Joe Goddard

C’est avec vigueur que les trompes de chasse ont résonné pour annoncer la belle nouvelle que voilà : l’ours Goddard s’est décidé à sortir de sa tanière, un nouvel EP fermement calé dans le creux de ses bras velus. Membre de Hot Chip, moitié de 2Bears, auteur de mixes divers et variés (dont celui signé à quatre mains avec Full Nelson, et qui accompagnait le 143ème numéro du magazine Trax), le ventripotent personnage n’avait rien sorti sous son nom propre depuis l'Harvest Festival en 2009. Sans aller jusqu’à dire que son absence nous était insupportable, on ne pouvait que se réjouir à l’idée d’écouter les nouveaux bidouillages du père Joe.

On s’en félicite d’autant plus que ce nouveau disque n’est pas venu les mains vides. En début de course pourtant, difficile de ne pas appréhender ce qui s’annonce être une collaboration douteuse avec une énième chanteuse de seconde zone. Surprise, Gabriel étonne par sa capacité à télescoper sans faute de goût manifeste la house et le R&B : parsemé de touches orientales, de chœurs d’église et de poussières hotchipiennes (il y a du I Feel Better dans l’air), le morceau réussit là où le Wildfire de SBTRKT se vautrait passablement il y a quelques semaines déjà.
Ce n’est qu’un peu plus loin que l’on pourra goûter au chant délicieusement vocodé de Joe Goddard : moins épique que son prédécesseur, All I Know revêt les traits d’une ballade mélancolique et house joliment produite, bien que trop longuette pour prétendre captiver (on frôle les dix minutes). Reste que ça passe tout seul, et qu’il y a toujours un petit quelque chose pour nous éviter de piquer du nez. Ultime originalité, abstraction faire du morceau de fin de disque, un remix dub et boursouflé de Gabriel (dont certaines intonations rappellent le Delicacies des Simian Mobile Disco), Jump s’étend lui aussi plus que de raison, et ce même si sa rythmique primaire à souhait produit de belles choses, dans sa dernière ligne droite notamment.

Doté de belles couleurs, Gabriel s’apprécie donc comme une lichette de bon vin, tout rempli qu’il est de morceaux agréables à défaut d’être mystifiants. Joe Goddard n’est peut-être pas un génie, mais c’est décidément un bonhomme bien attachant.