logo SOV

MONEY

Paris, Espace B - 30 mai 2013

Live-report par Julien Soullière

Bookmark and Share
Le temps est tout sauf radieux, aujourd’hui comme depuis plusieurs jours déjà, ce qui suffit sûrement à expliquer que l’on en vienne à traverser tout Paris dans une quête effrénée de chaleur; en accueillant MONEY en ses murs, l’Espace B rend à sa manière hommage au non-été qui s’annonce.

Stupeur et tremblements : il est un peu plus de 21h lorsque enfin nos semelles s’enfoncent dans la poussière cotonneuse qui recouvre le parquet de la salle, mais tout pousse à croire que notre arrivée coïncide avec l’heure du déjeuner un jour de semaine. Les convives se comptent sur les doigts d’une demi-main, et bien qu’il n’y ait ce soir aucune réelle problématique d’espace, ces derniers préfèrent rester collés les uns aux autres, à proximité du bar, soit à l’extrême opposé de la scène sur laquelle sont en train de s’affairer les jeunots de Cheers, qui nous demandent tout naturellement de nous approcher un peu, et puis finalement beaucoup. Ils sont sur le point de débuter leur set, et il n’y a rien de plus détestable que de jouer devant le seul néant.
Adolescents mais pas nés d’hier pour autant (anciens lauréats du Festival Rock The Gibus, SFR Jeunes Talents, Eurockéennes...), les quatre garçons savent comment s’y prendre pour tenir un public. L’expérience de la scène aidant, ils apparaissent ce soir comme décomplexés, bien droits dans leurs Converses, et porteurs d’un noise rock plein de candeur, aux mélodies simples, mais savamment troussées. Tout ceci est à polir, forcément, reste qu’on est toujours admiratif de voir ce que ces musiciens en herbe sont capables d’envoyer.

SOV

Au fur et à mesure, l’arrière salle de l’Espace B se remplit jusqu’à accueillir un public d’un gabarit finalement très convenable. Tandis que certains s’approchent du stand de merchandising pour mettre la main sur les EPs et autres posters gracieusement mis à disposition par Cheers, d’autres préfèrent se rapprocher du zinc pour tenter d’étancher leur soif. Ici et ailleurs dans la salle, les discussions vont alors bon train, et c’est dans cet écrin fertile qu’une voix se fait soudain plus haute que les autres, invoquant par la même le plus cristallin des silences : Jamie Lee, chanteur de MONEY, vient d’entonner une complainte qu’on imagine aisément signée par le poète russe Ivan Kozlov (dont le groupe s’inspire beaucoup), et se dirige vers l’estrade suivi de ses fidèles comparses.

Les yeux sont rivés vers la scène, certaines âmes en présence ne réalisant sûrement pas encore très bien ce qui s’y passe. L’incantation terminée, des applaudissements nourris résonnent dans la salle. Les musiciens ne s’en soucient guère, et c’est sans adresser un mot au public qu’ils s’emparent de leurs instruments. Dans la pénombre, regroupés au centre de la scène comme s’ils avaient cherché à se rassurer autour d’un feu, les membres du groupe débutent enfin leur set.

SOV

Précieuse, envoutante, cristalline, la pop mystique de MONEY va bercer les âmes plusieurs minutes durant. A bien écouter tout cela, on pense forcément aux Wild Beasts pour leur côté classieux et onirique, aux Maccabees également, la voix haut perchée de Jamie Lee rappelant à bien des égards celle d’Orlando Weeks. Sous le charme, l’assistance reste ce soir bien sage, s’interdisant la moindre inattention, la moindre impolitesse, la moindre envie de boire. Elle se risquera par contre à quelques applaudissements, profitant de très rares interludes pour remercier le groupe pour ce joli (mais diablement court) concert. Un groupe qui jamais ne cherchera d’autres interactions avec son public que celle que permet sa seule musique.

MONEY nous quittent comme ils sont arrivés. Sans esbroufe, ni réel artifice. C’est un groupe bien mystérieux que voilà, plus concerné par son art que pas son plan de carrière. On pourra trouver ça d’une rare modestie, ou, au contraire, y voir là une attitude incroyablement suffisante. Peu importe : ce soir, leur musique avait le pouvoir de conclure tous les débats du monde.