Sports Team

La course au meilleur concert continue dans la capitale avec une semaine bien chargée et des spectateurs heureux mais plumés niveau portefeuille (malheureusement on ne peut pas tout avoir) en ce mois d'octobre riche en émotions musicales. En ce dirigeant à grands pas vers le week-end de la Toussaint, avec un samedi férié (quelle ineptie), nous en profitons pour faire escale sur les quais de Seine pour aller tanguer sur la péniche de Petit Bain, pour ce soir retrouver un groupe que nous avons la chance de suivre depuis leurs tous débuts mouvementés car en pleine pandémie, Sports Team.

En voilà un premier album que nous avions essoré durant notre mise à pied sans concerts, Deep Down Happy nous révélant alors une jeune formation explosive, qui mêlait indie rock et cynisme à l'anglaise à la perfection. De mémoire, nous faisions alors la connaissance d'Alex Rice, grand blondinet qui, avec ses cinq autres partenaires, sortait les banlieues anglaises ronflantes dont il provient de leur torpeur avec une petite poignée de titres bien rentre-dedans et ultra caustiques (on se souvient du vidéo clip de The Races et son mariage entre jeunes gens de bonne famille qui finit en pugilat).


Depuis, deux autres albums ont suivi, Gulp! et le récent Boys These Days. Sur ce dernier opus, un changement de cap musical, le style de Sports Team se faisant plus carré, beaucoup plus stylé avec une orchestration étoffée, une atmosphère qui lorgne un peu vers la pop dandiesque des années 80, où l'on retrouve saxophones, violons et des textes qui soulignent la fin des années insouciantes de la vingtaine. En tête de gondole, Alex Rice qui, petit à petit, se métamorphose devant nos yeux en véritable meneur, un peu crooner sur les bords, dont le chant grave s'affirme également de plus en plus. Notre dernière rencontre live s'était déroulée à la Boule Noire fin 2022, et la petite salle du boulevard Rochechouart affichait alors sold out, remplie d'une masse de mômes goutant enfin librement aux joies du retour en concert sans contraintes. Le résultat fut plus que convaincant, qu'en est-il alors trois années après ?

Cette nouvelle rencontre souffre malheureusement de l'agenda ultra blindé du fan de concert parisien. La concurrence étant rude, nous ne serons pas bien nombreux ce soir dans la péniche. Et pourtant, les spectateurs présents se savent privilégiés, car Sports Team ont dû annuler une bonne partie de leur tournée européenne prévue ce mois-ci, pour des raisons de logistique et surtout financières. Paris est donc maintenu, et le groupe saura nous confirmer que notre choix ce soir était le bon avec plus d'une heure d'un concert sans aucune interruption, et un groupe ultra heureux de venir jouer pour son public français.


Comme ce fut le cas il y a trois ans, Alex Rice mène définitivement le show. Chemise blanche aux manches retroussées et pantalon noir (qu'il changera pour un pantalon blanc crème fluide bien trop grand pour lui), la crinière blonde apprivoisée, le jeune anglais tout en longueur et en lunettes de soleil pour le début du concert en impose. Chanteur sans guitare, ce dernier dispose donc de toute l'amplitude nécessaire pour se dandiner, prendre quelques poses de « charmeur » avec son pied de micro, et mène tambour battant le set. A ses côtés, et attendu avec impatience par votre chroniqueuse, Ben Mack, notre claviériste inexpressif aux airs « à la Ron Mael », qui ce soir se parre d'une chapka du plus moche effet, qu'on espère évidement en fausse fourrure. Ce dernier reste fidèle à lui-même, soit sans un mot ni un sourire, avec des airs d'ennui profond quand il ne pianote pas son clavier, et dont on apprendra avec beaucoup d'empathie qu'il vient de se faire larguer par sa copine.

Les autres membres du groupe assurent quant à eux parfaitement leur rôle, et sous un lightshow aveuglant les trois quarts du temps, Sports Team réussissent à faire monter les décibels. Les titres du dernier album sont en live simplifiés au niveau de leur orchestration, leur permettant de regagner des accents plus rock, gommant ainsi l'aspect un peu maniéré qu'ils abordent sur le disque. C'est donc plutôt dans l'atmosphère du premier album que nous replongeons avec délice, cependant on ne retrouvera pas ce soir la folie à laquelle nous avions goûté à la Boule Noire. Alex lui-même, bien que très expressif, n'ira pas chercher le public comme il l'avait fait précédemment. On lui reconnait une belle évolution, liée à ses quelques années de carrière maintenant et à un répertoire qui se professionnalise au détriment du côté foutraque des débuts, mais l'étincelle qui était celle de Sports Team précédemment nous manquera un peu ce soir. Néanmoins, les morceaux des trois albums sont un régal et nous pourrons également découvrir quelques inédits dont un Pet Sounds qui ne nous laisse pas indifférents.

Nous sortons donc heureux d'avoir pu profiter de Sports Team malgré leurs soucis pour honorer leur tournée initiale, mais il persiste ce sentiment d'un peu trop de retenue tant sur scène que dans le public. C'est pourquoi nous attendrons à nouveau de pied ferme Sports Team pour un prochain round, peut-être en leur déconseillant cette période de trafic saturé niveau concerts à Paris, pour pouvoir en profiter pleinement.