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Paris, Fête de l'Humanité - 13 septembre 2013

Live-report par Olivier Kalousdian

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Seul rendez-vous français mêlant rock et politique, la Fête de l’Humanité (du nom du quotidien communiste) prouve, depuis 1936 avec son incroyable longévité, que la musique, qu’elle le veuille ou non, est un art engagé. L'huma, comme on la surnomme, est une fête populaire par essence qui a pour but de récolter de l’argent pour la cause des travailleurs. Des mineurs en grève de 1930 au Front Populaire en 1936 en passant par le million de personnes venues en 1945 fêter la Libération et l’avènement du parti communiste Français, la Fête de l'Humanité prend ses quartiers d’automne à la Courneuve à partir de 1960 et au parc départemental de La Courneuve contigu à l'aéroport du Bourget à partir de 1999.

Pour sa soixante-dix-huitième édition (si l’on excepte les années d’occupation), l'Huma et le Parti Communiste sont au plus mal. Financièrement parlant, l’argent récolté pendant les trois jours que dure la fête sert essentiellement à renflouer les caisses du quotidien et des fédérations régionales du parti qui ont chacune un stand. L'événement n’a aucune velléité à concurrencer les festivals rock et son affiche est toujours très limitée, ne serait-ce que pour des raisons de budgets ; mais il y a eu des années où les Madness côtoyaient les Simple Minds sur la grande scène et où The Kooks, Iggy Pop, New Order ou Patti Smith attiraient de très nombreux inconditionnels.
Avec Asian Dub Foundation et Archive dans la foulée (entrecoupés de l’inévitable groupe itinérant Français Tryo) sur la grande scène, c’est encore ce vendredi 13 septembre qui recueille le plus de ferveur. Mais, avec une météo digne d’un mois de mars et une morosité nationale entretenue par tous les médias de France et de Navarre, les allées habituellement noires de monde sont tristement clairsemées. Même les légendaires monceaux de déchets entreposés au milieu de celles-ci (l’écologie n’est pas encore au programme du parti !) font peine à voir ; à peine un mètre de haut...

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Quand démarre le concert d’Archive, à vingt-deux heures pile, la plaine devant la grande scène est morne. Seul son centre est occupé par quelques milliers de festivaliers. C’était sans compter sur les premières mesures hypnotiques du titre qui, depuis cette année, ouvre les sets du groupe, le spatial Finding It So Hard et ses douze minutes avec entracte, de doubles percussions syncopées. Sonnant le rassemblement, les fédérations PC alentours se vident au bénéfice du premier titre du concert phare de ce premier jour de fête. Toujours sans leur guitariste Steve Harris et leur chanteuse Maria Q, Archive clôt une saison de festivals qui, du Midem à Cannes en janvier à Fourvières en juillet en passant par Strasbourg en mai, aura été parmi les plus chargées de leur carrière.
Avec l’album With Us Until You're Dead sorti mi-2012, le groupe a encore augmenté sa notoriété et son aura en fédérant de plus en plus d’inconditionnels autour de son style musical inclassable. De l’espace presse à la plaine de la grande scène, c’est une foule de sept à soixante-dix-sept ans qui se délecte de la centrale à sons implantée tout le long de la grande scène et composée de Darius Keeler, Danny Griffiths, Pollard Berrier, Dave Pen, Smiley, Jonathan Noyce et la petite dernière, la chanteuse Holly Martin. Douze titres et quelques modifications de setlist par rapport à Fourvières avec le titre Again joué en milieu de set ; il n’y aura donc pas de rappel.

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Quand la fluette Holly Martin entre en scène pour le titre Hatchet, la pluie nous rappelle que l’automne est en avance cette année. La puissance électrique engloutie par l’armée d’instruments et de machines présentes sur scène aura vite fait de sécher des gouttes qui n’entameront jamais l’enthousiasme du public qui se réchauffe, titre après titre.

Fidèle à lui-même, Darius bat la mesure de son poing rageur, jouant du clavier debout ; un détail... Danny, toujours à droite de la scène ne porte plus sa casquette derrière laquelle il assume sa discrétion légendaire. Pollard semble accuser le coup de cette saison sans fin tout en plaisantant avec son chef d’orchestre et Smiley tape toujours aussi précisément ce tempo doublé par les boîtes à rythme complexes du groupe. Quant à Dave, le sombre et seyant autre chanteur/guitariste du groupe, il apparaît encore une fois comme la pièce maîtresse des titres les plus attendus par cette audience. Fuck You, repris en chœur, Again, dans une interprétation similaire à celle de Fourvière et empreinte d’une émotion sans pareil, et le redoutable Finding It So Hard. Autant de titres admirablement chantés par Craig Walker aux temps de l’album You All Look The Same To Me et qui ont connu une deuxième jeunesse dans la voix de Dave Pen.

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La pluie, la fraîcheur d’automne et ce set réduit n’auront pas tellement affecté cette prestation qui ne restera pas la meilleure du groupe. Même si, pour le meilleur et pour le moins bon, la précision des titres d’Archive en live ne laisse que peu de places aux interprétations à tiroirs, il semble difficile de lasser le public, notamment français, des envolées krautrock et ambient d’Archive.

Il est temps pour eux de se remettre au travail afin de nous gratifier, une fois encore, d’un peu de cette matière noire mystérieuse qui a le pouvoir de fédérer plusieurs galaxies musicales entre elles en donnant naissance à des amas lumineux encore à l’étude d’où émanent des sons étranges qui n’en finissent plus de faire voyager un public désireux d’univers inconnus.
setlist
    Finding It So Hard
    Wiped Out
    System
    Hatchet
    Sit Back Down
    Conflict
    Violently
    Again
    Fuck U
    Kings of Speed
    You Make Me Feel
    Dangervisit
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