Charlie Cunningham

Voici le troisième volume des aventures du troubadour Charlie Cunningham qui nous propose avec Frame une nouvelle exploration de son très grand talent d'auteur-compositeur. L'anglais a depuis Lines en 2017 fait preuve de ses dons de multi instrumentiste et surtout de sa grande érudition, s'agissant de donner à chacun de ses disques une direction musicale précise et toujours très soigneusement interprétée.

Nous avions quitté Charlie Cunningham il y a tout juste un an après son incroyable prestation live sous la nef de l'Eglise Saint-Eustache à Paris à l'occasion d'un récital acoustique dans le cadre des soirées Spiritus Sancti, ouvrant les édifices religieux à la musique contemporaine. Ce dernier nous avait littéralement enchantés avec une interprétation à la seule guitare acoustique de son répertoire alors encore majoritairement composé des titres très flamenco de Permanent Way, album sorti en 2019 et lui ayant ouvert les portes d'une très honorable notoriété en dehors du Royaume-Uni.


Que nous réserve donc ce Frame ? Dans la lignée de l'EP Pieces sorti en mai 2020 en pleine période COVID-19, Charlie Cunningham revient à des racines beaucoup plus classiques. Terminés les échos synthétiques et un peu juvéniles du premier disque, écartées les rythmiques hispanisantes et chaudes du second, Charlie empreinte un chemin plus balisé en plongeant dans une atmosphère baignée de guitare acoustique aux arpèges doux et harmonieux, avec un retour au piano qui offre une ambiance soft jazz, calme et enivrante à la fois.
L'album ayant été pleinement composé à la suite du gros de la pandémie, ce sont donc des thématiques chargées de mélancolie, reflétant les angoisses bien légitimes ressenties durant cette parenthèse folle et à l'époque absolument imprévisible.


Charlie Cunningham s'est alors réfugié dans les disques de jazz des années 50 de ses parents pour ainsi y puiser l'inspiration nécessaire à des titres d'une très grande élégance tels Birds Eye View, Starlings, Pathways ou le très beau Friend Of Mine. On y trouve un chant délicat comme à fleur de peau, il s'agit ici de dévoiler une facette intime tout en gardant cette pudeur nécessaire afin de ne pas y laisser percevoir un quelconque sentiment de mal-être.
Les titres se rapprochant le plus du répertoire jazzy comme Shame I Know et Water Tower se voient dirigés par un piano sombre et vibrant, qui étoffe le registre généralement plus tourné vers la guitare folk que Charlie Cunningham maîtrise parfaitement. Cette dernière est évidement présente sur la quasi-majorité des morceaux et revient vers des tonalités plus classiques, offrant une indie folk rafraichissante qui se lie parfaitement avec le timbre frêle et délicat du musicien.

Les albums de Charlie Cunningham sont un reflet fidèle de sa vie personnelle, et ses pérégrinations en Europe et ailleurs apportent ainsi une patine particulière à chacun d'entre eux. Frame dévoile un Charlie Cunningham apaisé, en phase avec son temps, et permet de convertir à un répertoire aujourd'hui très classique tout un pan d'auditeurs plutôt tournés vers l'instantanéité des plateformes de streaming, Charlie y cumulant à ce jour des centaines de millions d'écoutes.