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The Long Blondes

Interview publiée par Fab le 3 novembre 2006

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Nourris à la britpop de Pulp et Suede, The Long Blondes s'apprêtent à sortir leur très attendu premier album, Someone To Drive You Home, au début du mois de novembre. De passage à Paris, la charmante Kate Jackson répondait à nos questions sur cette fulgurante ascension...

Pour commencer, peux-tu me raconter comment l'histoire des Long Blondes a débuté ?

Notre rencontre a eu lieu à Sheffield durant l'année 2003. Aucun d'entre nous n'est originaire de la ville, mais on étudiait tous à la même université et cela nous a rapprochés. On a tous arrêté les études au même moment et on ne savait pas trop quoi faire de nos vies... alors on a monté un groupe ! De mon coté je baignais déjà dans le milieu depuis un certain temps car j'animais des soirées, mais prendre la décision de s'investir dans un groupe pour créer quelque chose n'était pas simple.
Les jeunes s'ennuient beaucoup à Sheffield, il n'y a pas beaucoup de loisirs et si tu n'as pas de job tu n'as plus qu'à rester à la maison pour regarder la télévision ou écouter de la musique. Il nous a alors semblé judicieux de créer les Long Blondes pour jouer la musique qu'on apprécie tout en s'inspirant de Pulp, Suede, Roxy Music ou Blondie par exemple... tous ces groupes qu'on écoute depuis des années.

Une nouvelle vague de groupes semble émerger depuis plusieurs mois... il y a un ou deux ans ceux-ci ne juraient que par Joy Division, mais désormais on semble s'orienter vers le son très britpop des années 90. Comment expliques-tu cela ?

Je crois que si on avait fait de la musique il y a quelques années, on aurait effectivement ressemblé aux Doors ou Joy Division... mais voilà, durant toute notre adolescence, on a grandi en écoutant les principaux groupes de la vague britpop et, inévitablement, on a eu envie de faire quelque chose de semblable. En dehors des classiques on écoutait aussi beaucoup de groupes comme Echobelly que la plupart des gens ont oublié depuis. Sans oublier la pop des 60s, la période très glam des 70s et même de la new wave... beaucoup de choses différentes. A partir de toutes ces choses on a ensuite essayé de créer notre musique avec un son moderne et unique.

Ce qui pousse la plupart des journalistes, et même vos fans, à vous comparer constamment à Pulp ! Ce n'est pas un peu énervant à la longue ?

Pas du tout, on le prend très bien ! Pulp est à l'évidence le groupe qui nous influence le plus. Ils viennent également de Sheffield et je trouve que les paroles qu'à pu écrire Jarvis Cocker son fantastiques. Il sait parfaitement décrire la ville, le mode de vie des gens... je le trouve fascinant. En réécoutant certaines de ses chansons après m'être installée à Sheffield, j'ai compris et ressenti à mon tour le sens de ses chansons. A nous maintenant d'écrire nos propres chansons sur cette ville !

En tant que fans de Pulp, la décision de choisir Steve Mackey pour produire votre premier album était presque logique je suppose ?

Exactement. Lorsqu'on a commencé à chercher un producteur, on a d'abord demandé à Rough Trade si Jarvis Cocker était disponible, mais il était trop occupé à enregistrer son propre album et il n'avait encore jamais produit de disque. Steve Mackey ést vite devenu notre plan B... il avait déjà effectué ce genre de job, et le fait qu'il soit un ancien membre de Pulp a beaucoup pesé dans la balance. Il a fait de la musique pendant onze ans, il avait déjà produit le dernier album de M.I.A et il a vite compris qu'on cherchait à composer un bon disque de pop anglaise. Il n'est pas facile de passer de l'underground au grand public sans perdre son identité musicale, mais je crois que Steve nous a beaucoup aidé dans notre réussite.

Vous avez également collaboré avec Paul Epworth dans un passé récent, est-ce sa méthode de travail est différente de celle de Steve Mackey ?

Paul avait produit Separated By Motorways, mais nous avons depuis enregistré une nouvelle version avec Steve. Je serais incapable d'expliquer en quoi ces deux producteurs sont différents... avec Steve nous avons préparé un album complet alors que Paul n'était resté que trois jours en studio à nos côtés. Ils possèdent tous les deux leurs petits secrets, mais je préfère au final les versions des chansons sur l'album.

L'ensemble des chansons du disque ont donc été réenregistrées ?

Exactement. L'album contiendra aussi nos deux derniers singles produits par Steve Mackey, Weekend Without Makeup et Once And Never Again, dans des versions identiques à celles diffusées depuis quelques mois en radio. On a aussi eu la possibilité de travailler avec Erol Alkan récemment, il a produit les bsides de Once And Never Again. Il enregistre régulièrement des remixes pour de nombreux groupes, mais il n'avait encore jamais produit un disque jusque là. Il avait très envie de travailler avec nous alors on lui a proposé de s'occuper des bsides de notre nouveau single. L'idée lui a immédiatement plu. Il avait énormément d'idées et de suggestions pour améliorer nos chansons, en modifiant quelques notes de guitare par ci, en ajoutant un sample par là... c'est une personne très créative.

Comment envisagez-tu vos prochains disques après avoir travaillé avec tant de personnes différentes ?

Le fait qu'on soit tous très satisfaits du résultat nous pousse logiquement à vouloir travailler à nouveau avec ces mêmes personnes... mais on ne manquera pas d'écouter toutes les propositions qu'on pourra nous faire. Si quelqu'un de talentueux souhaite nous rencontrer, pourquoi ne pas essayer ?

Vous avez donc choisi le titre Someone To Drive You Home pour votre premier album, à quoi se rapporte-t-il ?

C'est un extrait des paroles de You Could Have Both, une des chansons du disque. Trop de groupes sortent des albums éponymes et on voulait vraiment trouver quelque chose de plus original, avec une vraie signification. On a réflêchi durant quelques temps à plusieurs idées et on a écrit une liste sur laquelle figurait Someone To Drive You Home. C'est un titre simple mais il nous plaît à tous, ce qui est le principal.

La plupart de vos chansons sont traitent de l'amour, de la vie ou des relations entre les gens. Est-ce que certaines ne sont pas quelque peu autobiographiques ?

Les textes de nos chansons sont écrites par Dorian et moi-même. Quand j'écris des paroles, je m'insipire systématiquement de mes expériences et de ma vie. Pour Dorian, c'est un peu différent car il tente d'écrire des chansons traitant d'histoires d'amour compliquées... avec une vision très féministe ! Mais c'est un mec, qui plus est impliqué dans la même relation depuis quelques années, et il ne peut qu'essayer d'imaginer comment sa vie pourrait mal tourner. On aime aussi s'inspirer d'histoires tirées de vieux films. Récemment j'ai regardé de nombreux films de David Lynch, comme Sailor et Lula ou Twin Peaks, et je pense que ça m'a marqué. De la même façon, Dorian est un grand fan du cinéma britannique des années 60.
Je pense que de manière générale mes chansons sont très romantiques et parlent des histoires d'amour déçues, de comment les gens ont pu évoluer ou s'échapper vers un monde meilleur. L'écriture me permet de sortir du monde réel et de laisser libre cours à mon imagination. C'est un échappatoire.

Peux-tu m'en dire un peu plus sur l'histoire racontée par votre nouveau single, Once & Never Again ?

C'est l'histoire d'une femme qui tente de conseiller une jeune fille déçue par une histoire d'amour. Son petit ami vient de la quitter, elle est très triste, et à travers ma voix cette femme tente de la consoler. Elle n'a que 19 ans, sa relation amoureuse n'a pas évolué comme elle l'espérait et elle le vit très mal. La fin de la chanson est ambiguë, notamment le passage "Oh, how I'd love to feel a girl your age", mais les gens doivent la comprendre comme de la nostalgie de ne plus être adolescente, de ne plus être insouciante comme beaucoup de jeunes filles à ce moment de la vie. C'est une chanson typiquement féminine, je pense que si un homme comme Dorian l'avait écrite toute l'histoire aurait été différente, beaucoup plus sinistre et dure !

Peux-tu me parler un peu de vos singles... les plus anciens n'étaient par exemple disponibles qu'en vinyle. C'est un format qui t'intéresse particulièrement ?

Oui ! J'adore les singles en vinyle, et quand ils sont en édition limitée tu as aussi le plaisir de les collectionner. C'est un peu un truc de geek, mais je sais que les fans veulent toujours posséder tous les disques de leurs artistes favoris. Pour moi le vinyle est un objet vraiment à part, totalement différent des CDs par exemple, et il a le plus souvent une certaine valeur... mais tout le monde ne peut pas s'en procurer.
Plus que la chanson, un bon single doit être présenté dans un beau packaging, avec parfois des bonus et bien entendu de bonnes bsides, c'est très important. On ne peut pas vendre à nos fans de vieilles démos ou des titres baclés, ce n'est pas respectueux envers eux. Aucun remix ni enregistrement live, uniquement des chansons inédites. Je pense que les groupes qui fonctionnent de la même façon que nous sont appréciés de leurs fans, ils encourangent la « culture fan club » en la rendant crédible et justifiée.

Vous n'avez jamais eu envie d'enregistrer des reprises pour vos singles ?

On ne l'a encore jamais fait, mais c'est une idée dont on parle parfois. Pour être honnête, on est incapable de choisir une chanson qui nous plait à tous ! Dorian me disait récemment qu'il aimerait beaucoup jouer une chanson des Pet Shop Boys. Ca me plairait aussi, leurs textes sont plutôt bon généralement.

Les pochettes de vos singles sont un peu particulières, un peu vintage et souvent associées à la chanson qu'elles représentent. Qui les a créées jusqu'à maintenant ?

C'est moi ! J'adore peindre et je m'occupe de nos pochettes depuis notre tout premier single. Tout cela fait partie de l'histoire des Long Blondes, de notre état d’esprit, de ce qu'on aime faire. Tout comme nos chansons sont parfois d'une autre époque, avec un certain sens glamour, ces pochettes sont une partie de notre identité. Dans notre musique on tire parfois nos influences des 60s ou des 70s, et je tente d'appliquer le même processus pour nos visuels.

Tu aurais aimé faire carrière dans l'art ?

J'aurais adoré ça si je ne m'étais pas autant impliqué dans un groupe de rock ! Peut-être qu'un jour j'aurais enfin le temps d'explorer cette voie, de vendre mes œuvres... quand j'aurais quarante ans, mais ce n'est pas pour tout de suite !

Le NME t'avait classée à la 39ème position de sa Cool List l'an dernier...

J'ai trouvé ça très flatteur, ça signifie que je suis cool... très cool ! (rires). Plus sérieusement, ça n'a pas beaucoup d'importance. L'année prochaine ils auront peut-être oublié mon nom, c'est vraiment très éphémère. J'espère que Screech, notre batteur, sera dans la liste l'an prochain, il est encore plus cool que moi !

J'ai vu que tu avais récemment posé pour le supplément mode du Guardian, comment en es-tu venue à faire ce genre de chose ?

Le magazine me l'a proposé. Je crois que notre style vestimentaire au sein du groupe est assez décalé et les gens l'ont vite remarqué. On ne fait pas ça par obligation mais uniquement parce que ça nous convient.

Tu n'as pas peur que des gens puissent aimer les Long Blondes plus pour leur look que la musique à cause de cela ?

Non, sûrement pas... tu ne peux pas aimer un groupe juste pour son style vestimentaire, tu dois aussi apprécier la musique. Mais si des gens s'intéressent à nous puis apprécient notre musique après avoir vu nos photos, ce n'est vraiment pas un problème pour moi. Quand j'ai rencontré le reste du groupe j'ai vite compris à leur style vestimentaire que nous avions des goûts en commun, et cela nous a beaucoup rapproché. Le coté glamour, un peu trash à la Debbie Harry... les gens savent reconnaître tout ça. Ils arrivent à te cerner et à savoir quelle genre de personne tu es et la musique que tu aimes écouter ou jouer. Cela nous rapproche. L'image que tu donnes au public est aussi importante que la musique, je ne t'apprends rien, mais les gens en font parfois un peu trop. On se contente simplement de suivre le modèle de nos idoles comme Blondie ou Jarvis Cocker. Rien de plus...

Il me semble que les autres musiciens du groupe sont en couple entre eux...

Désolé pour ta question, mais ce n'est plus le cas maintenant ! Il y a eu une séparation...

J'allais te demander quel musicien tu aurais souhaité recruter pour former le troisième couple !

Je ne sais pas, je n'arrive pas à imaginer. Et puis j'ai déjà un petit ami, je ne sais pas s'il apprécierait beaucoup cette idée ! (rires)

Durant les derniers mois vous avez eu l'occasion de jouer avec des groupes comme les Arctic Monkeys ou Franz Ferdinand. Est-ce que ce n'est pas trop compliqué de se produire devant tant de gens qui ne vous connaissent pas ?

Non c'est génial au contraire, on a beaucoup appris à leurs cotés. Ce sont des groupes qu'on apprécie en tant que musiciens, alors pouvoir assurer leurs premières parties c'est un peu un rêve. On a joué à l'Alexandra Palace de Londres avec Franz Ferdinand, c'était indescriptible. Notre musique n'est pas très éloignée de la leur et ce sont vraiment des mecs adorables. C'est un exemple qu'on essaye de suivre, un groupe avec beaucoup de très bonnes chansons et une forte identité visuelle. Ils ont un vrai style, leurs artworks sont toujours très spéciaux aussi... tu peux les reconnaître au premier coup d'œil. Je me souviendrais toujours de la monté d'adrénaline que j'ai ressentie en montant sur scène devant ces milliers de spectateurs. Personne ne nous connaissait à l'époque, d'autant plus que le public de Franz Ferdinand est devenu très mainstream désormais. C'était très stressant mais je suis impatiente d'avoir d'autres occasions de ce type.

Jouer dans ce genre de salle en tête d'affiche, c'est un de vos objectifs ?

Oui ! Depuis que le groupe existe on rêve de jouer dans les plus grandes salles du pays, devant des milliers de gens. Au début ce n'était qu'un fantasme car personne ne nous imaginait trouver un label, mais les choses ont changé ! On se rend compte que nos fans sont de plus en plus nombreux, et beaucoup de gens nous disent qu'ils apprécient beaucoup notre album. J'espère que le public en pensera de même et qu'un jour on jouera à nouveau à l'Alexandra Palace.

Quelles sont les salles qui vous font rêver ?

Il y en a beaucoup, à la fois au Royaume-Uni ou en Europe. J'aimerais aussi pouvoir jouer sur la scène principale dans les plus grand festivals d'été. Je réalise aussi que les salles dans lesquelles nous jouons changent régulièrement, on a commencé dans de petits clubs et désormais on peut se produire dans de bonnes salles. On a fait beaucoup de premières parties à nos débuts, mais petit à petit on prend de l'assurance et on peut jouer en tête d'affiche. D'une certaine façon ça nous permet d'explorer un peu plus nos capacités.

Tu es impatiente de revenir en France en décembre pour vos deux premiers concerts dans notre pays ?

Oui trè0... je veux savoir comment les gens se comportent dans le public, ce qu'ils pensent de notre musique ou de nos concerts. Je pense qu'il y a beaucoup de différences d'un pays à un autre, et j'espère qu'on pourra bientôt expérimenter tout ça.