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The View

Interview publiée par Claire le 11 novembre 2012

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Symboles d'une indie music encore florissante au Royaume-Uni et exception culturelle britannique, The View achevaient avec une date parisienne (et luxembourgeoise) leur tournée européenne. Fatigué par une très courte nuit et quelques semaines sur la route, Kieren Webster, bassiste et songwriter du groupe, nous a reçus à la Flèche d'Or quelques heures avant leur concert. Rock star émérite, il n'en reste pas moins le lad de Dundee, toujours aussi ravi de promouvoir son groupe.

Vous achevez votre tournée européenne avant de repartir sur les routes britanniques. Vous avez littéralement passé ces deux derniers mois à tourner. Ma première question sera donc de savoir comment tu te sens ?

Bien ! Je suis content de boucler cette tournée, content qu'elle ait bien marché et que nous ayons eu un bon retour des fans. Nous avons eu une journée de repos hier dans Paris, nous en avons bien profité. Nous avons surtout bien mangé, bu du bon vin. Un peu trop de bon vin, soit dit-en passant. J'espère que le concert de ce soir sera aussi bon que les précédents. Mais bon, nous croisons toujours les doigts. Nous avons toujours fait de bons concerts à Paris, et j'espère que celui-là sera le meilleur. En plus, cette salle est vraiment top.

Oui. C'est une ancienne gare...

Oui, j'ai vu les rails en-dessous et des types qui marchaient tranquillement dessus cet après-midi. J'ai cru que les rails étaient toujours utilisés. Je suis rassuré !

Parlons un peu de Cheeky For A Reason. Vous avez mis tout juste un an à écrire, enregistrer et sortir ce quatrième album, tout en continuant en parallèle à tourner. Comment vous êtes-vous organisés ?

Je n'en sais trop rien en fait ! Mais ce n'est pas si compliqué. Tu sais, dans les années soixante-dix, The Jam pouvaient sortir deux albums en moins de douze mois, et un type comme Lou Reed le fait aussi. Et puis, ce truc de devoir attendre trois ans entre chaque album, c'est un peu... fainéant, non ? Ces groupes qui laissent passer une année avant même de se remettre à écrire, ça ne prouve pas une très grande envie de faire de la musique. Et puis, hormis ça, nous n'avons rien à faire d'autre.

Est-ce que tu penses que les tournées ont pris davantage d'importance que les albums ?

Tu sais, l'état actuel de l'industrie musicale n'est pas brillant. Et honnêtement, s'il n'y avait que les albums, on ne gagnerait rien. Et puis, The View, ça a toujours été, depuis le début, un groupe de concert, de live, de sueur. L'album est là pour montrer aux gens un échantillon de ce qu'on fait en live, leur donner envie de venir nous voir en concert.

Cheeky For A Reason est votre quatrième album. Peut-on dire que The view est maintenant un groupe établi ?

Je pense que oui. Même si nous sommes encore un peu jeunes pour nous sentir vraiment établis dans l'industrie musicale, ou même mature. Nous avons quand même vingt-six ans donc nous ne pouvons plus jouer les gamins non plus. Et puis nous savons vraiment vers quoi nous voulons aller, nous pouvons nous permettre de dire ce que nous pensons quand nous enregistrons par exemple.

Cet album s'intitule donc Cheeky For A Reason. Pourquoi ce titre ? Et pour quelle raison ?

Tu sais, ça remonte à la sortie de Same Jeans quand les journalistes ou les autres groupes nous prenaient pour de sales morveux, toujours à faire n'importe quoi. Nous avons longtemps dit de nous que nous étions des sales gosses et nous nous sommes dit que nous pouvions accepter de jouer avec ça maintenant. Et puis, ce sont les paroles d'une des chansons. Et c'est Kyle qui a choisi donc c'est lui qui devrait se justifier. Je devrais d'ailleurs aller le chercher, tiens !

Sur vos trois premiers albums, vous avez travaillé avec le légendaire Owen Morris. Pour cet album, vous avez choisi Mike Crossey, qui a notamment travaillé avec les Arctic Monkeys. Pourquoi avoir changé de producteur et pourquoi l'avoir choisi lui ?

Mike a toujours voulu bosser avec nous. Nous savions qu'il aurait voulu faire Bread And Circuses mais Sony n'étais pas d'accord. Nous avions adoré le son qu'il avait réussi à donner aux Arctic Monkeys. En tout cas, nous nous sommes longtemps trouvés empêtrés dans ce problème où nous n'étions pas chez Sony et Sony refusait qu'il bosse avec nous puisque nous n'étions pas signés chez eux. Finalement, nous avons quand même réussi à faire ce que nous voulions. Personnellement, je trouve que son travail est juste fantastique. En plus, il possède un studio à Liverpool dans lequel nous avions déjà eu la chance d'aller, donc nous avions l'impression de rester en terrain connu. Et il travaille à l'ancienne, sans fioritures, un peu comme nous ! Nous adorons Liverpool, à tel point que Pete, notre guitariste, y a emménagé. Ça reste une ville à taille humaine, très familiale, où tout le monde connaît tout le monde. Bref, ce qu'il nous fallait pour enregistrer cet album, c'était Mike et Liverpool.

Justement, vous vivez maintenant tous dans différentes villes. Pete à Liverpool, Steve est resté à Dundee et Kyle et toi habitez Londres. Comment vous organisez-vous pour bosser les nouveaux titres ?

Le Royaume-Uni, c'est un tout petit pays, un pays minuscule en fait, donc nous n'avons pas l'impression que vivre loin des autres a changé notre façon de travailler. Et Kyle et moi écrivons la majorité des titres. Comme j'habite à dix minutes de chez lui, c'est très pratique. Ensuite, nous envoyons les démos à Pete et Steve avant de nous rejoindre quelque part en studio sur Londres. Nous stockons tout notre matériel dans la capitale et toute notre équipe est basée là aussi donc c'est plus simple comme ça, tout en permettant à chacun de vivre sa vie où il veut. C'est finalement aussi simple que lorsque nous vivions tous à Dundee.

Et en tant que songwriter, laquelle de ces villes t'inspire le plus ?

Londres, sans aucun doute. J'y ai emménagé il y a six mois et j'adore le fait que ce soit une grande ville, que tu aies pleins de chose à faire et voir tout le temps. J'aime toujours autant Dundee mais j'y ai créé un cul-de-sac musical! J'ai écrit des tas de chansons sur Dundee, sur la vie là-bas, sur nos potes. Je n'en reviens pas du nombre de chansons que nous avons pu tirer de Dundee mais j'ai eu l'impression que j'avais pris de cette ville tout ce que je pouvais prendre et qu'il fallait maintenant que je parte pour me renouveler et renouveler mon écriture.

Kyle a déclaré que cet album sonnait comme la rencontre entre Fleetwood Mac et les Clash. Qu'en penses-tu ? Est-ce que ça ne va pas paraître surprenant pour vos fans qui ont plutôt élevés avec les Libertines ?

Kyle est plutôt... bavard et a une opinion bien tranchée sur Fleetwood Mac. Si nos fans ne les connaissaient pas, je pense qu'au vu du nombre de fois où Kyle s'est répandu dans la presse sur eux, la majorité a dû aller faire un tour sur le net pour voir qui ils sont vraiment. Mais je suis plutôt assez d'accord avec Kyle sur cette comparaison. Disons que je suis plus Clash que Fleetwood Mac donc chacun d'entre nous a amené son truc dans les chansons.

Les chansons sont aussi beaucoup plus subtiles, voire calmes, que sur vos précédents albums, même si Bread And Circuses avait déjà amorcé une certaine transition. Des titres comme The Clock ou Bunker sont assez nouveaux pour vous...

Oui, tout à fait, même si ce n'était pas une décision consciente de notre part. En tout cas il nous semble évident que c'est un style que nous approfondirons dans le prochain album. Nous voulons vraiment continuer sur cette voie.

Dans Cheeky For A Reason, vous parvenez encore et toujours à y mettre six ou sept titres qui sont potentiellement des singles. Cela semble déconcertant de facilité pour vous alors que la plupart des groupes peinent à en avoir deux sur un album...

En fait, c'est parce que nous écrivons beaucoup. Pour Bread And Circuses comme pour Cheeky For A Reason, nous avions écrit à peu près trente chansons. Celles que nous décidons de garder sur l'album sont celles que nos amis qui ont entendu les démos aiment et dont on entend à chaque fois parler. Et puis, c'est parce que notre base commune à tous dans le groupe, c'est Oasis, et tous leurs titres, sans exception, sont des hymnes. Nous revenons continuellement à Oasis. Nous sommes allés à bonne école, en quelque sorte.

Tu es plus Beady Eye ou High Flying Birds ?

Franchement, je les aime tous les deux. Je ne dis pas ça pour ne pas me retrouver empêtré dans une guerre civile entre les deux, mais franchement, leur boulot est différent et j'apprécie vraiment les deux projets.

Vous avez choisi How Long et The Clock comme premiers singles. Pourquoi ce choix ?

Dès les premiers enregistrements pour How Long, il me semblait évident que ce serait ce titre qui sortirait en premier. Dès que nous nous remettions à bosser en studio, nous revenions automatiquement à cette chanson. Quant à The Clock, nous voulions vraiment montrer un autre côté, une autre facette du groupe, et nous nous sommes dit que ce titre-là était vraiment représentatif de notre travail.

Peux-tu nous expliquer comment vous est venue l'idée du clip assez controversé de How Long ?

Il a surtout posé problème en Grande-Bretagne où, pour être poli, les gens sont assez coincés et dès qu'on leur change leurs petites habitudes, ça semble poser un problème national. Le clip a même été interdit de diffusion ! Comme si certains clips diffusés n'étaient pas pires que celui-là. Bref, ça a eu le mérite de nous faire de la pub. Le clip a été réalisé par Scott Davies, un de nos meilleurs potes de Dundee. Il a terminé ses études de cinéma l'année dernière et nous nous sommes dits que ce serait cool de bosser avec lui parce qu'il a vraiment des idées complètement cinglées. J'ai dit à notre manager que le clip serait certainement assez controversé. Mais je pense que personne n'a idée du sens de la litote des Écossais. Il n'a pas imaginé un instant quand je disais controversé, que je pensais "vraiment très controversé" ! (rires) D'ailleurs, maintenant que j'y pense, il m'a dit qu'il s'était inspiré du clip d'un groupe français. The... The... The quelque chose. J'ai une gueule de bois pas possible, j n'arrive plus à me souvenir du nom. Je peux aller demander aux autres dans le tour bus ?

Bien sûr... (ndlr: quelques instants plus tard, retour de Kieren Webster) Alors ?

Il n'y a personne dans le tour bus ! Pourtant, je vois bien le clip. Des types se font assassiner. C'est un groupe de dance français! Ça va forcément me revenir. Il faut que je trouve mon portable, il faut que j'appelle Kyle et Pete, je suis sûr qu'ils s'en souviennent.

La tournée au Royaume-Uni s'annonce plutôt bien. Le concert de Glasgow est sold out...

Nous jouons deux nuits à Glasgow en fait. les gens y sont géniaux, c'est un public qui vit à fond les concerts, et la salle est géniale. Vraiment, nous sommes très contents de repartir sur les routes. Nous jouons aussi en première partie de The Courteneers à Manchester. Nous avons vraiment beaucoup de chance.

Alors que nous quittons la Flèche d'Or, Kieren Webster refait une apparition, visiblement ravi d'avoir enfin trouvé la réponse à sa propre question. C'était le clip de Time To Dance de The Shoes qui avait inspiré celui de How Long.