le contraire.

Un concert entamé dans la phase post-punk du groupe, avec la basse comme élément central, elle qui dame la route sur Blood On Suits, qui secoue la péniche de haut en bas sur English Dream, qui soude à l'arc électrique les stridents cris de guitare et le crooning hurleur assumé d'Alex Evans, dont la gomina n'était visiblement pas fixation béton. Un Alex plongé dans l'écho une chanson sur deux, dont la gouaille ne suffira pas à maintenir la fougue d'un concert qui ronronnera dans sa formule jusqu'à l'arrivée de la dévastatrice First Is Too Late. Pas forcément aidés par un public plutôt épars, même si de bonne volonté, c'est réellement la fin du set qui permettra aux quatre lads de l'estuaire de l'Humber de graver dans nos petites têtes blondes leur image de ravageurs de scène aux chaînes en or qui brillent.


Tout d'abord, Hatred Is A Passion Of Theirs, qui déclenchera presque un pogo parmi les six personnes présentes au premier rang, un exploit, et puis le rappel, et là on rentre dans le rock n'roll, le vrai, celui qui tâche et qui met les mains dans le cambouis, perdu dans un vieux bouge de l'Arizona, le V2 de la Harley bouillantissime sur le parking du diner's. Le combo She's Innocent/Another Day At The Zoo déploie une puissance qui suffirait à propulser le Petit Bain sur la lune, une lune bien sexy en plein strip devant laquelle se déhanche un Alex Evans au costume de moins en moins boutonné. Suivant le mouvement, les têtes s'agitent d'arrière en avant pour célébrer un groupe dont on aimerait qu'il ne nous sorte que des bombasses de cette envergure, quitte à abandonner une vague post-punk déjà pleine à craquer pour d'autres horizons ou d'autres mers.

Et comme Alex Evans nous a parlé toute la soirée en français, on se permettra de lui faire remarquer que LUMER en verlan ça fait Merlu, alors pourquoi ne pas nager un peu plus à contre-courant des mouvements punk et rock actuels, un sens qui semble leur convenir à merveille, on s'osera même à dire qu'ils s'y sentent... comme des poissons dans l'eau.
setlist
    Blood On Suits
    I Can't Say
    English Dream
    Against Ourselves
    Crucify
    Nightmare Without End
    By Her Teeth
    The Sheets
    First Is Too Late
    Hatred Is A Passion Of Theirs
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    She's Innocent
    Another Day At The Zoo
photos du concert
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