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Lanterns On The Lake

Interview publiée par Emmanuel Stranadica le 3 mars 2016

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Lanterns On The Lake, malgré ce nom évoquant calme et délicatesse, ont sorti en fin d'année dernière l'excellent et très puissant Beings. Ce troisième album a permis aux anglais de Newcastle de nous montrer combien leur son avait évolué depuis leur premier opus, Gracious Tide, Take Me Home paru en 2011. A l'occasion d'un concert donné au Point Ephémère en février dernier, Sound Of Violence a échangé avec Hazel Wilde et Oliver Ketteringham, respectivement guitariste/chanteuse et batteur du groupe. Retour sur cette jolie rencontre.

Beings débute, juste avant que ne commence à proprement parler Of Dust & Matter, avec ces sons qui s'apparentent à un ajustement d'une fréquence. Est-ce juste une introduction ou a-t-il fallu que vous vous ajustiez lors de votre entrée en studio pour trouver à quoi allait ressembler ce troisième album ?

Hazel Wilde : Nous avons eu besoin de trouver le bon ajustement avant d'enregistrer cet album. Peut-être que cette introduction est une simple coïncidence mais ça nous plaisait d'avoir ces sons au début du disque, un peu comme si nous étions à la recherche d'une fréquence.
Oliver Ketteringham : C'est vrai que ça peut paraître un peu maladroit de démarrer le disque ainsi, comme si tout n'était pas proprement arrêté. Par le passé, tout avait pu paraître si gracieux, et nous souhaitions vraiment trouver quelque chose d'un peu différent, d'un peu étrange. On a trouvé que c'était une bonne façon d'introduire les chansons de ce nouveau disque. On espère d'ailleurs que ça a un peu perturbé notre audience.

Je pense que nous avons eu des moments compliqués pour chacun de nos disques.

Vous n'avez pas connu le fameux syndrome du difficile troisième album ?

Hazel Wilde : Nous l'avons connu avec le second ! (rires) Je pense que nous avons eu des moments compliqués pour chacun de nos disques. Le fait de structurer les chansons différemment d'un album à l'autre entraîne inévitablement un processus difficile. Cet album fut probablement le plus simple de tous à de nombreux niveaux, malgré le fait qu'il soit très sombre. C'est le plus personnel que nous ayons sorti mais globalement il fut facile à concevoir. C'est un disque très honnête et organique.
Oliver Ketteringham : En fait, ce fut un disque plus simple parce que nous avons beaucoup moins essayé de faire les choses. Nous avons prêté beaucoup moins d'attention à ce qu'on a pu dire sur nous par rapport à l'album précédent. Alors qu'après le premier disque, nous avons pu être influencés par certains commentaires vis-à-vis de celui-ci et les répercuter sur la réalisation du second album. Nous avions acquis une certaine expérience au moment de Beings et avons voulu en tirer pleinement les effets en réalisant cet album à notre façon sans devoir écouter qui que ce soit. Ça l'a rendu plus personnel et probablement plus facile à concevoir.

Il y a une vraie puissance dans le disque. La batterie est parfois très lourde. C'était important de donner cette intensité sonore à Beings ?

Hazel Wilde : Je pense que c'est important qu'on donne cette intensité à notre musique aussi bien sur scène que sur disque. Nous pensons beaucoup à la manière de communiquer nos chansons aux personnes qui nous écoutent. Pour la batterie, Oliver a essayé de très nombreux effets sonores afin de représenter au mieux celui que nous cherchions à donner à nos chansons. C'est vraiment communiquer notre ressenti musical qui nous importe.
Oliver Ketteringham : Je pense que la moitié des chansons de l'album nous est venue naturellement. Les autres ont nécessité plus de temps, plus de travail. Ce fut le cas pour Of Dust & Matter qui débute l'album mais qui fut la dernière à être achevée. Nous avons passé plus d'un mois pour la finir. Notamment, pour aboutir à la partie de batterie. On a expérimenté bon nombre de sonorités avant de trouver ce qui pouvait lui correspondre parfaitement.


Votre précédent album, Until The Colours Run, sonnait très live. Pour Beings c'est différent. Il sonne également live mais le travail sonore en studio semble indiscutable. Est-ce que vous étiez à la recherche de ce son depuis vos débuts ?

Hazel Wilde : Tout d'abord, il faut signaler que nous n'avons pas de studio. Nous avons une chambre libre que nous utilisons pour enregistrer. Ensuite, il est très juste que nous avons été à la recherche de certaines sonorités présentes sur Beings depuis très longtemps. Ils sont d'ailleurs beaucoup plus représentatifs de la manière dont nous sonnons aujourd'hui. Paul a beaucoup à faire car nous ne travaillons pas avec un producteur. C'est lui qui s'occupe de tout. Il a acquis de l'expérience et sait maintenant vraiment comment enregistrer notre musique.
Oliver Ketteringham : On possède davantage de matériel qu'auparavant, notamment plus de micros. C'est plus simple pour enregistrer les sons qu'on cherche à capturer. Mais je pense que ce qui est important pour nous vis-à-vis de Beings, c'est d'avoir su saisir l'ambiance de ce si petit espace dans lequel nous avons enregistré le disque. C'est quasiment uniquement nous qui jouons sur l'ensemble du disque, il n'y a presque pas de travail d'arrangements supplémentaires. C'est assez brut. Nous avons vraiment voulu enregistrer les chansons comme si nous allions les jouer en live.
Hazel Wilde : Nous avons enregistré ce disque à la Biscuit Factory de Newcastle. Ce fut une usine de fabrication de biscuits mais dorénavant c'est surtout utilisé par des musiciens pour enregistrer ou répéter. Ça ressemble à la pièce dans laquelle nous nous trouvons actuellement.

Quelle est la signification de Beings ? Cela a un rapport avec les êtres humains ?

Hazel Wilde : Oui, il y a un rapport. Il y a également une chanson qui porte ce titre sur l'album. On a essayé de trouver un titre qui correspondait vraiment au disque. On a choisi Beings à cause de l'ambiance ainsi que les thèmes musicaux présents sur l'album. Cela définit également l'idée de l'existence et d'être connecté avec les autres personnes sur la planète, avec cette éternelle interrogation sur pourquoi sommes-nous ici et comment pouvons-nous dialoguer entre nous ?

Est-ce qu'au vu de la pochette très colorée de Beings, on peut considérer qu'avec ce disque vous êtes arrivés à cet endroit que vous mentionniez sur votre album précédent, Until The Colours Run?

Hazel Wilde : C'est une question très profonde ! (rires) Je vais réfléchir à cela tout à l'heure (rires).
Oliver Ketteringham : Ce qui nous importe, c'est cette figure géométrique noire située au milieu de la pochette. Elle est vraiment connectée à l'univers de Beings. L'un des thèmes abordé dans ce disque c'est la lutte pour survivre et cela peut s'apparenter au décalage que ce trou noir crée par rapport au reste de la photo.

Sur notre premier disque, nous n'avions pas encore conscience de la tournure exacte que nous cherchions à donner à notre musique.

Le piano a trouvé une place de choix dans votre musique. Le violon se fait par contre beaucoup plus discret. C'est une évolution naturelle de votre son qui veut ça ?

Hazel Wilde : Sur notre premier disque, nous n'avions pas encore conscience de la tournure exacte que nous cherchions à donner à notre musique. Nous jouions notre musique live sans trop nous poser de questions et la sonorité de Gracious Tide, Take Me Home ne peut s'avérer que différente des deux albums qui l'ont suivi. Certains instruments comme la guitare ont eu davantage besoin d'espace pour respirer afin de trouver leur place dans nos compositions. C'est le cas de la guitare de Paul et en conséquence d'autres instruments occupent maintenant un espace sonore très différent, plus discret, c'est le cas du violon. Et puis nous ne voulons surtout pas répéter la même musique d'un disque à l'autre car nous évoluons. Peut-être que sur notre prochain disque, il n'y a aura que de la batterie (rires).

Stepping Down est le morceau le plus électronique que vous ayez jamais sorti. Est-ce un morceau que vous avez totalement improvisé en studio ?

Hazel Wilde : Tout est parti d'un extrait musical que Paul avait composé. Il nous a proposé cette idée très différente de ce que nous avions fait par le passé et nous avons tous adoré. On s'est donc attelé à travailler ce morceau ensemble. La semaine dernière, nous avons donné un concert à Gateshead avec un orchestre symphonique. Nous avons recréé ce morceau électronique avec l'orchestre sur scène qui a rendu le résultat naturel et organique. Ce fut une expérience vraiment incroyable.


Beings se conclut avec ce petit instrumental, Inkblot. Est-ce que ça s'apparente un peu à un retour au calme après la tempête générée par Stuck For An Outline ?

Hazel Wilde : Stuck For An Outline est une chanson très puissante. Elle diffère un peu par rapport au reste de l'album. Les guitares, la batterie, surtout à la fin, sont vraiment lourds. Aussi, on a pensé que ce serait une jolie manière de terminer le disque avec Inkblot, un morceau qui semble un peu en suspens. Mais il y a surtout une lueur d'espoir dans celui-ci. D'un côté, on peut le trouver paisible, mais le fait qu'il soit un peu inabouti peut laisser présager du pire.