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Jamie Lidell

Interview publiée par Pierre-Arnaud Jonard le 21 octobre 2016

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Building A Beginning, le nouvel album de Jamie Lidell, est un disque qui respire le bonheur. Un disque de soul majestueuse digne des maîtres du genre. Rencontre avec un musicien comblé et un homme délicieux.

Tu as dit que ce disque a été composé sous l'influence de Stevie Wonder. D'où te vient cet amour pour la soul ?

C'est marrant parce que mon obsession pour la soul a commencé très jeune. Je n'ai pas grandi à Londres où il y avait plein de musiques différentes, des groupes comme les Clash, mais dans un village. Je n'écoutais que la radio. C'est peut être à cause de Michael Jackson. J'avais six ans lorsque est sorti Off The Wall, puis Thriller est arrivé quelques années plus tard. J'ai ensuite été obsédé par Prince, puis à travers lui, j'ai découvert Funkadelic, Sly And The Family Stone puis bien plus tard la soul classique à la Sam Cooke. C'est eux qui m'ont appris la musique et les disques, pas le fait d'aller chanter à l'église avec ma mère même si celle-ci chante par ailleurs.

Pour moi, la soul, c'est l'honnêteté.

Que représente la soul pour toi ?

Pour moi, la soul, c'est l'honnêteté. Le fait de chanter avec son cœur. C'est l'âme, que tu sois blanc, noir ou bleu. Ce peut être plein de musiques différentes, pas seulement la soul pure, ce peut être la musique gypsy qui pour moi est aussi de la soul.

En écoutant ton disque, on a l'impression que tu es l'homme le plus heureux sur terre...

Je me sens super heureux. J'ai tout ce que je veux, une famille, un enfant, mon propre label... Je peux faire ce que je veux, enregistrer quand je veux. En même temps, à la fin du disque, il y a quand même des morceaux plus mélancoliques.

Le disque célèbre l'amour. C'est ta femme qui t'a inspiré cela ?

Oui. En plus elle a écrit la plupart des paroles du disque. On avait déjà travaillé ensemble mais là cela a été une collaboration totale.

Tu te sens plus libre du fait d'avoir quitté Warp ?

Définitivement. Etre libéré de son contrat, c'est vraiment quelque chose de cool. Je leur devais encore un album mais je leur ai demandé si je pouvais partir et ils m'ont donné leur accord. C'était cool d'être chez Warp mais à la fin c'était devenu un peu répétitif. J'ai appris beaucoup chez eux, comment produire un disque notamment. J'ai tout appris au niveau de la musique durant mon temps là-bas.

C'était bizarre pour toi d'être un chanteur soul sur un label électronique ?

C'est devenu étrange. A la base ça ne l'était pas. Ils m'ont signé parce que je chantais Daddy's Car. En même temps, mon tout premier disque était très techno. Je m'amuse encore à jouer ce genre de musique dans mon temps libre. J'aime la techno car on y trouve l'énergie punk. C'est quelque chose de très positif.

Comment as-tu créé ton label ?

Les labels t'aident financièrement. Le côté flippant de créer son propre label c'est cet aspect, savoir si on va y arriver à ce niveau là. Mais en même temps, c'est à peu près la même chose puisque les labels te font une avance. Il est possible que dans le futur je produise d'autres artistes mais je ne veux pas être un salaud de producteur donc je ne le ferai que si tout le monde est gagnant. Pour un temps encore, je pense que je vais être le seul artiste de mon label.

Il n'y a pas de synthés sur ce disque ?

Il y en a un peu, sur quelques morceaux. Je les ai utilisés comme un orgue. Comme s'ils étaient de vrais instruments. J'adore la façon dont Stevie Wonder les utilise. Je me suis inspiré de ça. Et ça fonctionne.

Aujourd'hui, on peut recréer un super son 70's tout en utilisant les possibilités des studios actuels.

La production très moderne mais possède également un côté 70's...

J'adore la façon dont la batterie sonne sur les albums des années 70. Dans les années 80, elle est trop forte, produite trop en avant et dans les années 90, elle sonne fausse. J'ai voulu retrouver le son de la batterie des disques 70's. Cela sonne tellement bien cette batterie 70's avec un kick différent. Aujourd'hui, on peut recréer un super son 70's tout en utilisant les possibilités des studios actuels.

Les morceaux sont courts. Ce format trois minutes trente, celui de la pop classique, c'est celui auquel tu es attaché ?

Oui. J'aime ça. C'est vrai, tu as raison, j'aime ce format pop classique. Je n'y avais pas pensé mais c'est le format que j'aime. C'est aussi pour ne pas faire perdre de temps aux gens. Je pense qu'un morceau parfait doit être court. Je me sens avoir fait le job lorsque je fais des morceaux de trois minutes trente.

Tu as parlé de Stevie Wonder mais Otis Redding semble être aussi une influence pour ce disque, notamment sur In Love And Alone...

Il ne l'est pas directement. Mais je dois bien avouer avoir toujours cette soul classique en tête.

Le disque fait aussi penser à Prince. Sa mort t'a touché ?

Elle m'a d'abord énervé. Pourquoi cela est-il arrivé ? J'étais en colère en me disant pourquoi a-t-il menti, avoir dit qu'il était clean alors qu'il prenait des drogues. Et puis après cela j'ai été triste, très triste...

Tu as collaboré avec Feist, Mocky ou Gonzales. Pourquoi cet amour des musiciens canadiens ? Ils sont différents des anglais ?

C'est une approche différente de la musique, assez unique. Mocky est un musicien extraordinaire. C'est frustrant de travailler avec lui tellement il trouve les choses facilement. Il m'impressionne. Gonzales est un génie, lui aussi. J'aime les canadiens. Ils sont drôles et j'apprécie particulièrement leur humour.

Comment regardes-tu ta carrière rétrospectivement ?

J'aime tout ce que j'ai fait. J'ai eu de la chance car du fait que je devais gagner ma vie, j'ai joué dès mes débuts seul. J'ai appris beaucoup de choses ainsi, au niveau technique notamment. Et aujourd'hui, je continue d'être toujours aussi excité par la musique.