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William Doyle

Total Strife Forever

William Doyle - Total Strife Forever
Chronique Album
Date de sortie : 13.01.2014
Label : Stolen Recordings
3
Rédigé par Kris, le 11 mars 2014
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Définitivement, l'ascension fulgurante du synthétisme gothique de James Blake aura fait ses émules parmi la nouvelle génération d'artistes anglais. Bien que l'on entende sur ce premier album, Total Strife Forever, les influences directes du classicisme de Brian Eno, le psychédélisme de Fuck Buttons, ou le tabassement d'un Four Tet, c'est bien dans les élévations mutuelles des mélodies et du chant new wave de William Doyle que viennent se lover les plus grandes tendresses musicales du projet East India Youth.

Alors que le processus de création fût long et réfléchi pour le jeune producteur anglais (trois ans d'écriture), ce debut album qui fait suite à l'EP Hostel sorti l'année passé, Total Strife Forever - en référence antithétique au Total Life Forever de Foals – plonge tout un pan de la pop électronique dans une brume tantôt délétère, tantôt lumineuse, sans que finalement que cette association n'aboutisse à de véritables éclats, chocs ou rencontres étincelantes. Il y a une linéarité confondante, bien souvent trop guidée par une volonté de véhiculer idées et concepts précis, quitte à esquisser des desseins bien trop affinés pour ne pouvoir en garder ses reliefs les plus pertinents.

Il y a de la vie dans la musique d'East India Youth. Il y a même énormément de mouvements organiques dans Total Strife Forever. Plus Aphex Twin qu'Andrew Weatherall, le jeune premier dessine ses plans synthétiques avec beaucoup de minutie, et avec une belle touche d'orfèvre. Les pistes homonymes Total Strife Forever I-IV viennent ainsi ponctuer tout l'album de leurs belles et délicates plages granuleuses et presque langoureuses. Le problème se pose ainsi dans les interstices. Comme toujours dans la vie serait-on tenté de dire finalement. À vouloir trop parfaire son concept, et découper son album par phases bien déterminées, William Doyle y perd en lien, y perd toute transition naturelle, où tout tend à se fondre l'un dans l'autre, où chaque piste semble à la fois appartenir à ses congénères, mais ne pourrait aucunement être déplacée ; où la transition se veut maîtresse d'une unité bien plus grande que ces quelques minutes qu'elle ne peut prendre.

On assiste donc à une prometteuse entrée en matière avec un triptyque enlacé : Glitter Recession/Total Strife Forever I/Hinterland. Car ce sera bien cette première partie qui retiendra le plus notre attention avec une aventure aux allures de virée nocturne dans les jungles urbaines et modernes de l'industriel. Doyle s'y affirme comme fin suiveur de Fuck Buttons et d'électro de cage, faite pour résonner dans les plus grands clubs du monde entier. Alors fortement prometteur en termes de productions techno soutenues et rythmées, East India Youth s'enlise par la suite dans des contrées bien plus dangereuses, celles d'une dream-pop éthérée aux accents synthétiques. Mais comme il sera assez aisé de s'en rendre compte, les laptop production de Doyle peinent à prendre l'ampleur lyrique d'un Beach House, ou la gravité romantico-nihiliste d'un James Blake. Ainsi, les titres que le jeune Anglais habillera de sa voix frêle et inhabité, demeureront malheureusement d'insurmontables temps faibles (Heaven How Long, Looking For Someone) laissant une délicate impression d'hétérogénéité, d'un album aux deux visages peinant à se laisser amadouer.

Les fulgurances ne suffisent plus à une époque où le rêve n'habite plus. Que rutile la transcendance.
tracklisting
    01. Glitter Recession
  • 02. Total Strife Forever I
  • 03. Dripping Down
  • 04. Hinterland
  • 05. Heaven, How Long
  • 06. Total Strife Forever II
  • 07. Looking For Someone
  • 08. Midnight Koto
  • 09. Total Strife Forever III
  • 10. Song For A Granular Piano
  • 11. Total Strife Forever IV
titres conseillés
    Hinterland, Total Strife Forever I, Glitter Recession
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