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Interview publiée par Laetitia Mavrel le 21 février 2023

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L'année 2023 a bien débuté quand début janvier nous rencontrions Charlie Steen et Sean Coyle-Smith de shame pour une après-midi autour d'un thé chaud et des souvenirs que le groupe a en France, tout en évoquant la prochaine tournée pour Food For Worms, excellent troisième album qui voit le groupe explorer quelques nouveaux sentiers musicaux.

Nous vous suivons attentivement à Sound Of Violence depuis vos débuts et nous étions présents au Point Ephémère en 2017. Depuis lors, comment pensez-vous avoir progressé ?

Charlie : Merci ! Je dirais la maturité, simplement. Quand nous avons joué en 2017, tout était une première fois : première fois à Paris, première scène au Point Ephémère... Aujourd'hui nous revenons et nous pouvons rejouer dans des endroits que nous connaissons, c'est beaucoup plus agréable. Et face à des foules plus importantes. Nous cherchons toujours à progresser, à nous améliorer.

Cela va bien au-delà de votre énergie « naturelle » ce que vous offrez sur scène aujourd'hui...

Sean : Oui, tout à fait ! Si on se contentait de juste jouer sans réfléchir, ça ne serait pas honnête. Le live est notre force, on vit pour ça. Jouer devant un public est ce qui nous motive le plus, et aussi le plus souvent possible.

J'ai évoqué avec un groupe cet été la question de la nécessité de tourner intensément en début de carrière. Ils pensent que plus on impose sa présence dans les premières années, plus on a de chance de rester présents auprès des fans. Le cycle des tournées et des albums s'enchainent bien plus vite selon moi ces dernières années. Vous partagez cette opinion ?

Charlie : C'est un peu présenté de façon robotique ! Le cycle dont tu parles, c'est quelque chose de naturel pour un groupe, et on ne peut pas le faire s'y on n'y met pas toutes ses tripes. Il faut évidemment ménager sa santé mais ça n'a rien de négatif. C'est toi qui décides de l'ambiance que tu génères durant un concert : qu'elle soit joyeuse ou un plus sérieuse tu dois être convainquant. C'est une chance de pouvoir tourner dans d'autres pays et sur d'autres continents. Oui, on a souvent des moments difficiles c'est humain mais il faut vraiment se donner à fond. Et on se fait des amis partout dans le monde maintenant, donc des gens qui nous accueillent et nous font nous sentir bien alors qu’ont est loin de chez nous, c'est génial.

Vous allez entamer une belle tournée, en Europe et aux Etats-Unis, comment vous y préparez-vous ?

Charlie : En fait, si j'y pense, ça me stresse (rires) ! je profite des jours chez moi, avec ma copine, pour prendre des forces tout en en évitant de m'angoisser.
Sean : Oui, il faut profiter maintenant du fait que l'on ne soit pas encore débordés. C'est hyper important de se préparer physiquement et mentalement, tu ne peux pas partir en tournée aussi longtemps en n'étant pas blindé, sinon tu risques de craquer. Il y a dans ta tête comme un switch qui se fait, en mode « à la maison » et en mode « en tournée », c'est très différent comme état d'esprit. Ça me rappelle, lors de notre dernier passage aux Etats-Unis, durant un mois je m'étais tellement habitué à l'oreiller des hôtels où on logeait que je l'ai acheté pour continuer à dormir avec ! J'ai rapporté un peu de la tournée avec moi.

Food For Worms sort le 24 février, et je vous avoue qu'il m'a totalement convaincu dès la première écoute. En général le premier album est la phase de découverte, le second est très attendu car on espère qu'il dépassera le premier, et le troisième est donc laissé libre s'agissant de son style. Pour moi il sonne plus mature et moins punk. Vous confirmez ?

Sean : Oui et c'est tout à fait ce qu'on a cherché à faire. S'éloigner du son un peu brutal des deux premiers, on a tenté d'approfondir notre style, on a été plus curieux et plus à l'écoute.

J'ai lu que vous aviez composé la quasi-totalité des titres lorsque vous étiez encore en tournée...

Charlie : Oui c'est un album écrit dans le bus ! En général on écrit l'album qui suit pour le tester en live avant. Ça nous permet de structurer les chansons et ça nous donne une sacrée confiance pour l'entrée en studio. Et on a surtout le meilleur retour possible face au public, on sait alors ce qu'il faut changer, ajuster.

Vous suivez assurément une nouvelle direction, est-ce que vous craignez la réaction de vos fans de la première heure, peut-être ceux qui attendent un son familier, celui de vos deux premiers disques ?

Sean : Non car, justement, c'est si on se répète que l'on peut être accusé de feignantise. On ne cherche pas à se réinventer mais à surprendre, refaire la même chose n'est absolument pas la bonne méthode pour séduire les fans. Évoluer plutôt que stagner ! Attirer des nouveaux fans.
Charlie : Chaque album fige une image et un son particulier, lié à une période précise. Le temps passant on ne peut pas rester collé à ça, ça ne serait pas naturel.

L'album est produit par Flood (ndlr : célèbre producteur qui a collaboré entre autres avec Depeche Mode et U2), comment l'avez-vous rencontré ?

Charlie : Grâce à notre manager via Rough Trade. Il a écouté quelques démos et s'est montré intéressé. Il est venu assister à quelques répétitions et à quelques concerts.
Sean : Flood sait instaurer la confiance chez les musiciens. Il te fait te sentir bon dans ce que tu fais. Il sait motiver ses troupes comme personne. Il tire le meilleur de toi. C'était génial de bosser avec lui. Et il a tout un temps d'incroyables histoires à raconter !

Il en avait à propos de Depeche Mode ?

Charlie et Sean : Oui !

Vous allez jouer à la Brixton Academy à Londres (ndlr : au moment de l'interview le concert était toujours prévu, il a depuis été reporté au Troxy à Londres, la salle étant à ce jour encore sous le joug d'une fermeture administrative). C'est un peu chez vous ! Comment appréhendez-vous ce concert ?

Charlie : Oui, enfin ! Il nous tardait d'y jouer. C'est un rêve, on a débuté juste en face, dans un pub et c'est la salle où j'y ai vu le plus de concerts.

Est-ce que ça sera votre concert le plus stressant ?

Charlie : Non, ça n'est pas vraiment du stress, c'est juste un final génial. On aura tourné tout avant donc l'assurance sera là. On va d'ailleurs commencer à construire la setlist pour les concerts. Mais on a encore le temps... (rires)

Quels sont les meilleurs concerts auxquels vous avez assisté à la Brixton Academy ?

Charlie : Pour moi c'est Wu Tang Clan, Sigur Rós...
Sean : Fat White Family, Nine Inch Nails où Flood m'a accompagné, et on y a vu Jimmy Page accompagné d'une très jolie jeune fille ! C'était incroyable, les gens passaient devant sans le reconnaitre, c'était « fucking Jimmy Page » tout de même ! Ils ont des lightshow géniaux, le son y est énorme, un des meilleurs, et les techniciens y font un boulot de malade.

Comment vont se passer les retrouvailles avec le public français ?

Charlie : C'est marrant car il fut un temps où on avait plus de succès à Paris qu'à Londres ! Je me rappelle en particulier du concert de l'Elysée Montmartre (ndlr : le 14 décembre 2018 avec Sorry), c'était le dernier de la tournée et l'ambiance était énorme, une des meilleures. Et on a pu se promener dans le quartier avant, c'est tellement agréable de marcher dans Paris, on aime vraiment cette ville. On a enregistré le second album à Paris, à ce moment-là on a eu cinq jours entiers de vacances à passer, j'ai assisté à un récital au piano où ils jouaient du Chopin, on a trainé autour de la Tour Eiffel. En fait on prend toujours le temps de rester à Paris, rien qu'hier soir dès que nous sommes arrivés, on a filé dans un restaurant, puis un bar, puis on s'est promené. On a découvert la Normandie pour le Levitation France, le sud de la France lors des derniers festivals, la France est le pays que l'on a le plus exploré lors de nos tournées !