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Baxter Dury

Paris, La Gaîté Lyrique - 25 octobre 2025

Live-report par Laetitia Mavrel

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Happy Birthday au ARTE Concert Festival ! Des dixièmes bougies soufflées pour le festival dédié à l'éclectisme et au charme parisien, les festivités se déroulant à la Gaîté Lyrique, lieu en lui-même pivot de la scène culturelle ouverte et éclairée de notre capitale.


Après de longs mois en berne à la suite de l'occupation des lieux et à une remise en état difficile, nous retrouvons avec plaisir la grande salle ici transformée en studio télé avec scène ronde et centrale, permettant un visu à 360 degrés pour tous les spectateurs et des lumières du plus bel effet à la caméra. Pour cette seconde soirée, c'est à la suite du désistement de James Blake que nous pouvons profiter avec régal de la venue de notre dandy londonien préféré, Baxter Dury. Nous remercierons donc très respectueusement les déconvenues de l'absent du soir car le haut niveau d'Allbarone, dernier album de l'anglais sorti en cette rentrée des classes, n'a fait que nous faire saliver en attendant la prochaine tournée prévue en décembre. Un avant-goût du nouveau millésime 2025, tant ce dernier tel un caméléon sait se transformer selon les teintes que prennent ses compositions. Pour Allbarone, c'est un Baxter DJ, roi du dancefloor et des clubs privés les plus huppés qui nous attend. Le disque amorçant un virage electro conséquent, le « slumlord » de The Night Chancers a maintenu toutes ces breloques dorées et vulgaires pour entamer une reconversion en roi de la nuit.


La soirée débute avec Camille Yembé, artiste belgo-congolaise. Petit souci d'organisation, le concert de la musicienne se déroulant dans une salle en sous-sol dont nous ignorions l'existence, c'est donc aux portes de la grande salle que nous avons patienté en assistant au récital de Sumana, jeune guitariste folk parrainée par la RATP en tant que musicienne du métro. Dans un hall de plus en plus bruyant avec sa faune de festivaliers accrochés au bar comme si sa vie en dépendait, l'artiste ne se démonte absolument pas et embrasse avec beaucoup d'humilité cette belle opportunité de se produire ailleurs que dans un couloir de ligne de métro un peu sombre et probablement encore plus chaotique. Une jolie mise en bouche avant de pénétrer dans la grande salle, qui a revêtu ses plus beaux atours pour cette captation. Pour permettre une vue optimale, de grands panneaux miroirs surmontent la scène et le lightshow se veut impressionnant, à base de longs rayons lumineux et de différents jeux d'optiques.


C'est avec toute cette sophistication que nous découvrons Sudan Archives, américaine originaire de l'Illinois armée d'un violon électrique, d'une tenue d'archère rouge et d'un set hyper pop assez impressionnant. Mêlant influences classiques, electro et hip-hop, c'est un sacré mélange qui nous est offert, avec une musicienne rayonnante, affirmée, qui ne cesse de sourire et de jouer avec son public. Présente pour la sortie de son troisième album intitulé The BPM, c'est à un rythme soutenu que Sudan Archives auront mené le beat pour une prestation visuelle plus que réussie, qu'il nous tarde de découvrir sur les écrans.

Mais ce soir, la vedette est masculine, cinquantenaire, grisonnante, fagotée tel un dandy de supermarché mais dotée d'un charisme désarmant. Baxter Dury prend donc possession de la scène, accompagné d'un batteur, d'un bassiste et à nouveau de Fabienne Débarre au clavier et au chant, pour sa toute première interprétation française de Allbarone. De l'époque précédente, Baxter Dury a gardé les bijoux en toc dorés et en strass, avec colliers et bagouzes du plus mauvais goût. Le costume en tweed marron clair plutôt mal taillé semble tout droit sorti d'une friperie et renforce le côté presque navrant de ce personnage qu'entretient le musicien dans ses chansons et sur scène. N'arborant jamais un look qui le mettrait réellement en valeur, Baxter Dury s'amuse avec cette image de charmeur de pacotille et cela permet toutes les pauses ridicules et surjouées sur scène, pour le plus grand plaisir des fans présents.


L'accent cockney est bien là, le spoken word aussi, et l'exubérance rend les nouveaux titres taillés pour les nightclubs encore plus fascinants. Imaginez votre prof de lettres ou votre comptable en train de se dandiner nonchalamment sur une piste de danse dans son costume du dimanche et vous obtenez cette incarnation hautement satirique mais désespérément attirante. Car ici réside toute la force de Baxter Dury : se moquer de lui-même, de cette image de séducteur qui lui a collé aux baskets sur ses premiers disques et surtout posséder le don pour des collaborations de prestige avec les plus grands producteurs. Pour ce virage presque disco, c'est Paul Epworth qui a rendu compatible les comptines pisse vinaigre de Baxter Dury avec le monde des clubbeurs. Ce soir, la mise en scène très sophistiquée du plateau télé plonge les heureux spectateurs dans un univers de fête privée, toutes et tous faisant rapidement tomber les vestes pour se mettre à danser autour de l'anglais, qui semble se galvaniser de cet accueil très enthousiaste.

Les versions d'Allbarone, Alpha Dog, Hapsburg ou Mockingjay sont taillées pour le live, la batterie et la grosse ligne de basse bien groovy rendant le tout très enivrant. Un petit détour par ses précédents albums nous permet de confirmer que Baxter Dury change de veste aussi vite que de style, on retrouve avec beaucoup de plaisir le monument de sensualité qu'est I'm Not Your Dog sous un déluge d'effets stroboscopiques bleu et rouge interdit à toute personne épileptique, et les morceaux qui ont forgé sa réputation de dandy tels Miami, Cocaine Man, Prince Of Tears et Palm Trees, devenus des classiques depuis. Durant tout le set, c'est un Baxter Dury qui viendra se poster devant tous les spectateurs dans des poses aguicheuses à la limite de la singerie, incarnant à merveille ce personnage de mauvais goût qui, ironie du sort, nous fascine.

Une setlist digne d'un concert classique, une parfaite mise en bouche avant la tournée française prévue en décembre prochain, ce set de Baxter Dury au ARTE Concert Festival aura clôturé de la façon la plus rocambolesque cette dixième édition. Les gros rhumes des uns font définitivement le bonheur des autres.
setlist
    Alpha Dog
    Hapsburg
    The Night Chancers
    Mockingjay
    Almond Milk
    OI
    Aylesbury Boy
    I’m Not Your Dog
    Return Of The Sharp Heads
    Kubla Khan
    Pleasure
    Palm Trees
    Miami
    Cocaine Man
    Allbarone
    Schadenfreude
    These Are My Friends
    Mr W4
    Celebrate Me
    Prince Of Tears
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