NewDad

Qu'on se le dise, 2022 s'annonce déjà comme un grand millésime pour la scène indie-rock britannique. Les jeunes pousses se bousculent au portillon, attendues comme des messies prêts à dégainer des premiers albums et mettre tout le monde à terre. Qu'ils soient post-punk, neo-grunge ou noisy-pop, une majeure partie de ces artistes a en commun une fascination pour les années 90, tant à travers d'influences musicales, souvent très, parfois trop, marquées, que via des revendications clairement assumées du « cool-britannia », ce lien qui unissait naguère des groupes aux styles (et aux niveaux) très disparates, mais tous regroupées sous la fameuse, et parfois encombrante, étiquette « Britpop ». Mais alors, 2022 serait-il le nouveau 1992 ?

Pour le découvrir, rendons-nous aujourd'hui aux confins de l'Europe, là-bas au Connemara, et plus précisément à Galway, citée portuaire située à l'extrême ouest de l'Irlande et fief de NewDad, quatuor prometteur, déjà auteur l'année dernière d'un premier EP remarqué (Waves) porté par le hit, que dis-je, l'hymne, I Don't Recognize You. Voix éthérée sur mur de guitares, attitude de slacker, pulls oversize tout droit sortis d'un film de Xavier Dolan, leur formule nous avait séduite à défaut de nous surprendre. Encore un peu brouillons, mais déjà enthousiasmants, on attendait de pied ferme leur premier album, afin de voir de quels bois se chauffent ces nouveaux papas. On se contentera pour le moment de Banshee, deuxième EP de cinq titres, sorti sur le tout jeune label Fair Youth. Julie Dawson, Áindle O'Beirn, Sean O'Dowd et Fiachra Parslow (les présentations sont faites) affinent ici leur patte. Mieux écrits, mieux produits, leurs morceaux gagnent en ampleur ainsi qu'en singularité.

Say It, petit bijou de dream-pop enlevée, ouvre les débats, le regard fixé vers les étoiles plutôt que vers les chaussures. Alliant à merveille fraicheur juvénile et nostalgie 90's, ce premier morceau de haute volée témoigne du chemin parcouru en peu de temps par nos jeunes irlandais. Vient ensuite Banshee, qui démarre en douceur avec sa petite ligne de basse aussi mélancolique qu'addictive et ses couplets parlés-chantés (figure de style obligée de cette bouillonnante scène depuis Chaise Longue, tube séminal des géniales Wet Leg) avant de passer la seconde avec son refrain tout en guitares saturées pour s'achever sur un long crescendo shoegaze.

Après cette belle entrée en matière, le troisième titre déçoit. Spring s'avère une tentative peu convaincante de loud-quiet-loud. Trop mièvre et pas assez incisif, n'est pas les Pixies qui veut ! Sur Thinking Too Much, Newdad dévoilent une nouvelle facette de leur spectre musical et livrent un morceau de pop subtile, enjolivé de quelques effets cinématographiques planants. Ladybird, inspiré du film éponyme de Greta Gerwig, vient clôturer en beauté ce second opus avec sa noisy-pop mélodique et ses gimmicks accrocheurs.

Avec Banshee, Newdad confirment haut la main les attentes placées en eux et font même entrevoir une belle marge de progression. Après un premier et court passage live en France en novembre dernier à l'occasion des soirées Avant-Garde du Pitchfork Music Festival au sein d'une programmation déjà culte (Wet Leg, Yard Act, Lime Garden, Talk Show...), on s'impatiente déjà de retrouver Julie et ses acolytes pour la suite de leurs aventures et enfin voir, sur disque comme sur scène, le papillon sortir pleinement de sa chrysalide.