Rencontre avec VLURE, dont le premier album,
Escalate, est sorti sur Music For Nations, un label plutôt connu pour les groupes métal, mais qui a également publié il y a quelques mois le premier album de Maruja, un autre disque dont la puissance se prend en plein figure. Les écossais nous reçoivent dans la minuscule, mais très cosy, loge du Point Éphémère à Paris. Ils viennent de donner
un concert plein d'énergie, y compris un rappel qui n'était pas prévu ! Et même si Hamish nous a prévenu que Carlo, le batteur, n'y résisterait peut-être pas, ce dernier est bien là, accompagné d'Alex la claviériste pour répondre à nos questions.
Merci de m'accueillir juste après le concert. Comment vous sentez-vous ?
Carlo : Très en sueur et fatigué. Mais je me sens vraiment bien ! [rires épuisés]
Alex : C'était un super concert. Je pense que c'était le meilleur de la tournée jusqu'ici.
Carlo : Oui c'était super, le public était vraiment fantastique, que demander de plus ? Nous avons bien joué, c'était fun. Les gens ici sont adorables aussi, c'est chouette d'être de retour à Paris.
Merci d'être revenus ! J'aimerais parler de Escalade, votre premier album. Si vous deviez le décrire en un seul mot ou une seule sensation, que choisiriez-vous ?
Carlo : Oh, c'est dur comme question. Je dirais Dongs ! [ndlr : Je l'ai bien cherché avec ma question, mais devant mon air ahuri, il développe un peu]. C'est comme des gros beats, c'est un album intense, mais vraiment, euh... énorme. Désolé, je suis encore plein d'adrénaline du concert.
Hamish : « huge, fucking huge » ! [ndlr : « énorme, putain d'énorme »]
Carlo : Oui, voilà ÉNORME, tout en majuscules.
Alex : Je dirais « euphorique ». C'est un mot que nous adorons depuis des années. C'est un album sur se trouver soi-même, se retrouver avec ses amis. Et avec le nom de l'album,
Escalate, ça aide à escalader ses émotions vers ce sentiment d'euphorie. C'est comme les hauts et les bas vers l'ascension finale.
Carlo : Ou les hauts et les bas quand tu deviens adulte.
Tu parles d'euphorie et d'être ensemble avec des amis, ce qui pour moi évoque aussi votre chanson Euphoria. J'ai été bluffé par celle-ci quand je vous ai découverts en live. La rejouerez-vous un jour sur scène ?
Alex : J'adorerais, c'est une de mes préférées. C'est aussi une des premières chansons que nous avons écrites ensemble. Ça devait être en 2019, nous allions jouer notre premier concert et nous n'avions que quatre chansons. Il nous en fallait une de plus pour compléter le set. Nous avons écrit
Euphoria en une seule répétition, en une journée. C'était vraiment spécial pour moi, c'était la première fois que nous collaborions vraiment tous ensemble, en improvisant dans notre local de répétition. Ce n'était pas vraiment planifié, c'est juste venu comme ça.
Carlo : Je pense qu'elle fera son retour d'une manière ou d'une autre dans notre set, peut-être pas dans sa forme originale. Nous devrons la retravailler pour qu'elle trouve sa place dans la musique que nous jouons maintenant. Notre son a beaucoup changé depuis ce premier EP.
Comment avez-vous abordé l'évolution de votre son ?
Carlo : Nous venons tous d'horizons musicaux différents. Le son que nous avons développé pour cet album capture vraiment l'âme de Glasgow, avec sa scène club hyper dynamique. Ce n'est pas une évolution que nous avons planifiée, notre son s'est développé de manière assez naturelle et organique. Plus nous écrivons de chansons, plus notre son mûrit. C'est comme ça qu'est né
Escalate.
Et comment va-t'il continuer à évoluer ?
Carlo : Je ne sais pas. Ça pourrait devenir du death metal ou un truc comme ça [rires].
Hamish : Il faudra me passer dessus !
Alex : Moi, j'aime bien le metal !
Carlo : Ce qui nous guide c'est surtout l'idée de faire quelque chose de fort et de fun à la fois. Je suis sûr que nous allons évoluer dans différentes directions et nous nourrir d'autres influences et expériences, mais je ne sais pas encore lesquelles. Ça arrivera quand ça arrivera. Il faut juste que ça sonne bien.
Vos chansons sonnent différemment en live et en studio, mais j'ai l'impression que ça fait partie d'un tout. Quand vous écrivez une chanson, pensez vous à comment vous allez les jouer sur scène ?
Carlo : Quand nous écrivons, c'est généralement en studio ou sur un laptop. Une fois que la chanson est là, nous devons l'arranger pour la jouer live. Pour moi qui suis à la batterie, elles sont parfois difficiles à jouer en concert. Pendant l'enregistrement, je voulais m'assurer que je pourrais les jouer sur scène et c'était aussi comme ça que je voulais qu'elles soient sur le disque. Même si c'est plus intense et rapide, je voulais pouvoir les jouer.
Alex : Nous avons aussi pas mal joué les chansons en concert pour les tester et voir comment les gens réagissent. Ça nous aide beaucoup. Quand nous pensons que ça ne marche pas bien en live, nous retournons répéter pour les retravailler. Beaucoup de chansons de l'album étaient des démos jouées en live, juste pour voir ce que les gens aimaient.
Je ne sais pas si je peux vous comparer à de la musique dance ou club, mais dans ce genre, il y a généralement un ou deux musiciens. Comment faites vous à cinq ?
Alex : C'est dur, tu sais. C'est une scène bien remplie.
Carlo : Nous jouons toujours les instruments live, et chacun doit avoir de l'espace pour s'exprimer. La basse de Niall est très importante, du coup la guitare est parfois plus en arrière-plan, mais elle pose des petites touches ici et là. Il y a des millions de façons d'arranger une chanson, c'est ça qui est amusant.
Tu disais tout à l'heure qu'Euphoria vous était venu très spontanément. Est-ce toujours le cas ?
Alex :
This Is Not The End a été la plus facile pour moi. C'est une chanson que Carlo a commencée pendant le confinement.
Ce n'est donc pas la fin du concert, c'est la fin du monde ?
Carlo : Tu peux l'interpréter comme tu veux [rires]. C'est quelque chose que j'ai écrit pendant le confinement et, comme Hamish l'a dit sur scène, c'est une chanson pleine d'espoir et d'amour. C'est l'idée que ce n'est pas la fin, juste le début.
Something Real est aussi venue assez vite.
Alex : Oui nous étions tous très excités par le morceau dès la première version. Niall a posé les bases, et après chacun a contribué en ajoutant des d'éléments qui l'ont fait évoluer. Nous sommes très contents du résultat. Laquelle était la plus difficile d'après toi ?
Carlo : Pour moi, pendant l'enregistrement, c'est probablement
Let it Escalate. C'est parce que Connor l'a écrite avec un sample de batterie, j'ai dû la rejouer en studio. Le sample était retravaillé, ce qui rendait encore plus compliqué de le reproduire à la batterie. Au final, le résultat est super cool et agressif, comme il faut. Mais généralement c'est facile. Comme pour
I Want It Euphoric, le morceau qui ouvre l'album. Nous savions exactement ce que nous voulions faire, un morceau tout en crescendo. Ça a été très naturel, et quand nous sommes entrés en studio avec Manny D qui produit l'album, il a beaucoup apporté à l'arrangement.
Bobby Gillespie apparaît sur la dernière chanson, comment ça s'est fait ?
Alex : James Rand, qui a mixé notre album, est un bon ami de Bobby Gillespie et il nous l'a présenté. Nous avons aussi tourné avec
Primal Scream en juin, et nous avons sympathisé. Ils étaient adorables et accueillants, nous avons passé un super moment. C'était spécial d'avoir Bobby sur l'album, comme un passage de relais à la nouvelle génération de Glasgow. Il a été une telle inspiration pour nous, comme sa façon de mélanger les genres, notamment avec
Screamadelica et les remixes d'Andy Weatherall.
Il y a aussi d'autres invités moins connus sur Escalate, pouvez-vous nous les présenter ?
Carlo : Psweatpants est un rappeur, originaire de Londres mais basé à Glasgow. Nous l'avons rencontré via la scène locale, nous sommes devenus amis. Il est super talentueux et il y a quelques années nous l'avons invité à chanter avec nous sur scène. C'était pour d'autres titres qui ne sont pas sur l'album, mais ça fonctionnait vraiment bien. Pour
Escalate nous lui avons demandé de faire un couplet sur
Something Real, il a assuré. La chanson marche très bien sur scène, et elle a été retenue sur la bande originale d'EA FC 2026 [ndlr : le nouveau nom de la série de jeux vidéo de football FIFA]. Gros shout out à Psweatpants, c'est un génie.
Alex : Il y a aussi Gaia sur l'album. C'est une chanteuse de jazz incroyable qui est venue et s'est fait un nom à Glasgow avant de partir à Londres. Nous l'avons invitée en studio pour faire des voix. C'était magnifique et du coup nous avons utilisé cela sur plusieurs morceaux. C'est génial d'avoir un melting pot de personnes et d'amis qui nous inspirent sur l'album.
Quelle importance a la culture écossaise pour vous, et celle de Glasgow en particulier ?
Alex : On dit toujours que ce sont les gens qui font Glasgow.
Carlo : C'est vrai ! C'est une ville très artistique et industrielle. La partie industrielle et ouvrière est très présente dans l'art, la musique et les arts graphiques. Il y a une scène musicale importante à Glasgow, c'est là que la plupart des groupes sont installés. Mais j'ai l'impression que les groupes écossais doivent travailler plus dur pour se faire remarquer, pour se faire une place car nous sommes un peu plus éloignés. La scène musicale est souvent centralisée à Londres. Nous devons toujours en faire plus et nous investir davantage. Ça se ressent dans notre musique, nous ne nous retenons pas et nous ne faisons pas semblant.
Pour finir, quels artistes de la scène de Glasgow devrions-nous aussi écouter ?
Carlo : Tu peux écouter The Era, ce sont deux bons amis à nous. Sin Clair, elle joue dans The Horrors, mais ce qu'elle fait en solo est très bien aussi. Nous répétons dans le même local. Et bien sûr Psweatpants dont nous avons parlé tout à l'heure. Dans un style très différent, Corto Alto sont très intéressants, leur production est super.
Alex : Mon groupe préféré à Glasgow en ce moment est Humour. Ils viennent de sortir leur premier album, c'est intense avec des riffs de guitare géniaux. Je vis dans le même quartier à Glasgow et je les croise souvent.
Hamish: Brògeal ! Ils font un mélange de musique traditionnelle et de rock. Ils sont de Falkirk mais ils sont géniaux aussi.