Le duo King Hannah vient officiellement présenter
Big Swimmer, son deuxième album sorti avant l'été. Une bonne grosse pluie a lavé le ciel, l'air s'est rafraîchi et nous rappelle que l'automne approche. Il flotte un parfum d'avant week-end dans le 20ème arrondissement, et notamment dans la Maroquinerie dont la cour et le bar sont bondés.
La Suissesse
Pina Palau ouvre le concert. Elle a été invitée par le groupe à se joindre à leur tournée il y a quelques semaines seulement. Quand elle a reçu la proposition sur Instagram, Pina a d'abord cru halluciner, mais il n'y avait pas d'erreur. Seul problème, il ne restait qu'un siège dans le tour bus, le reste de son groupe a donc dû rester à Zurich. C'est ainsi seule avec sa Telecaster qu'elle nous joue ses chansons, des histoires personnelles qu'elle prend la peine de présenter à un public attentif. Ses complaintes folk et intimiste collent bien avec le thème de la soirée et préparent à la suite.
Quand les lumières s'éteignent à nouveau après une courte pause, c'est d'abord un rythme de batterie qui résonne, suivi par des nappes de synthé. Des bruits de guitares finissent par se faire entendre, et Hannah Merrick arrive sur scène dans une robe flamenco rouge et flamboyante. Craig Whittle et le reste du groupe sont plus casual, en jean, ils ont plutôt l'air de rentrer chez eux après avoir coupé du bois.
Le son live est plus dur et étonnamment plus riche que sur l'album, les riffs de guitare occupent bien l'espace. Une fois les couplets passés, le claviériste passe à la basse et Hannah prend aussi une guitare, l'atmosphère s'électrifie davantage. Dans cette ambiance de western, la Maroquinerie est transportée à El Paso, ou franchement plus au Nord dans les grandes forêts canadiennes tant l'accumulation de riffs électrisant et leur montée psychédélique rappellent davantage Godspeed You! Black Emperor que l'americana tranquille.
Après ce démarrage radical, la musique se calme un peu, mais l'ambiance et l'intensité restent au maximum. La voix suave et presque écorchée de Hannah sur
The Mattress nous plonge plutôt dans une cave de Jazz à 4h du matin, mais il y a toujours ces riffs de guitares avec une disto à vous arracher les plombages.
J'attendais un concert tranquille, pas un show aussi puissant et au décollage immédiat. Hannah semble aussi de cet avis et nous dit que c'est déjà son concert préféré de la tournée. Sur
Milky Boy, il y a toujours cette tension entre un chant très froid presque martial, le rythme en forme de ballade et les rugissements de guitares à la Neil Young. C'est la force de ce duo, doublé sur scène par la section rythmique.
Certes ça ne pogote pas, mais ça dodeline de la tête et les fans se déhanchent sagement. Certains visages grimacent dans le trip. Entre
Go-Kart Kid (Hell No), seul morceau de leur premier album joué ce soir, et
This Wasn't Intentional, Hannah revient sur son précédent commentaire : « je crois que c'est mon show préféré de tous les temps en fait ».
A mi-concert, j'en ai assez vu pour savoir que ce concert sera dans mon top 10 de l'année. Ce set d'une simplicité redoutable recherche la perfection. Le son impeccable et les lumières tamisées contribuent à nous emporter loin de Paris et hors du temps. Les longues plages instrumentales à la fin des morceaux fonctionnent merveilleusement bien, Je les attends à chaque fois, et je voudrais qu'elles ne s'arrêtent jamais. Vive les morceaux de douze minutes ! C'est une expression j'ai bien entendu laissé mon chronomètre à la maison et, comme je l'écrivais plus haut, la Maroquinerie a été kidnappée et placée hors du temps. Dans ce récital parfait, se glissent toujours quelques détails inattendus, par exemple que Craig chante aussi sur
John Prine On The Radio, et sa jolie voix musicale se marie très bien avec celle d'Hannah. Il devrait faire plus de duos.
New York, Let's Do Nothing, me donne furieusement envie de prendre un billet pour les Etats-Unis. Avec deux albums et un EP à leur actif, je classe déjà King Hannah parmi ces géants scéniques, mais comme les meilleurs voyages, le concert touche à sa fin. Le groupe peut être tout sourire, il nous régale et la crème brûlée va bientôt nous être servie. En
interview, le groupe s'émerveillait d'avoir rempli le POPUP!, ils ont vu plus grand ce soir avec la Maroquinerie. Hannah remercie une dernière fois le public, dont ses parents qui ont fait le déplacement, et nous invite à une séance dédicace après le concert.
Hannah revient seule avec une guitare pour commencer
Big Swimmer. Elle est rejointe par Craig pendant le refrain, puis le reste du groupe, mais ce sera l'unique morceau en rappel. Le second rappel aura lieu le 18 décembre à la Gaîté Lyrique, vous seriez bien avisés d'aller les voir. Et moi aussi peut-être, je veux m'assurer que je n'ai pas rêvé cette soirée magique.