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Gallon Drunk

The Soul Of The Hour

Gallon Drunk - The Soul Of The Hour
Chronique Album
Date de sortie : 10.03.2014
Label : Clouds Hill/Differ-ant
35
Rédigé par Olivier Kalousdian, le 4 mars 2014
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Il y a des groupes dont l'intégrité, la carrière et l'attitude irréprochables n'ont jamais quitté les esprits malgré de longues années d'activité. Après le très bon The Road Gets Darker From Here sorti en 2012 et dépeint dans la presse spécialisée comme un disque de swamp rock exaltant et suintant, Gallon Drunk ne lâchent rien et reviennent moins d'un an et demi après pour un huitième album studio dégoulinant d'un rock sans concession, The Soul Of The Hour.

Ce titre d'album, ambiguë et pesant comme un titre de roman de Bret Easton Ellis ou Cormac McCarthy, renforce les Gallon Drunk dans ce qu'il savent faire de mieux : imposer une ambiance marécageuse où l'asphalte et la vase se confondent à l'horizon d'une contrée qu'on aime, à tort ou où raison, situer aux Etats-Unis à l'âge d'or de l'American way of life et tous les affres et mensonges que celle-ci colporte depuis les années cinquante. Dans une collaboration intégrant un nouveau bassiste, Leo Kurunis et le producteur Johann Scheerer, Gallon Drunk débâtent, titre après titre du poids de l'existence, jour après jour, dans une œuvre enregistrée au studio de Clouds Hill, à Hamburg.

Le titre, aux trois-quarts instrumental, introduisant l'album – un long et sombre, Before The Fire de plus de neuf minutes – et son lourd piano doublé de percussions quasi jazzy, semble tout droit sorti des ballades meurtrières d'un Nick Cave & The Bad Seeds au sommet de leur période bayou et dont James Johnston, rappelons-le, fut membre à part entière. Il n'y a qu'à voir le clip video du titre, tout juste sorti sur Youtube, pour se rendre compte que la campagne anglaise peut être toute aussi angoissante que les marécages américains et que les rencontres qui s'y font peuvent être toutes aussi étranges que dans un killer movie made in USA. La tension est installée et bien installée : ce ne sera pas du 110, mais bien du 220 volts européen, tout au long du disque.
De quoi alimenter et faire briller dans la pénombre l'explosif titre qui s'ensuit, The Dumb Room. Le moins que l'on puisse dire, c'est que James Johnston donne ici de la voix sur ce titre quasi punk rock ; une voix poussée à la limite de la rupture, tel un Jim Jones dans des œuvres rockabilly. Sur The Exit Sign, ce même James Johnston se met en retrait et laisse le clavier Hammond mener la marche du temps sur un titre efficace à trois accords de guitare et un seul tempo de batterie. Comme le disait Olivier Gourmet dans le road movie Robert Michtum Est Mort : « Le rock, ce sont des accords primaires, sans solo et tout dans la saturation, le reste c'est de la fioriture ! ».

Mais c'est sur le titre suivant, The Soul Of The Hour que l'on comprend mieux où le groupe veut nous amener. En sept minutes ou presque, Gallon Drunk explorent tous les registres qui ont fait leur réputation : une intro guitare/batterie lancinante et inquiétante ; une basse glissée qui vient alourdir le récit au bout d'une minute trente pour laisser plus de place à la deuxième guitare en appui de riffs tout en souplesse d'abord et une voix qui se retient… jusqu'au milieu de ce titre phare où, après un très court break, la petite armée change de tactique, appuyée dans son avancée par des cuivres stridents qui sonnent la charge de la cavalerie, toute gorge déployée cette fois-ci et tambours en avant. Ce qui semblait être un thriller de plus dans la collection noire du punk rock se transforme en épopée d'un bataille rageuse qui, comme l'armée des sept nations en son temps, laissera un lourd nuage de poussières virevolter dans l'air et nos oreilles pendant un long moment.
La transition est parfaite pour le titre Dust In The Light dont le calme relatif laisse le temps aux brancardiers d'évacuer les blessés du champ de bataille. Over And Over et The Speed Of Fear qui ferment la marche d'un album de sept titres à peine (mais d'un total de quarante-trois minutes tout de même) semblent là pour tirer le bilan de cette débauche d'énergie qui, ici, relate notamment la question existentielle qui doit être la même pour tout groupe qui a su traverser les décennies avec une régularité artistique rare et à laquelle peu ont survécu. Un état des lieux conclu par ce titre rageur, construit sur la même architecture que ceux qui le précédent : peu d'accords, de breaks ou de mélodies, mais un tempo et des riffs qui se répètent pendant six minutes dans un rock élémentaire à quatre temps et à la puissance exponentielle.

Un style qui n'appartient qu'aux Gallon Drunk et qui anime, une fois de plus, notre malin plaisir en écoutant, années après années, s'affirmer le travail de James Johnston et sa bande pour en tirer la substantielle moelle qui habite la vie, qui est ici tout sauf un long fleuve tranquille, et le rock qui, heureusement, l'accompagne.
tracklisting
    01. Before The Fire
  • 02. The Dumb Room
  • 03. The Exit Sign
  • 04. The Soul Of The Hour
  • 05. Dust In The Light
  • 06. Over And Over
  • 07. The Speed Of Fear
titres conseillés
    Before The Fire - The Soul Of The Hour - The Speed Of Fear
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