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Tirzah

Paris, Badaboum - 22 septembre 2023

Live-report par Franck Narquin

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Peut-on parler de déception ? Pas vraiment tant on sait que la scène n'est pas le terrain de jeu préféré de Tirzah. Incapable de se défaire de sa timidité maladive et de masquer son malaise face à une foule, les concerts de la brillante anglaise ont toujours ressemblé à des séances de tortures qu'elle s'infligerait elle-même.

Peut-on parler de frustration ? Un peu tant l'inventivité formelle et la grâce se dégageant des ses trois albums en font l'une des artistes les plus excitantes de sa génération tandis que ses prestations live paraissent d'une abyssale platitude où aucune idée de mise en scène, aucune proposition artistique ne sont mises en avant pour composer avec ses difficultés intrinsèques. Si cette ultra sensibilité s'avère un atout en studio, sur les planches elle devient un réel fardeau. Si Tirzah était une débutante, on pourrait presque trouver cela touchant, mais à son niveau de carrière, on se dit qu'elle a clairement lâché l'affaire.


Peut-on parler d'agacement ? Pour le moins tant le principe d'une courte tournée européenne en clubs et salles intimes frappait par sa pertinence, offrant des écrins adaptés au caractère timoré de la chanteuse et laissant enfin entrevoir une éventuelle communion avec le public. C'est peu dire que nos espoirs seront balayés d'un simple revers de main. Accompagnée d'un DJ relégué à l'ombre et au fond de la salle et dont le seul rôle sera de lancer la piste sonore instrumentale de chaque titre, Tirzah ne proposera à un Badaboum pourtant plein à craquer et acquis à sa cause qu'un vulgaire showcase d'à peine quarante-cinq minutes. Nous aurions pu mettre son dernier album en lecture aléatoire dans le noir à la maison, le résultat aurait été le même. Tirzah, dieu sait à qu'elle point je t'admire, mais tu t'es comportée ce soir comme un vulgaire rappeur américain en goguette sur le vieux continent, uniquement venu encaisser son chèque et se foutant royalement du public.


En conclusion, on peut parler de ce concert comme d'une frustrante et agaçante déception. Pourtant de multiples solutions s'offrent aux grandes timides quand vient l'heure de se produire sur scène. Ne pas faire de concert du tout comme Françoise Hardy. Prendre une posture arty et radicale, voire presque arrogante, mais proposant une expérience inédite aux spectateurs comme bar italia. Se gaver d'héroïne et s'ouvrir les veines face au public comme Daniel Darc. Regarder ses chaussures en faisant beaucoup trop de bruit comme My Bloody Valentine. Ou bien ne rien faire de tout ça et n'offrir que frustration, agacement et déception comme Tirzah.