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Big Deal

Interview publiée par Fab le 3 juin 2013

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Après un premier album enregistré sous la forme d'un duo guitares/voix, Kacey Underwood et Alice Costelloe, alias Big Deal, nous reviennent avec un son plus électrique et une formation scénique en quatuor. Désormais éloignés de l'univers folk auquel de nombreux observateurs les rattachaient à leurs débuts, les deux musiciens reviennent pour nous sur la métamorphose de leur univers et un attachement très marqué aux guitares.

Vous revenez au début du mois de juin avec votre second album, June Gloom, et un important changement dans votre son, désormais beaucoup plus électrique. Comment cette métamorphose s’est-elle produite ?

Alice : Après la sortie de notre premier album, nous avons progressivement éprouvé des difficultés à partir en tournée et donner des concerts en duo, qui plus est lorsque nous étions aux côtés de groupes plus étoffés que nous.
Kacey : Dans notre esprit, nous avons toujours été un groupe de rock. A nos débuts, nous pensions être capables d’exister sans batterie par exemple, mais dans certaines situations, comme en live, cela peut être plus compliqué. Au moment d’écrire de nouvelles chansons pour notre second album, nous ne pensions pas pouvoir continuer avec la même formule, il a donc été très simple pour nous d’évoluer. Nous prenons plus de plaisir désormais.

L’intégration de nouveaux musiciens à vos côtés a-t-elle été immédiate ou avez-vous conçu l’album à deux ?

Kacey : Nous avons continué à composer tous les deux avec l’aide d’une boîte à rythmes. Nous avons enregistré les premières démos dans cette configuration puis nous avons demandé à des amis d'un autre groupe de venir nous aider pour enregistrer la version finale du disque en studio. Leur présence nous a aidés à finaliser notre travail mais nous restons tous les deux à la base des chansons.
Alice : Il nous semblait évident que les nouvelles chansons seraient meilleures si nous les enregistrions et jouions en groupe et non plus en tant que duo. L’écriture même des chansons nous poussait à évoluer.
Kacey : Je pense que notre évolution s’est déroulée dans les deux sens. Nous avons simplifié certaines choses et en avons complexifiées d’autres.


Le fait de vous limiter à quatre musiciens était-il une évidence ? Avez-vous considéré la possibilité d’étendre plus encore le groupe ?

Alice : Je suis incapable de jouer d’autre chose que de la guitare alors je ne m’imaginais pas incorporer des instruments supplémentaires dont je ne connais rien ou presque...
Kacey : Nous aimons particulièrement les guitares. J’aime jouer avec le son de cet instrument, le faire sonner parfois comme une guitare et d’autres fois comme un clavier par exemple. Je veux que notre musique reste directe, je détesterais utiliser un clavier sur scène par exemple, cela ne nous correspondrait pas. Les pédales d’effets nous permettent de déjà de faire varier beaucoup le son des guitares. Je ne crois pas que nous pourrions avoir une harpe ou un quatuor de cordes avec nous (rires) !

Vous avez souvent été comparés à des groupes folk à vos débuts mais l’aspect rock de votre nouveau disque est en passe de faire évoluer cette image...

Alice : Notre musique peut être comparée à n’importe quel style à partir du moment où ce n’est pas du folk (rires). L’évolution de la façon dont nous sommes perçus est donc clairement un point positif...
Kacey : Les comparaisons sont souvent frustrantes mais je comprends ce besoin de classifier ce qui est nouveau. C’est un mode de fonctionnement établi. J’apprécie certains artistes folk mais très peu de modernes, mes goûts sont plus orientés vers le rock.

L’écriture de votre nouvel album s’est étalée sur une période d’un an, imaginiez-vous un tel laps de temps lorsque vous avez commencé à travailler dessus ?

Alice : Nous n’avons pas réellement travaillé dessus durant an, nous étions souvent en tournée en parallèle. Sa genèse s’est étalée sur une période de six mois, nous n’avons achevé au mois d’octobre dernier.
Kacey : Nous avons pris notre temps, nous n’avons pas voulu aller trop vite, cela ne nous aurait rien apporté. Nous nous sommes donnés une deadline avec l’idée de sortir ce disque en début d’année 2013 afin de pouvoir à nouveau partir en tournée en tant que groupe. L’écriture a réellement débuté peu après le festival SXSW en mars 2012 et l’enregistrement s’est achevé en octobre après deux semaines en studio. Après, il nous a fallu être patients et attendre que tous les détails à la charge de la maison de disques soient réglés.

Ce disque a été composé à Londres et en Californie, deux lieux très différents. Cela a-t-il eu une influence sur votre écriture ?

Alice : Je pense que les chansons écrites en Californie peuvent sembler plus joyeuses que celles qui l’ont été à Londres en raison de la nature même de ces deux lieux.
Kacey : Je ne suis pas tout à fait d’accord ! Ces chansons peuvent sonner plus joyeuses mais elles sont en réalité bien plus tristes ! De toute manière, peu importe où tu es, le lieu a toujours un impact sur toi et ta musique.
Alice : Au final, je pense que l’influence américaine a été plus importante.
Kacey : Les chansons sont plus américaines au final. Le lieu et ton entourage t’influencent toujours quand tu écris. Lorsque je rentre en Californie, je suis auprès de ma famille mais il y a toujours de petites tensions. Les choses semblent plus faciles mais elles sont parfois plus difficiles...


Vous avez partagé l’écriture du disque entre ces deux lieux, mais comment fonctionnez-vous par rapport au fait que vous chantez et jouez chacun de la guitare ?

Alice : Cela dépend vraiment des chansons. Parfois l’un de nous deux traite une idée du début à la fin mais d’autres fois un commence et l’autre reprend ensuite le travail en cours. Certaines chansons sont des hybrides du fait que notre fonctionnement est pleinement collaboratif.
Kacey : Nous nous approprions parfois les chansons de l’autre, nous partageons tout ce qui est nécessaire.

Votre disque a été produit par Rory Atwell, connu notamment pour avoir joué dans Test-Icicles et d’autres groupes punk de Londres. Pouvez-vous m’en dire plus sur ce choix ?

Alice : Il est toujours resté très ouvert par rapport à ce que nous voulions faire de ce disque. Nous partageons un fort intérêt pour les guitares avec lui, il était donc facile d’aller là où nous le voulions.
Kacey : Il écoute beaucoup de groupes chez lesquels les guitares sont primordiales, les mêmes groupes que j’apprécie moi aussi. Il comprenait donc facilement ce que je lui expliquais, ce que je cherchais à créer. Il connaissait nos références et a donc pu se rendre très utile au moment d’enregistrer les chansons. Il n’était pas dirigiste, toujours très ouvert par rapport à nos idées.
Alice : Du fait qu’il a joué dans de nombreux groupes, il sait qu’il est inutile de pousser un musicien à aller dans une direction qui ne lui convient.
Kacey : C’est un producteur qui a su conserver sa vision de musicien. C’est une excellent technicien, très doué.

Auriez-vous pu enregistrer ce nouvel album avec une autre personne ?

Kacey : Nous avons travaillé avec deux autres personnes pour deux chansons mais nous n’avons pas vraiment réfléchi à la question ou fait d’essais. Nous savions dès le départ que nous voulions collaborer avec lui.
Alice : On nous a suggéré beaucoup de noms, des personnes souvent connues avec de bonnes références... Elles auraient sans doute été aptes à produire ce disque mais ce n’est pas ce que nous voulions. Plutôt que de choisir quelqu’un qui aurait sans doute voulu apporter sa touche au disque, nous avons trouvé quelqu’un dont les idées étaient les mêmes que les nôtres.
Kacey : Pour résumer, Rory était notre choix premier, mais par la première personne avec qui nous avons travaillé (rires) !

La première chanson tirée du disque, présentée il y a quelques mois, fut Teradactol. N’était-ce pas un choix risqué du fait que c’est sans doute la chanson la plus violente que vous ayez jamais enregistrée ?

Kacey : C’est pour cette raison que nous l’avons choisie ! Nous vous voulions en quelque sorte choquer les gens.
Alice : Nous nous sommes dit que si notre public est capable d’accepter une telle chanson, le reste du disque ne serait pas un problème.
Kacey : C’est aussi la première chanson que nous avions enregistrée pour l’album. A l’époque nous n’avions pas encore trouvé de musiciens et nous avions donc utilisé la boîte à rythmes que tu peux entendre sur la version studio. Nous avions été aidés par une personne baignant dans le monde de l’électronique et qui avait travaillé avec Metronomy notamment. Je suis content du résultat que nous sommes parvenus à obtenir.


N’avez-vous pas craint une réaction négative de vos fans avec un tel changement ?

Alice : Nous l’avions évoqué avec des connaissances et un ami nous a dit « Vous devez enregistrer le disque que vous avez envie de jouer sur scène durant les deux années à venir ». Il était inconcevable d’enregistrer un second disque à l’image du premier alors nous avons vraiment fait les choses selon nos propres envies. Après tout, quel aurait été l’intérêt d’aller contre nos idées ?
Kacey : Si nous ne prenons pas de plaisir à jouer nos nouvelles chansons, je pense que personne d’autre ne pourra en prendre non plus. J’aime à penser que si quelqu’un a aimé notre premier album, c’est aussi pour les chansons et pas seulement pour le fait qu’il soit calme ou plus violent, qu’il y ait de la batterie ou non... Je pense que ces chansons sont toujours des chansons de Big Deal. Et si certaines personnes n’apprécient pas ce changement, et bien tant pis...

Pouvez-vous m’en dire plus sur le titre de l’album, June Gloom ?

Kacey : Nous avions initialement choisi un titre beaucoup trop long et nous l’avons au final restreint au simple « June Gloom ». J’aime sa sonorité. Je me suis inspiré de ma mère pour le trouver. Elle apprécie beaucoup le temps en Californie, il fait toujours beau... sauf au mois de juin. Elle se plaint constamment à cette période de l’année et j’ai trouvé amusant d’y faire référence.

La sortie de votre nouvel album va s’accompagner de nombreux concerts. Je crois que vous n’avez pas encore vraiment pu rôder votre nouveau line-up...

Kacey : C’est excitant mais aussi très effrayant. Nous n’avons pas encore donné dix concerts tous ensemble, mais progressivement nous prenons nos marques et cela devient plus facile... et moins effrayant (rires). Lors de notre dernier concert à Paris, cela avait été tout aussi effrayant mais pour différentes raisons : nous n’étions à l’époque encore que deux sur scène et nous ne nous entendions pas du tout jouer. Le public avait été très bruyant. Maintenant, compte-tenu de notre musique, nous ne craignions plus rien de ce point de vue !