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Porridge Radio

Every Bad

Porridge Radio - Every Bad
Chronique Album
Date de sortie : 13.03.2020
Label : Secretly Canadian
5
Rédigé par Bertrand Corbaton, le 10 mars 2020
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Habiter sous le soleil ou en bord de mer n'exempte pas forcément des affres de l'âme. Cette remarque semble s'appliquer à Dana Margolin, tête pensante de Porridge Radio. Cette dernière a commencé à se faire connaître en arpentant les petites salles de la cité balnéaire de Brighton. Elle y déclamait son malaise accompagnée de sa guitare devant un public local que l'on imagine dubitatif devant tant de peine.
La rencontre avec Georgie Stott aux claviers, le batteur Sam Yardley et surtout la bassiste Maddie Ryall vont permettre à Dana de repousser les limites d'expression que lui imposent les pérégrinations en solo. On est en 2015, Porridge Radio est né. La formation enchaîne les compositions et sort Rice, Pasta And Other Fillers un an plus tard. Ce premier essai pose les bases de l'album qui nous intéresse aujourd'hui.

Disons-le immédiatement, Every Bad est une merveille. Ce voyage de onze pièces au travers des sentiments existentialistes de Dana Margolin est d'une densité rare. Dès Born Confused, le groupe annonce une pop rock travaillée et bien ciselée qui vous bouscule et ne vous laissera tranquille qu'à la fin de la montée progressive et compacte de Homecoming Song, dernier bijou de l'album.
La voix grave de Dana Margolin apporte un peu de chaleur à des paroles souvent mélancoliques. Régulièrement, elle martèle des phrases qu'elle répète à l'infini pour qu'ils pénètrent votre esprit et n'en sortent plus.

Le groupe se distingue dans les compositions spleenétiques et directes. A cet égard, Sweet et Long sont des diamants savamment travaillés. Le single Sweet est un morceau inquiétant qui malmène l'auditeur et ne lui laisse pas de répit. L'alternance des moments calmes et brutaux qui structurent le titre est schizophrénique. Sur Long, l'auditeur est emporté par la montée régulière qui renforce la langueur transpirant de l'ensemble, alors que la guitare claire vous lacère les sens. Ces deux morceaux sont d'un esthétisme bien distinct, mais portent en eux le sceau d'une même mélancolie.

Sur Nephews et surtout Lilac, Porridge Radio se plaîsent à vous emporter comme des brindilles dans le vent. Ces deux morceaux, d'apparence calmes, s'emballent crescendo. Pour vous submerger, le groupe utilise divers stratagèmes. La tension sur Sweet, ou Long, ou la richesse des mélodies. Pour exemple, Born Confused, comme Lilac, jouit d'une orchestration discrète du meilleur effet qui embellissent le thème. Ce Lilac est réellement magnifique, il se dégage un sentiment de contemplation mis en exergue par les choeurs. Puis la dernière minute du morceau est comme une vague qui vient vous happer depuis le bord de mer.
Porridge Radio savent aussi naviguer sur des eaux plus calmes. Ainsi, sur la balade Pop Song, le thème simple et apaisé accompagne magnifiquement le chant désabusé. Circling est doté d'une mélodie forte, son côté dépressif est sublimé par l'arrivée des claviers froids sur ce faux air de valse. Sur ce morceau, le groupe fait jaillir la lumière de la mélancolie. Brillant.
Ces deux titres en particuliers démontrent que le groupe ne se laisse pas enfermer dans un style ou une recette qu'il déclinerait jusqu'à plus soif. Pourtant, l'intensité est similaire quelle que soit la structure ou l'ambiance, et c'est bien là le tour de force réalisé par le groupe. Give Take, pourtant plus inoffensif et léger, trouve lui aussi totalement sa place dans l'album, et permet même une respiration salvatrice dans ce dédale émotionnel intense.

Every Bad a en lui un côté abrupt jouissif. Tout fonctionne et on se laisse emporter sans difficulté tant l'ensemble est brillamment construit et réalisé. Porridge Radio n'en font jamais trop. Tout tombe parfaitement sous le sens. Il en ressort un album mélancolique fort, puissant, totalement cohérent, doté d'une personnalité qui lui est propre.

Porridge Radio pourraient frapper un grand coup avec cet album et il serait dommage pour vous de passer à côté. Ces chansons existentialistes dégagent une maturité impressionnante et vous frappent en pleine face. Vraiment, il faut s'attarder sur Every Bad et garder à l'oeil l'évolution de la bande de Dana Margolin. A commencer par essayer de voir ce que vaut le groupe sur scène, à l'occasion de ses dates françaises à partir de mai de cette année.
tracklisting
    01. Born Confused
  • 02. Sweet
  • 03. Don't Ask Me Twice
  • 04. Long
  • 05. Nephews
  • 06. Pop Song
  • 07. Give/Take
  • 08. Lilac
  • 09. Circling
  • 10. (Something)
  • 11. Homecoming Song
titres conseillés
    Sweet, Long, Circling, Lilac
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