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shame

Paris, Cabaret Sauvage - 15 mars 2023

Live-report par Laetitia Mavrel

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L'ascension de shame et leur progression sur les scènes parisiennes de plus en plus grandes continue. Le nouveau rendez-vous donné par Charlie Steen et ses comparses brixtoniens se déroule en ce mois de mars confus niveau températures au très atypique Cabaret Sauvage à la Villette, chapiteau aux allures burlesques qui apporte à n'importe quel type de prestation un cachet des plus extraordinaires.

Les cinq anglais reviennent fidèlement vers leur public français et honorent pour la sixième ou septième fois (sans compter les festivals) la capitale de leur présence, avec ce sincère sentiment de reconnaissance envers un public qui les a totalement portés aux nues dès le premier disque et à propos duquel le groupe nous a confié en interview qu'il leur avait alors accordé beaucoup plus de crédit que leur pays d'origine. C'est ça la France !
Ainsi, bravant les grèves, les montagnes de déchets, les menaces de 49.3 et les défilés de moustachus avec pancartes qui en découlent, shame débutent leur tournée européenne dans notre beau pays pour nous présenter Food For Worms, troisième album sorti il y a quelques semaines et ayant le mérite de susciter de vives réactions s'agissant de son style largement éloigné des premiers ébats punks lors des débuts en 2017.

Mais point d'interminables sessions en hémicycles, ici les échanges musclés se font sous les vitraux colorés du Cabaret Sauvage, et Charlie Steen, en orateur né, tiendra d'une main de fer son auditoire, entrainant littéralement dans son sillage un public compact et chauffé à blanc, qui dès l'entrée en scène dans la demi-pénombre de ses leaders ne cessera de faire trembler le chapiteau de sa cime jusqu'au fondement de ses poutrelles. A peine un an après le Bataclan qui affichait déjà complet et rempli d'une foule de fans avide de redécouvrir les sensations du live suite à de longs mois de disette, shame persistent et signent en réussissant ce soir à convaincre les plus récalcitrants à leur évolution musicale récente.


Pour rappel, Food For Worms amorce un réel tournant dans le répertoire de shame et ces derniers confirment que le défi auquel ils se frottent est de ne jamais tomber dans la facilité de la redite. Pour autant, le groupe réussi à mettre tout le monde d'accord s'agissant de concerts où l'énergie dévorante dont ils font preuve ne faiblit jamais. Premier adage : faire court, mais bon. 1h15 de concert et une déferlante de rage punk pur jus, ininterrompue, avec en exclusivité l'apparition pour la première fois de la guitare acoustique (pour nous les « motherfuckers », on aime quand les groupes nous donnent des petits noms doux) qui permettra un très bref instant d'accalmie, ou le passage sous l'œil du cyclone avant l'arrivée de la seconde vague.

Avec une setlist parfaitement équilibrée entre les trois albums et la salve d'obus punk très gros calibre qui s'abat sur les têtes et les épaules des spectateurs, l'ambiance du Cabaret Sauvage revêt des allures de champs de bataille. Le bonheur simple de voir voler les pintes de bières et les paires de jambes au-dessus de la masse réchauffe les mines un peu déconfites du bon peuple parisien, le tout guidé par Charlie Steen en pleine forme qui, débutant son set en élégant costume trois pièces, s'effeuillera rapidement pour finir comme la tradition l'exige torse nu histoire de faciliter le crowd-surfing, science qu'il maîtrise parfaitement et dont on se doute qu'il a obtenu pour cette dernière la note maximum lors de ses examens de fin d'année.

Les appels à la foule de ses gestes de bras mécaniques font échos aux aller et retours incessants sur scène du bassiste Josh Finerty, qui dans cette nouvelle aire de jeu beaucoup plus large, peut alors battre ses records précédents, podomètre à la clé. Il est alors très intéressant de constater que les morceaux de Food For Worms sont ici instinctivement joués avec la puissance post-punk propre aux débuts du groupe.


Peut-être alors les ardents défenseurs de ce nouveau son comme votre chroniqueuse regrettent-ils un peu cette surinterprétation qui mériterait d'être dévoilée dans la même veine que les originaux sur disque. On perd en effet un peu de cette subtilité qu'ont apporté shame à cet audacieux troisième album mais tout cela est vite pardonné tant le rythme du concert nous laisse haletants et excités au point d'en hisser à bout de bras le chanteur, qui droit comme un i, parcours ainsi la fosse sur le dernier morceaux tel Jésus Christ Superstar marcherait sur les flots.

Pas de rappel pour un set qui, du fait de la nature incandescente de ses interprètes, se vit à toute allure. Aucun temps mort n'est toléré avec shame qui se donnent encore à 200% à mi-parcours de ce gros mois de tournée au Royaume-Uni et en Europe, avant le final de retour à Londres qui devait normalement se dérouler « à la maison », sous le dôme de la Brixton Academy, avant d'être déplacé en raison de la fermeture administrative de la salle.

La soirée se termine donc trop vite mais fait prendre conscience à tous les présents de l'énorme montée en puissance de shame qui, arrivés au stade redouté du troisième album, nous ont prouvé leur capacité à se renouveler tout en restant les plus fidèles possible à ce qui les définit intrinsèquement : la puissance du live.
setlist
    Fingers Of Steel
    Alibis
    Water In The Well
    Concrete
    Six Pack
    Tasteless
    Burning By Design
    Nigel Hitter
    Born In Luton
    Orchid
    The Fall Of Paul
    Lampoon
    Snow Day
    One Rizla
    Adderall
    Gold Hole
photos du concert
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