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Miles Kane

Paris, Gibert Joseph - 11 novembre 2023

Live-report par Jordan Meynard

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L'affection qui lie Miles Kane à son public français ne s'est - une nouvelle fois - pas démentie. Attendu dans l'Hexagone en 2024 pour une série de sept concerts s'inscrivant dans le cadre de la tournée de son nouvel album One Man Band, le scouser a fait un crochet par Paris, répondant ainsi à l'invitation de la boutique Gibert Disc du 6ème arrondissement, pour donner un showcase sur réservation, le tout suivi d'une séance de dédicaces. Une initiative aussi étonnante qu'appréciée pour un artiste si installé dans le paysage musical rock britannique.

Et pourtant, tout n'avait pas bien commencé. Le magasin Gibert, pourtant habitué à organiser ce genre de rencontres, s'est visiblement laissé dépasser par l'événement. Il faut dire qu'avec plusieurs centaines de réservations enregistrées (200 à 300 selon les sources), la célèbre enseigne a dû pousser les murs et semblait complètement déboussolée pour gérer l'important flux humain du jour confiné dans son espace disques au sous-sol - au grand dam des personnes arrivées de bonne heure qui ont complètement été lésées. Une désorganisation totale à laquelle s'ajoute un agencement de scène des plus étranges et un retard d'une heure sur le programme indiqué. Les plus renseignés informent leurs compagnons d'infortunes : Miles Kane aurait raté son Eurostar et serait même malade. De quoi nourrir quelques inquiétudes dans une atmosphère littéralement étouffante due au nombre de spectateurs présents.

Le délai indiqué est finalement respecté et Miles Kane fait irruption dans un magasin où la jauge du jour se rapproche plus de celle d'une salle de concert que d'un lieu pour acheter ses disques préférés. Sourire aux lèvres, il salue chaleureusement les spectateurs, avant de faire un crochet par les loges poser ses affaires et revenir ni une ni deux, bière à la main, affublé de son traditionnel polo. Accompagné par le batteur et percussionniste Liam Toon (Ethan P. Flynn, Anne Marie, slowthai), Miles Kane démarre son set avec un des tubes de son premier album Colour Of The Trap (2011), Rearrange. Le public, pourtant venu en nombre, se montre timide et peine même à se faire entendre sur le refrain pourtant si simple et efficace. Pas de quoi déstabiliser le chanteur anglais avec l'interprétation de Troubled Son, premier single de son nouveau disque One Band Band. Visiblement emprunté, bien qu'il n'ait pas confirmé être souffrant, la voix nasillarde et si puissante de Kane, demeure inchangée. Il est d'ailleurs très intéressant de le voir nous offrir ses chansons si accrocheuses dans une version brute et dépouillée, sans superflu, loin des excès scéniques qui le caractérisent.

La demi-surprise arrive ensuite : le British propose une reprise de son side project The Last Shadow Puppets, fruit de sa collaboration avec le leader des Arctic Monkeys, Alex Turner, pour le plus grand plaisir des personnes présentes. On regrette un petit peu cette marque d'enthousiasme démesurée par rapport aux chansons du répertoire solo de l'artiste. Les plus indélicats réclament même d'autres titres du supergroupe en scandant le nom The Meeting Place, présent également sur The Age Of The Understatement (2008), entre deux chansons. Il y a fort à parier qu'on rappelle souvent à Miles Kane sa filiation avec le leader des Arctic Monkeys et nous trouvons d'autant plus dommage de réitérer cette indélicatesse dans un cadre aussi intime.

Le spectre de Turner continue de planer dans les rayons du disquaire avec Colour Of The Trap avant de faire un nouveau grand-écart temporel entre ses albums et jouer Baggio, un titre écrit en hommage à la légende du football italien Roberto Baggio que Kane a découvert à la télévision lors de la Coupe du monde de 1994. On regrette sur le moment le son métallique de la guitare Martin du chanteur (la faute à des cordes qui n'ont pas été changées depuis un petit moment ?) empiétant forcément un peu sur le rendu de ses morceaux interprétés dans leur plus simple appareil. On apprécie aussi cette imperfection, tout comme les erreurs de synchronisation entre Kane et Toon, nous replongeant à un certain amateurisme des débuts - époque qui semble bien lointaine compte-tenu du rang qu'occupe Kane sur la scène musicale actuelle. À l'instar de ses « vrais » concerts, le show se conclut avec Come Closer, un de ses titres les plus nerveux et aguicheurs pour le plus grand plaisir de son parterre d'invités.

Miles Kane finit son après-midi parisien dans une salle surchauffée par la chaleur humaine, le front perlé de sueur. Il s'en suit une une séance de dédicaces - là aussi dans une désorganisation des plus totales, bien qu'elle aussi était prévue à l'avance - de son dernier album, mais aussi de quelques raretés de ses projets passés. L'occasion également d'échanger avec lui quelques poignées de mains chaleureuses et autres bons mots avec toujours une anecdote qui le fait sourire et semble parfois même le toucher. Une connexion, voire une dévotion, avec ses fans français à n'en pas douter, lui qui a tenu à faire ce petit showcase et qui venait à l'origine pour le tournage d'une émission télévisée finalement annulée. On en revient presque à regretter qu'une frange (une majorité ?) ne lui rende pas le change en s'intéressant à son projet des Last Shadow Puppets plutôt qu'à ses propres travaux. Ceux qui se sentent concernés pourront se rattraper à son concert full band à la Cigale au mois de février, puis en solo en mars à Nîmes, Toulouse, La Rochelle, Nantes, Caen et Lille.
setlist
    Rearrange
    Troubled Son
    Standing Next To Me (The Last Shadow Puppets cover)
    Colour Of The Strap
    Baggio
    Come Closer
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