Palace

Palace, ces mecs parfaits, beaux gosses, musiciens hyper doués, dont votre copine vous crie que ce sont vraiment des génies, tout ça pour des critères purement musicaux, bien entendu. Ces gars que l'on aimerait beaucoup détester, comme on a eu l'occasion de mettre quelques cartouches à Coldplay depuis leur virage pop de supermarché et leurs engagements écolos douteux, mais qui malgré toute notre volonté résistent encore et toujours à la possibilité de les haïr.

Dernière tentative en date, on va traîner sur leur compte Instagram pour trouver des infos Hanounesques et compromettantes à base de mortadelle et de tigres du bengale, et enfin débunker toute cette arnaque de surfeurs londoniens qui sentent le monoï et viennent nous piquer nos femmes ! Mais non, on ne trouvera rien d'autre que Leo Wyndham, homonyme vocal de Chris Martin, en plein cours de guitare de leur dernier single Make You Proud. Donc en plus d'être parfaits sur tous les plans, Palace nous donnent les paroles et les accords de leurs chansons, ainsi qu'un tutoriel vidéo ! La coupe est pleine, et si vous croyez que je vais arrêter là cette chronique pour prendre une guitare et suivre un cours, vous avez totalement raison ! Vingt minutes et quelques appels de voisins inquiets confondant chant mélodieux et chat coincé dans un broyeur plus tard, le constat est clair : on ne chante pas aussi bien que ce que l'on aimerait, et Make You Proud est une magnifique chanson, aussi belle que la proximité qu'entretient le groupe avec son public.

Mais plutôt que commencer par la fin, revenons-en au début, et à la première partie de ce qui nous occupe ce soir. Acte 1, Partie 1, Quand tout était perdu. Un premier EP de quatre chansons sorti en juillet, une petite surprise de la part d'un groupe bien établi comptabilisant déjà trois très beaux albums, et une manière de faire passer une face plus sombre de leurs humeurs personnelles. Une musique qui ne déstabilisera pas les habitués du Palace, mais un sentiment général plus lourd, du drone grave et électro traînassant dans le fond, et des paroles pleines de doutes, de pertes, de regrets, de solitude, et d'incompréhension de soi et des autres. Un EP explorant les nappes synthétiques inquiétantes en lieu des lumineuses touches de guitare habituelles, une direction déjà partiellement entrevue dans l'album Shoals sorti l'année dernière, et dont on se dit qu'elle est partie pour durer ?

Et si on met un point d'interrogation, c'est parce qu'après cet amas de mots indispensable nommé introduction, il est enfin temps de parler de la deuxième partie des travaux du Palace sur l'année 2023 : Part II – Nightmares & Ice Cream. Des cauchemars et des crèmes glacées, un parfait titre pour l'autobiographie d'un enfant de sept ans sans veilleuse, ou d'un homme en dépression. Car, ne tournons pas autour du pot, l'ambiance ne sera pas plus enfantine ou joviale qu'en partie 1, et si évolution il y a, elle tend à partir en spirale vers le bas. Rabid Dog ressort les guitares brillantes sur un tempo lent pour évoquer rupture et envie de se piquer comme un chien enragé, avant que Nightmares & Ice Cream ne plonge dans les abysses de l'écho et des cauchemars et que la voix ne touche le fond de la piscine, entourée de sons distendus, déformés, de guitares et de drone se fondant en une bulle aspirée par le siphon de l'océan. Heureusement pour notre santé mentale, Make You Proud retrouve le sourire dans l'amour et les arpèges de Telecaster, et tout est bien qui finit bien, un peu comme ce duo d'EPs qui, mis ensemble, forment un parcours semé d'embûches vers la lumière, manière particulièrement dépressive de montrer qu'après la nuit viendra toujours le jour.

Et qu'avec le jour vient le matin, qu'avec le matin vient le café, qu'avec le café vient la brioche, et qu'avec tout ça j'ai oublié ce que je voulais dire, si ce n'est que ce nouvel EP de Palace magnifie les sentiments les plus sombres du groupe dans une pop en mode clair-obscur intimiste sachant, comme à l'accoutumée, se rendre grandiose quand il le faut. En somme, une bonne raison de plus de les détester d'être plus beaux, plus sympas, et plus doués que nous !