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Friendly Fires

Interview publiée par Olivier Kalousdian le 12 mai 2011

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Pour notre rendez-vous avec Friendly Fires, il est encore tôt pour un groupe dont la moyenne d’âge des membres est inférieure à 25 ans : 11h du matin. Il fait déjà chaud dans Paris et un nouvel incendie basé non loin des locaux de Beggars Banquet provoque des embouteillages qui freinent même les deux roues. J’arrive en retard et retrouve les trois membres fondateurs de Friendly Fires en train de petit déjeuner à coup de pains au chocolat dans une petite cour...

Votre single Paris a fait un petit carton en France presque un an après que Radio Nova ait propulsé In The Hospital au rang de tube électro chic dans les soirées de la capitale. Entretenez vous une relation spéciale avec Paris et la France ?

Ed : Le titre Paris n’est pas à proprement parler un titre qui traite de cette ville. Il parle du fait que n’importe où ailleurs cela semble toujours mieux que là où tu es présentement. Paris représente beaucoup de choses dont j’aime à me souvenir dans ma vie passée et j’ai pensé que ce serait un bon titre pour le sujet évoqué... et, honnêtement, je ne mesure pas encore si nous sommes vraiment célèbres en France mais j’aime bien penser que nous sommes de plus en plus connus. J’espère néanmoins que ce titre n’est pas apparu comme un coup de cirage de pompes vers les Français (rires) ! Ce n’était pas le but recherché non plus.

Ce titre concernait donc toutes les capitales dans le monde, comme une invitation à voyager pour découvrir d’autres pays, d’autres cultures ?

Ed : C’est ça. C’est une invitation à s’évader, à aller visiter d’autres endroits que là où tu te trouves. C’est le thème central du premier album. Je pense alors que Pala serait plutôt à l’opposé. Célébrer le moment présent et le lieu où tu es pour en faire un endroit paradisiaque quoi qu’il arrive.
Edd : Pour revenir à In The Hospital et Radio Nova, nous avons été surpris car ce titre n’a fait nulle part le carton qu’il a fait en France !

Est ce pour cela qu’il n’existe pas de clip vidéo de ce titre alors que, par rapport à votre récente carrière, vous en avez déjà mis beaucoup en boite pour d’autres singles ?

Jack : C’est parce qu’il n’a été considéré comme un bon single qu’en France. Et, paradoxalement, nous n’avons pas souvent beaucoup de bonnes idées de scénarios pour nos vidéos clip. On ne peut pas faire une vidéo sur tous nos titres mais peut-être que nous sortirons un live de ce titre en particulier pour en faire une vidéo correcte.
Ed : Nous l’avons joué live à Taratata (diffusé le 1er mai 2009) et j’ai vu cette captation sur Internet. Nous venons de jouer un autre live à Taratata, il y a une semaine, avec Live Those Days Tonight, notre nouveau single.

En duo ?

Ed : Non. Mais nous avions fait un duo avec Sliimy en 2009 dans la même émission. En fait c’était une reprise de Michael Jackson, Human Nature. Sliimy était très sympa mais je pensais que s’aventurer à reprendre du Michael Jackson était assez dangereux !

Surtout en duo avec Sliimy (rire général) ?!

Ed : Depuis, nous n’avons plus trop entendu parler de Sliimy ! Il s’est complètement évanoui dans la nature !
Jack : Il a signé sur la maison de disques de Paris Hilton... donc, ceci explique peut-être cela (ndlr : en réalité, Jack confond Paris Hilton et Perez Hilton qui a effectivement aidé certains artistes comme Mika et Sliimy a faire leur trou aux Etats-Unis).
Ed : Ça me fait de la peine, il avait l’air d’être un bon gars. Enfin, je ne parle pas de sa musique bien sûr...

Pour revenir à vous, votre musique et votre énergie ont souvent été comparées à celles de groupes comme Passion Pit ou MGMT... dans des styles qui vogueraient entre electro tropical et electro pop. Que pensez-vous de cela ?

Ed : Nous sommes évidemment influencés par nombre de groupes ou styles de musique et nous aimons beaucoup les rythmiques et les percussions ethniques, voire tropicales, notamment sur un titre comme Kiss Of Life. Mais je ne suis pas fan du terme electro pop ou même indie pop car l'électronique a tellement de signification possible et intègre tant de styles que ça ne veut plus rien dire. Dans le passé, l’électro c’était l’électro, et l’électro française c’était encore autre chose. Je préfèrerais largement que l'on nous présente comme un groupe pop, rien d’autre. Et notre nouvel album sonne justement pop et pas électro. Pour ce qui est d’être comparés à MGMT ou à Passion Pit, je ne pense pas que nous sonnions comme eux. En même temps, dire que nous sommes un groupe pop est aussi vague que de dire que nous sommes un groupe électronique !

Pour rester dans les comparatifs de mauvais goût, que pensez-vous du terme « shoegazing de luxe » dont vous avez été affublés par certains médias ?

Jack : Shoegazing de luxe ?
Ed : Voilà une expression que je répéterais mais je ne pense pas que nous la représentions. Même avec le Luxe en plus, nous ne serons jamais un groupe qui joue noisy, le regard sur les chaussures et les effets à fond les gamelles sur un shoegazing de quatre minutes !
Jack : Et The Jesus And Mary Chain et My Bloody Valentine faisaient cela si bien...
Edd : Je pense que le shoegazzing dénote également une totale absence de funk dans le style, ce qui n’est pas notre cas.

Votre nom, Friendly Fires est un hommage à un titre du groupe Section 25, formation cold wave du label Factory dans les années 80. Pourtant, vos messages sont diamétralement opposés. Pourquoi, selon vous, les groupes d’aujourd’hui sont-ils généralement moins engagés politiquement que ne l'étaient les groupes de la fin des années 70s ou du début des années 80s ?

Ed : Je pense que c’est l’attitude de la société en général qui a changé. À la fin des années 70s, notamment avec le Krautrock en Allemagne, les jeunes utilisaient la musique pour se libérer d’un passé pas très joyeux. Les circonstances étaient vraiment très différentes de celles d’aujourd’hui. Mais il existe toujours des groupes qui s’engagent politiquement et qui le font très bien. Je ne suis pas sur que je pourrais faire cela assez bien de mon coté et je préfère laisser ceux qui ont vraiment ce talent le faire eux-mêmes.
Edd : Qu'entends-tu par engagés politiquement ? Est-ce être personnellement engagé ou écrire des textes pour une cause ? Je ne pense pas que tout cela ait vraiment changé, il y a toujours des formations qui écrivent des textes engagés. Prenons l’exemple du Japon et de ce drame planétaire. Je crois qu’en ce moment des groupes se mobilisent pour lever des fonds et c’est une bonne forme d’engagement.

Justement, à la vue de tout ce qui se passe en ce moment dans le monde, pourriez-vous, un jour, participer à ce genre d’action de soutien ou même composer un titre de soutien à une cause ?

Ed : Le thème principal de notre album est basé sur le moment présent et le côté éphémère de la vie. Il faut vivre ce qui t’arrive au moment présent. Nous-mêmes ne serons pas toujours un groupe et ne ferons peut-être pas toujours de la musique. Et, en ce sens-là, on peut considérer que notre message est d’ordre social même s’il n’est pas politique.

Vous avez écrit l’album Pala entre 2009 et 2010. Pourquoi cela vous a-t-il pris si longtemps ?

Ed : J'adore le côté direct de ta question (rires) !
Edd : De la sortie du premier album, et pendant les dix-huit mois qui ont suivi, nous n’avons pas arrêté de tourner pour assurer sa promo. De l’extérieur, cela peut peut-être sembler long mais, pour nous, nous n’avons pas vraiment senti de creux durant tout ce temps car nous étions constamment occupés. Mais c’est vrai que les deux albums sont assez espacés dans le temps ; je pense que nous aimons prendre le temps qu’il faut pour écrire et composer.
Ed : Nous aurions sûrement pu accélérer les choses et sortir un disque l’année dernière, histoire de ne pas prendre le risque que le public nous oublie trop vite... mais, le résultat, si long fut-il à naître, semble être très bien accueilli par les médias et c’est ce qui compte au final. Ke premier single marche très bien en Angleterre. Je n’ai pas vraiment de réponse ou d’argument pour expliquer pourquoi il nous a fallu tout ce temps entre les deux albums...
Jack : Il suffit de mettre un jour de moins ou de plus et l’on obtient un disque totalement différent ; c’est donc le bon timing pour cet album à mon goût.

D’où vient le titre de l'album, Pala ?

Ed : Pala est le nom d’une île paradisiaque dans le roman intitulé The Island d’Aldous Huxley. C’est une vision utopiste de comment le monde devrait être mené et comment nous devrions nous comporter. L’idée rejoint celle que je défendais plus tôt dans l’interview et selon laquelle rien n’est permanent, qu’il faut tout apprécier dans le moment. J’ai pensé que c’était un beau symbole pour ce disque.

Par rapport à votre premier album, Pala dégage une énergie différente, plutôt située dans des rythmes et des percussions que nous pourrions qualifier de rythmes tropicaux, presque Brésiliens parfois. Où trouvez vous l’inspiration pour ces tempos ethniques ?

Edd : Dans mon cerveau dérangé (rires) !
Ed : Nous avons beaucoup écouté Flying Lotus pour ses compositions dance très planantes parfois. Nous nous sommes fixés une règle qui consiste à ne jamais produire de beat binaire et simpliste. Il existe beaucoup de groupes indie pop très faiblards qui font déjà cela !
Edd : La création de la plupart de nos titres démarre par la basse et la batterie ; ce sont les parties percussions qui nous font avancer.

Avez-vous volontairement adapté votre processus d'écriture pour rendre Pala différent de son prédécesseur ?

Ed : J’ai toujours pensé que notre premier album ressemblait un peu à une collection de titres collés les uns aux autres, influencés par le son DFA ou punk funk. Pour Pala, j’ai la sensation que nous avons obtenu disque plus brillant, plus vibrant et fièrement revendiqué comme pop !

Pala a été enregistré dans plusieurs studios dans plusieurs villes et même dans plusieurs pays. Comment est-ce arrivé ?

Ed : Enregistrer dans plusieurs lieux donne des idées brillantes et empêche de se renfermer dans sa ville ou son pays d’origine. L’âme voyage et se laisse bercer pour plus de créativité.

Pour vous, le fait de se poser quelque part un certain temps, dans un studio particulier par exemple, n’est pas positif dans l'optique de création ?

Ed : Non. Le fait de se rendre au même studio jour après jour serait ressenti comme un vrai travail !

Cet album a été produit avec Paul Epworth. C’était une évidence pour vous ?

Ed : Oui. La moitié de l’album a été réalisée avec Paul. Quand nous travaillons avec lui, il sait que nous avons des opinions très tranchées sur le son et les résultats que nous attendons de nos sessions en studio. Nous sommes très attachés au son que nous aimons produire et Paul, qui est très ouvert et nous pousse dans ce sens. Il nous aide à faire en sorte que nos productions soient cohérentes et sonnent dans l’immédiateté.
Edd : Il sait que nous aimons les détails et sait comment faire pour amplifier l’impact que ceux-ci peuvent avoir sur un album. Tout cela offre un résultat plein de richesse sonore.
Jack : Quand nous travaillons trop sur un titre, en amont et pendant la session, nous pouvons vite perdre de vue le résultat recherché. Paul nous aide à garder le cap et à apporter de l’air frais quand nous commençons à nous essouffler. Il a un grand talent d’arrangeur et il structure nos idées.
Ed : Quand je me suis retrouvé seul pendant presque un mois dans un cottage à côté de Rouen pour enregistrer quelques titres, je me souviens avoir joué Running Away tous les jours du matin au soir pendant une semaine et je n’étais vraiment pas certain du résultat. Paul m’a encouragé à aller dans le bon sens et, finalement, nous avons gardé la vision du titre que j’avais développée tout seul en Normandie...

Lequel d’entre vous est fan de jeux vidéos ? Comment certains de vos titres se sont-ils retrouvés sur les consoles via les jeux Colin McRae ou Gran Turismo ?

Ed : J’espère que nous sommes assez sélectifs sur les titres que nous acceptons de laisser partir pour des raisons marketing... mais, bien sûr, je suis fan des consoles de jeux vidéo.
Edd : Je crois qu’il y a bien pire que des jeux vidéos pour représenter certains de nos titres, nous pourrions être dans un spot publicitaire débile ! Il n’y a pas de raison d’avoir honte de se retrouver dans Gran Turismo ou Colin McRae...
Ed : Personnellement j’espère que nous pourrons un jour être dans GTA, beaucoup d’artistes internationaux ont un titre à eux dans ce jeu.