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Meanwhile
La Roux

Paris, Bataclan - 29 novembre 2014

Live-report par Olivier Kalousdian

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Aujourd'hui blonde vénitienne, comme son nom ne l'indique pas, La Roux est en France et compte bien enflammer les esprits et se jouer des préjugés dans le pays des libertés et des anti-mariage pour tous. Elly Jackson, de son vrai nom, est la fille d'une actrice de série réputée en Angleterre, Trudie Goodwin. Avec Ben Langmaid, elle forme le duo, La Roux en 2008. Signé d'abord sur Kitsuné pour un album éponyme, ils rejoignent ensuite Polydor pour la sortie du deuxième album, Trouble In Paradise, mais sans Ben Langmaid qui lui oppose alors une vision artistique différente.

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C'est dans un Bataclan plein à craquer en cette froide nuit de novembre que la soirée démarre sous des auspices made in 80's. Dégaines new wave, époque nouveaux romantiques, filles masculines, barbes hipster et pré-adolescents forment le gros des troupes. C'est à Meanwhile qu'incombe la difficile tache d'ouvrir la dance party du soir et de tenter de s'imposer, inconnu du grand public dans une salle totalement acquise à la partie principale. Tom Andrews, chanteur et leader du joyeux groupe de Londres, met toutes les chances de son coté en faisant une entrée remarquée, sautant à tout va comme pour mieux agiter ses cheveux mi longs peroxydés et coupés au carré. Un style que l'on n'avait plus vu en scène depuis... longtemps.
Mélange musical sympathique et dansant se positionnant entre Duran Duran et Prince, la musique de Meanwhile ose le synth funk débridé comme on ne l'avait plus entendu depuis... Blancmange ou Thomas Dolby. Si les références sont honorables, l'énergie non feinte et l'envie communicative (Tom Andrews séduit avec des messages dans un Français quasi sans accent, après avoir largement déconcerté le public) de Meanwhile qui parviendront, finalement, à faire remuer une partie du public auront du mal à imposer la soupe joyeuse proposée par des titres excessifs et racoleurs comme Bigger City ou Icarus. Seul Luvletta et son mimétisme Princier semble taillé pour les pistes de danse et quelques charts très axés pop music... Meanwhile le sait et ne manque pas de faire référence à l'impatience du public et à son désir de voir La Roux monter sur scène le plus rapidement possible.

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Captée par une armée de caméras et d'appareils photo numériques montés en travelling sur scène, la prestation de La Roux bénéficie ce soir des moyens déployés par un Martin Scorsese pour son documentaire rock Shine A Light, ou presque ! Lancé par un I Feel Love, chanté par Donna Summer et écrit par Giorgio Moroder, de circonstances – que ce soit au niveau du texte ou de la sonorité électro disco – le set de La Roux démarre sur Let Me Down Gently. Un titre qui se décompose en deux parties : une introduction lente suivie d'un break à blanc et d'une montée de rythmes et en puissance qui imposent l'ambiance électro chic de cette soirée. Pré-adolescents accompagnés de parents encore jeunes (et fans eux-mêmes), post-adolescents vêtus de jeans neige étriqués du plus mauvais goût (surtout quand on est amené à vivre cela deux fois en vingt ans !) et trentenaires hipster, le public massif du Bataclan n'est pas là pour méditer ou contempler, mais bien pour danser et même chanter en chœur les titres les plus connus de leur égérie au teint blafard. Récemment séparée de son alter égo masculin, La Roux capte pour elle toute la lumière ; quitte à éclipser, comme il est souvent de mise avec ces groupes uninominaux, la formation qui l'accompagne et qui, sous beaucoup d'aspects, emprunte beaucoup, elle aussi, aux tenues et aux styles scéniques du groupe qui officiait derrière Prince du temps de Sheila E.
Venue défendre son deuxième et dernier album en date, Trouble In Paradise, La Roux confirme sa fascination pour une époque qu'elle n'a pas vécue, les années 80 version strass et paillettes. Elle qui fut le souffre-douleur de son école à cause de son embonpoint, son physique pataud et androgyne et ses cheveux roux, semble prendre une sacrée revanche et démontre qu'il est possible de modifier, excessivement, l'image que l'on renvoie de soi en prenant soin de son look et, accessoirement, de son chirurgien esthétique. Il n'y a qu'à revoir ses premiers vidéo clips pour se convaincre que s'il fut un temps où seules une certaine catégorie de filles s'intéressait à elle, ce soir c'est toute la gente masculine qui reste bouche bée devant cette classieuse Annie Lennox des années 2010.

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Imitant des groupes androgynes – comme A Flock A Seagulls qui, en 1980, imposaient leur mode à Londres – à travers ses tenues excentriques et ses coupes de cheveux sans pareille, elle a réussi à imposer son style et sa musique à des millions d'auditeurs de par le monde en quelques titres seulement. Fascination, qui emprunte non seulement le titre, mais également les sonorités synthétiques à The Human League, sonne comme un hommage total à la new wave commerciale des années 80 ; Sexotheque navigue du coté du synth funk pendant que Cruel Sexuality et I'm Not Your Toy, extraits de son premier disque, confirment ses nouvelles bases à la pop synthétique anglaise. Des titres qui fleurent bon la méfiance envers les hommes et le féminisme jusqu'au boutiste (« Boy, your touches leave me mystified. I wish I could believe in you ») et qui ravissent les nombreux couples féminins de tout âge croisés ce soir. Sur des larges pas de danse chassés qui semblent avoir été brevetés par La Roux, le set défile sur un rythme qui semble constant et, parfois, sans coupure (Tropical Chancer puis Uptight Downtown), jusqu'à ce que le dernier titre du set, Silent Partner, ne déchaîne un cran au-dessus l'adhésion du public, enflammé par un final instrumental pendant lequel La Roux viendra doubler des percussions électroniques déjà très présentes.

Mais, c'est sur l'inévitable Bulletproof (les mauvaises langues diront qu'elle n'a pas fait mieux, depuis) joué en fin de rappel que le Bataclan va se transformer en véritable dancefloor, faisant remuer jusqu'aux balcons et offrant à Elly Jackson et son public venu saluer, une ovation, debout durant deux longues minutes. Un set à la hauteur des attentes placées en elle et une prestation mémorable pour les fans du genre. Pour un petit happy few, la soirée se terminera encore plus tard avec un aftershow à la Bellevilloise.
setlist
    MEANWHILE
    Non disponible

    LA ROUX
    Let Me Down Gently
    Fascination
    Kiss and Not Tell
    In for the Kill
    Quicksand
    Sexotheque
    Cruel Sexuality
    I'm Not Your Toy
    Tropical Chancer
    Uptight Downtown
    Colourless Colour
    Silent Partner
    ---
    Tigerlily
    Bulletproof
photos du concert
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