Rares sont les groupes sur lesquels vous pouvez compter à coup sûr pour passer une bonne soirée, quelque soit votre appréciation de leur dernier album ou le nombre de fois que vous l'avez vu dans votre vie. Hot Chip appartiennent sans aucun doute à cette catégorie. Malgré un huitième concert en l'espace de dix ans pour votre serviteur, la joie de les retrouver reste intacte. Cela tient sûrement à la qualité festive de leurs prestations mais aussi au soin qu'ils apportent à retravailler leurs vieux morceaux, si bien que chacun de leurs tubes et la façon dont ils sont insérés dans la setlist, voire même qu'ils se répondent, font tout le sel de leurs concerts là où tant d'autres formations se contentent de rabâcher leurs singles tournée après tournée.

Cette fois, c'est pourtant le morceau d'ouverture du nouvel album qui aura d'abord les faveurs du groupe, ce
Huarache Lights au gimmick vocodé obsédant. Rallongé ici d'une intro en forme de clin d'oeil house music, il prend une dimension plus chaleureuse que sur disque. Un retard à l'allumage de la guitare d'Al Doyle n'aura pas d'incidence trop importante sur le morceau. Sans attendre, Hot Chip dégaine
One Life Stand et déclenche les premiers cris d'excitation dans le public. L'enchaînement avec
Night & Day, extrait de l'avant-dernier album, fonctionne parfaitement : un DJ n'aurait pas mieux trouvé à mixer. D'habitude enclin aux excentricités vestimentaires, Alexis Taylor a cette fois opté pour une tenue plutôt sobre, à l'inverse de son complice Joe Goddard qui a opté pour une chemise à motifs digne d'un personnage des sitcoms AB Productions dans les années 90. Mais trêve de remarques fashion, on se remet à remuer avec deux titres issus de
Why Make Sense?, le classieux
Easy To Get et le très funky (presque R&B dans sa version live)
Started Right.

On en profite entre deux pas de danse pour remarquer qu'outre ses talents de batteuse, Sarah Jones offre quelques jolis choeurs féminins sur les refrains de ces deux morceaux. L'amour inconditionnel d'Alexis Taylor pour Prince est bien connu, nul doute qu'il a pensé en écrivant ces chansons aux groupes féminins produits par le nain pourpre, Vanity 6 en tête. Après une petite demie-heure pied au plancher, le blondinet Al Doyle nous remercie d'un « merci Paris, vous êtes excellents ! » en français dans le texte avant que résonne la boucle vocale de
Flutes transformant La Gaîté Lyrique en dancefloor échevelé. Les bras en l'air se multiplient autour de nous, le concert passe dans une autre dimension. La chorégraphie offerte par le groupe sur les refrains en rajoute une couche dans la joie ambiante qui commence à s'emparer des corps et des esprits. Sans répit, Hot Chip relancent la machine d'un
Over & Over, classique parmi les classiques, au début presque menaçant. En voyant l'euphorie gagner la salle, on se dit que les festivals les ayant bookés cet été vont encore faire une bonne affaire.
Ayant pitié de nos pauvres pieds, les anglais lâchent un peu de lest avec la jolie ballade
Alley Cats, dédicacé aux « filles de l'école de Camden » présentes dans la salle, non loin de nous, qui se manifestent bruyamment. Si les morceaux mid-tempo ne sont pas toujours les plus réussis dans le répertoire de Hot Chip,
Alley Cats est sans doute l'un de ceux qui passent le mieux en live. Il est d'ailleurs un quasi incontournable de leurs setlists depuis 2010. On est un peu plus sceptique sur l'inclusion de
Cry For You, peut-être un des titres les plus faibles du nouvel album. D'ailleurs, Alexis Taylor semble quelque peu noyé sous les divers effets de la chanson, pas encore totalement rodée sur scène. Tout l'inverse de
Need You Now, d'une efficacité club déjà redoutable, qui porte une évidente patte Joe Goddard encore plus criante quand on voit le grand sourire illuminant le visage de celui-ci au moment d'entamer le morceau.

Le baroud d'honneur avant le rappel et la nouvelle version presque afro-funk de
Ready For The Floor viennent illustrer leur envie de surprendre le public (et sans doute d'abord eux-mêmes) sur leurs tubes plus qu'attendus. Cette fois, l'efficacité pop de l'originale a été plutôt diluée au bénéfice d'une orchestration plus panoramique et relâchée. Hot Chip n'est pas qu'une formation electro pop pour faire danser les foules mais s'affirme aujourd'hui comme des musiciens à part entière, au registre de plus en plus large et privilégiant davantage l'aspect organique et brut de leurs créations. En témoigne la version avec marimbas de leur
I Feel Better qui clôture de belle manière la première partie du concert. Quelques minutes d'attente et le groupe remet le couvert pour un rappel marqué par « l'obscurité » : en effet, à la comptine
Dark Night va répondre une reprise inattendue et savoureuse de
Dancing In The Dark.
Le plaisir pris par le groupe à interpréter le classique de Bruce Springsteen était égal à celui ressenti ce soir dans la Gaîté Lyrique.